« Offrir une performance globale  de la chaîne logistique fluviale »

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La situation, les perspectives et priorités, les points de vigilance sur l’axe Seine, pour CFT, groupe Sogestran. «En 2020, nous avons globalement limité les dégâts, nous nous en sortons plutôt correctement. Cela a été une année difficile, tendue, éprouvante. Nous avons mis en place un plan de continuité des activités. Le personnel a montré un comportement exceptionnel, il y a eu un engagement fort de chacun », indique Sébastien Somers, directeur CFT Seine & Nord.  Le mouvement contre la réforme des retraites entamé en décembre 2019 a gagné le personnel portuaire début 2020 ce qui a affecté les trafics puis la crise du Covid-19 est arrivée avec le premier confinement en mars. Le BTP en général s’est arrêté du jour au lendemain, suspendant les trafics de granulats, ciments, déblais. « 80 % de notre activité a été stoppée. Nous avons poursuivi les conteneurs sur la Seine et le Nord non sans mal avec l’amplitude de fonctionnement des ouvrages revue à la baisse ce qui contrarie ce trafic pendulaire et juste à temps. De 1,5 à 2 aller-retour par semaine, nous sommes tombés à un seul », explique Sébastien Somers. A partir de juin, la reprise assez forte du BTP a été un signal positif et les équipes de CFT ont répondu présentes. Le deuxième semestre a montré un rebond significatif des volumes. A noter que la filiale CFT Mahieu a plutôt bien résisté et saisi des opportunités sur la filière des vracs liquides.  Pour CFT sur l’axe Seine, les chantiers du Grand Paris Express (GPE), qui atteignent leur vitesse de croisière, constituent un axe fort de l’activité et du développement. Il y a trois chantiers du GPE majeurs pour l’entreprise : T2A, T3A et Eole. Des investissements ont été réalisés pour de l’achat et de l’adaptation de matériel pour ces chantiers du GPE mais aussi ceux des Jeux olympiques de 2024. Les équipages sont aussi formés à la navigation 24 h sur 24. « Même avec la crue en février 2021, les transports se poursuivent, les travaux de T3A continuent, un volume de 7 500 tonnes par jour est chargé et évacué », souligne Sébastien Somers.  « Un autre enjeu fort où nous engageons, c’est la logistique urbaine fluviale avec les démonstrations à Paris du bateau Zulu 3 équipé de sa grue autonome. Nous y croyons et nous nous engageons y compris avec des investissements importants pour réaliser un nouveau Zulu qui utilisera de l’hydrogène », poursuit ce responsable (voir encadré). 

Besoin d’infrastructures efficaces

Pour les activités de CFT sur l’axe Seine, la qualité des infrastructures constitue un élément incontournable. Prévue pour fin 2023-début 2024, la mise en service de l’accès direct fluvial à Port 2000 va représenter une progression majeure. Pour Sébastien Somers : « C’est un vrai choix stratégique et un atout pour l’avenir. Cet accès va se faire avec le soutien de l’Union européenne et de la région Normandie qui a entendu les arguments de tous les acteurs économiques parlant d’une même voix. Il a été difficile de convaincre le port du Havre mais depuis que tout est mis en place, il joue le jeu. On souhaiterait voir plus souvent la même démarche, s’affronter sur les sujets mais une fois qu’on est d’accord, tout se met en marche. On va augmenter la confiance dans la possibilité d’évacuer les flux au départ du port ». Toute la flotte fluviale aura accès à Port 2000 alors qu’aujourd’hui, seuls 5 bateaux sont adaptés au passage par la route Nord et 2 par celle du Sud. Pour Steve Labeylie, responsable des relations institutionnelles du groupe Sogestran : « L’objectif de tous est que le port fonctionne mieux, que se multiplient les solutions logistiques qui renforcent son attractivité ». 

