Avis de tempête

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Les transporteurs pourront-ils éviter les 35 heures pour leurs personnels « courte distance » ? Le ton monte entre des fédérations professionnelles qui s'y refusent et des syndicats de salariés qui, opposés à toute dérogation, menacent de passer à l'action. Autre sujet d'inquiétude : le devenir des ristournes fiscales sur le carburant.

L'ultime réunion du groupe technique chargé de réécrire le décret « 35 h » s'est soldée, le 1er février, par un constat d'échec. L'écart entre les positions affichées par les fédérations patronales et certains syndicats de salariés semble même s'accentuer. La CGT, FO, CFTC et FNCR (Fédération nationale des chauffeurs routiers) font bloc et refusent toute dérogation. Selon eux, « réinstaurer des heures d'équivalence, une durée hebdomadaire de 56 heures et supprimer un grand nombre de repos compensateurs » équivaudrait à « un retour en arrière de près de 20 ans ». Ils appellent leurs adhérents à se mobiliser « contre tout projet de déréglementation sociale » et évoquent une action de blocage des raffineries pétrolières. Une menace à laquelle la CFDT ne s'associe pas. Elle maintient, en revanche, sa demande d'un retour au droit commun pour les conducteurs « courte distance ». Le syndicat propose de programmer cette opération en deux étapes: les personnels de messagerie dans un premier temps, les autres ensuite. Une piste qu'aurait appuyée, le 1er février, la Direction des Transports terrestres. Laquelle rencontre désormais les organisations une à une afin d'épuiser toutes les voies de compromis possibles avant la rédaction d'un décret que le ministre des Transports Jean-Claude Gayssot entend toujours prendre avant la fin du mois.

L'hypothèse d'un retour au code du travail pour les entreprises de messagerie, voire l'ensemble des courtes distances, est combattue par les organisations professionnelles. « Cette perspective n'est pas envisageable » indique Christian Rose, secrétaire national de l'Unostra. « Elle irait à contre-courant de la future directive sur le temps de travail des conducteurs comme des réalités. A savoir la concurrence européenne qui touche de plus en plus les marchés régionaux ». Quant à TLF (Fédération des entreprises de transport et logistique de France), elle est intervenue, le 1er février, auprès du Gouvernement. Dans une lettre ouverte adressée au Premier ministre, au ministre des Affaires sociales Elisabeth Guigou et à Jean-Claude Gayssot, l'organisation souligne que « le long processus technique conduit depuis deux mois par le ministère des Transports n'aura pas d'aboutissement tangible et ne répond aucunement à l'urgence de la situation ». Selon Alain Bréau, co-président de l'organisation, l'actuel vide juridique pourrait être mis à profit par certains pour alléger leurs coûts de personnel. La validation par le Conseil d'Etat des heures d'équivalence autorise, théoriquement, à ne plus rémunérer ces heures. Ce qui conduirait à une baisse des rémunérations d'environ 13%. En outre, la remise en cause de quelque 500 accords d'entreprises et des allégements de cotisations y afférents pénaliserait les sociétés les plus avancées au plan social. Peu confiant dans les effets d'un décret, TLF demande qu'un article soit introduit dans l'une des deux lois Aubry sur la réduction du temps de travail afin de reconnaître la spécificité sociale du secteur. Une telle clause permettrait « d'élaborer tous les textes à venir sans avoir recours à des rafistolages ».

Si la spécificité des entreprises de transport à l'égard des 35 heures n'était pas maintenue, la profession perdrait l'une des deux conquêtes obtenues en 2000, s'inquiète l'organisation. D'autant que la seconde, les ristournes fiscales sur le gazole, semble tout aussi menacée. A la veille de la réunion des commissaires européens qui devait décider du sort de ces réductions (cf encadré ci-contre), TLF a demandé au gouvernement de prendre ses responsabilités. « A lui de trouver des solutions afin que soit conforté un dispositif qui ne fait que rapprocher les taux d'accises français sur les carburants de la moyenne européenne », indique Alain Bréau. Autre possibilité laissée au ministre des Transports : peser sur la Commission afin qu'elle abandonne une procédure jugée « plus politique que technique ». Si un remboursement des sommes était exigé, la facture à régler par les professionnels atteindrait 460 000 euros (trois milliards de francs) selon l'organisation qui a mené seule cette démarche. « Nous avons seuls signé l'accord du 6 septembre 2000 sur le gazole », explique TLF. Au passage, elle lui permet de prendre de court la FNTR (Fédération nationale des transports routiers) qui a fait du carburant utilitaire son cheval de bataille.

RISTOURNE FISCALE SUR LE GAZOLE
Juste trois mois de répit

La décision de la Commission européenne sur les réductions fiscales sur le gazole accordées aux transporteurs routiers ne sera pas rendue avant trois mois. La France, l'Italie et les Pays Bas ont obtenu in extremis, le 4 février, un ajournement de la procédure menée par Bruxelles. Le lendemain, une réunion des commissaires européens devait en effet se prononcer sur le sort de ces ristournes. Un avenir fort hypothéqué puisque l'enquête diligentée par les services de Loyola de Palacio, commissaire chargé des Transports et de l'Energie, les assimilerait à des aides d'Etat. A ce titre, leur arrêt immédiat était sollicité (sans remboursement des sommes versées aux transporteurs toutefois). Cette menace a conduit les trois Etats membres, qui ont accordé des réductions aux professionnels pour faire face à la flambée du prix du carburant à l'automne 2000, à engager une action concertée. Sur la base de l'article 88.2 du Traité de l'Union, ils ont saisi le Conseil pour lui demander de statuer à nouveau sur la légalité de ces dispositifs. Le Conseil des ministres de l'Economie et des Finances (Ecofin) aura trois mois pour accepter ou refuser de déroger, au bénéfice du secteur routier, aux règles de base interdisant les aides d'Etat. La décision devra être prise à l'unanimité des Quinze. Sachant que l'Allemagne s'est déjà révélée fort critique à l'égard de telles mesures. Loyola de Palacio a déjà prévenu que l'absence d'accord conduirait Bruxelles à reprendre sa procédure au stade où celle-ci a été suspendue. Et, a-t-elle ajouté, la commission pourrait même durcir sa position.

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