Concernant la Seine, des travaux ont commencé, par exemple à Méricourt, un vaste plan de régénération des infrastructures est engagé sur l’ensemble du bassin, boosté par le plan de relance. « Nous regrettons qu’il ait fallu attendre si longtemps. Pour nous, c’est une vraie difficulté opérationnelle au quotidien. Il y a toujours un risque de blocage de l’activité fluviale. Il est nécessaire de remettre à niveau les infrastructures sur l’axe Seine. Nous sortons d’une période de sous-investissement. Il ne faudrait pas que les travaux s’engagent, notamment grâce au plan de relance, et que tout s’arrête dans 2 ans. La performance de l’axe Seine, la croissance des volumes passent par des infrastructures efficaces et des investissements pérennes. Il ne faut pas oublier non plus les besoins de zones d’attente et de stationnement en amont et en aval des écluses et ailleurs », détaille Sébastien Somers

Concernant les investissements sur les infrastructures, la pérennisation du budget de Voies navigables de France (VNF) sur de nombreuses années est un point important. En plus de la régénération et de l’entretien du réseau, des projets majeurs sont en ligne de mire comme Bray-Nogent, la mise au grand gabarit européen de l’Oise (Mageo). Ce dernier projet s’inscrivant dans la perspective de la mise en service de Seine-Nord Europe qui peut-être une opportunité pour les ports de l’axe Seine y compris Rouen et Le Havre. Il ne faut pas oublier non plus le projet PSMO. « Toute amélioration de l’infrastructure entraîne une amélioration du trafic fluvial. Toute nouvelle infrastructure fluviale entraîne le besoin et est source de croissance pour la filière », assure Steve Labeylie

Pour Sébastien Somers, il faut réfléchir à la navigation H24 sur la Seine amont, l’Oise, à l’automatisation, à la téléconduite. « Il faut offrir une image de modernité, une performance globale de la chaîne logistique fluviale, comme le transport routier, loin de l’image d’Epinal de la lenteur et des écluses pas fiables ». 

Le coût de traitement des bateaux fluviaux

Parmi les avancées positives, il y a les annonces du gouvernement sur l’augmentation des aides au transport combiné (« aide au coup de pince ») dont l’enveloppe doit passer de 27 à 47 millions d’euros. Steve Labeylie relève : « C’est un ballon d’oxygène pour les deux à trois ans à venir, nous attendons le courrier officiel. Et c’est une solution de court terme. Son pendant négatif reste le coût de la manutention des barges fluviales dans les ports maritimes français. Dans tous les autres ports européens ainsi qu’à Dunkerque, cela a été réglé. Nous souhaitons aboutir à une solution saine et équilibrée ».

Le groupe Sogestran ne nie pas l’existence d’un coût de traitement des bateaux fluviaux pour les manutentionnaires. « Mais on fait peser un coût sur le fluvial qui n’a aucune marge de négociation et se retrouve ainsi dans une situation commerciale qui n’est pas saine. Le système n’est pas concurrentiel. Nous demandons que le coût de la manutention fluviale soit pris en charge par les donneurs d’ordre qui peuvent négocier avec les manutentionnaires ». Pour les deux responsables, la nomination de Stéphane Raison en tant que directeur général-préfigurateur du futur établissement unique Haropa, qui sera en place le 1er juin 2021, est un signal favorable pour l’avancement de ce sujet. « C’est avec lui qu’on a travaillé à Dunkerque. Le report modal est une vraie ambition pour lui ». 

Concernant les terminaux maritimes, Steve Labeylie souligne l’absence « d’éco-conditionnalité », c’est-à-dire qu’il n’y a pas d’incitation ni d’obligation de part modale alternative à la route pour les opérateurs. Selon lui, il existe deux possibilités de mise en œuvre : soit l’imposer dans les amodiations, soit chaque candidat propose une part modale dans son projet qui devient ensuite contractuelle s’il est retenu. 

Parmi les points de vigilance pour l’avenir des activités de transport fluvial sur l’axe Seine, il y a les projets de multiplication des établissements flottants et d’installation de zones de baignade en vue des Jeux Olympiques de Paris en 2024. Dans la Seine à l’intérieur de Paris, certains des sites de baignade prévus correspondent à des zones où le trafic est intense et la topographie de la Seine particulièrement contraignante. « Il nous paraît étonnant de prévoir des baigneurs là où naviguent des bateaux de 5 000 tonnes. Il faut prendre en compte tous les paramètres dont nous avons besoin pour la navigation des bateaux et préserver la sécurité de tous ». 

Comme autre projet à surveiller, il y a l’extension de la CCNU aux ports intérieurs. « Il faut rappeler qu’il y a déjà une convention qui s’applique dans les ports intérieurs avec laquelle tout se passe bien et tout fonctionne. Ce projet signifie une perte de polyvalence pour le personnel portuaire. Il signifie une augmentation des coûts par l’application de la grille à la manutention. Il signifie une distorsion de compétitivité entre les plates-formes des ports intérieurs et toutes les autres. Pourquoi étendre la CCNU à la plate-forme de Bonneuil mais pas à celle de Valenton ? ».

 

Sogestran est engagé dans la transition énergétique

En 2020, la flotte du groupe Sogestran a été adaptée pour permettre aux bateaux de se connecter aux bornes d’eau et d’électricité à quai qui sont installées le long de l’axe Seine par Haropa et VNF. « Nous somme l’un des co-animateurs de ce projet. Notre volonté est que l’usage des bornes se développe et de démontrer que le projet a du sens. Cela rejoint l’ambition du groupe de limiter de manière significative son empreinte environnementale sur l’environnement », explique Steve Labeylie. Les bornes d’eau et d’électricité, qui permettent de couper les groupes électrogènes des bateaux à quai, et les carburants de substitution (Oleo100/B100) sont un premier volet pour concrétiser cette ambition à court terme. Sur la Seine, depuis juin 2020, l’automoteur le Sandre expérimente le B100 un carburant obtenu à partir d’huile de colza, et qui ne nécessite aucune évolution du bateau ni des moteurs. Un autre volet concerne les carburants alternatifs (batteries, pile à combustible, hydrogène) qui supposent des transformations à bord des bateaux, c’est un travail à long terme. A moyen terme, il y a les solutions d’hybridation des bateaux dont la conception doit être plus modulaire, permettre des retrofit plus facilement pour les adapter aux nouvelles solutions d’énergies. Début 2018, le groupe Sogestran s’est lancé dans l’aventure hydrogène pour un pousseur sur le bassin Rhône-Saône-Méditerranée. Le projet « Flagship » concerne la réalisation de deux bateaux électriques alimentés par pile à hydrogène (un ferry maritime en Norvège pour l’armateur Norled et le pousseur de CFT) et est soutenu par l’Union européenne dans le cadre du programme Horizon 2020 avec 5 millions d’euros de financement. En 2020, CFT reconfigure son projet de pousseur à l’hydrogène au profit d’un automoteur sur le modèle des Zulu. « Nous sommes toujours dans le projet Flagship. Le Zulu 6 sera un bateau diesel-électrique auquel sera ajouté l’hydrogène sur le pont quand il sera livré au Havre où se feront les essais et la mise en service. Le diesel-électrique sera utilisé en secours si l’avitaillement en hydrogène n’est pas possible », précise Steve Labeylie. Le Zulu 6 est attendu pour la fin 2021 sur l’axe Seine où il pourra naviguer dans le cadre d’une dérogation obtenue grâce au dispositif de l’arêté de zone restreinte. Une demande sera aussi faite au niveau européen. « C’est un projet d’envergure pour le groupe. Les perspectives pour le Zulu 6 s’inscrivent dans le développement de la logistique urbaine fluviale et des Jeux Olympiques de Paris en 2024. C’est un démonstrateur avec lequel il s’agit de montrer tous les aspects en lien avec la transition énergétique, avitaillement, coût technologique, stockage de l’hydrogène, etc. », ajoute Steve Labeylie.

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