Une deuxième édition des « Rencontres énergies » de l’observatoire régional des transports (ORT) de l’Occitanie a montré l’importance du mix énergétique pour la transition écologique des différents modes de transport. Dans cette région, le fret fluvial est un parent pauvre.
« Dans le contexte de dérèglement climatique, de crise écologique et de conflit mondial, il va falloir se projeter dans la pluralité des énergies et dans la transversalité. Il ne s’agit plus de travailler en silo », a déclaré Michel Colombié, président de l’Observatoire régional des transports de l’Occitanie (ORT) lors de la deuxième édition des « Rencontre de l’énergie » organisée le 10 novembre 2022 . L’ORT se veut « vecteur » d’une mutation énergétique dans la lancée d’une région au programme ambitieux. « La ligne est claire : devenir la première région à énergie positive à l’horizon 2023 », dit Jean-Luc Gibelin, vice-président de la région, chargé des transports, qui insiste sur la nécessité « d’intervenir sur toutes les mobilités ». La collectivité territoriale conduit notamment plusieurs projets sur la production d’hydrogène « vert » (voir article de NPI).
« Il est impératif que tous les acteurs du transport et de la logistique appuyés par les chargeurs et les collectivités s’engagent », ajoute François de Bertier, co-président du cluster Ten-Log, maillon technique de la politique régionale auprès des transporteurs. La mission du cluster est opérationnelle : aides à l’investissement, diagnostic, recensement de solutions.
Chercheur à l’IMT Mines d’Albi, Christophe Coquelet privilégie une diversité de solutions : « Il faut un mix énergétique et sortir d’une communication trop ciblée sur l’hydrogène ». Très sollicité par les industriels, il met au point des carburants de synthèse sur la base de la réaction entre l’hydrogène, issu de biogaz, et du CO2 capté à partir du biométhane. La recherche, basée sur les déchets, est partenaire de Suez comme de la plateforme publique locale de traitement de déchets et de méthanisation Trifyl.
Marc Lambec, dirigeant de la PME ARM Engineering, a insisté sur l’intérêt du « déchet » durable et accessible. La société travaille sur des biocarburants utilisant de la biomasse produite localement. « Tant qu’il y aura des déchets et du fumier, il y aura des biocarburants », et insiste lui aussi sur le besoin de « mix énergétique ».
Ferroviaire et fluvial
Directeur logistique pour Nestlé Waters, Jean-François Lagane, a fait du rail sa nouvelle bataille. Entre l’usine vosgienne et Arles, la société remplit trois trains par semaine. « Il reste un vide entre Arles et nos entrepôts de Vergèze reliés au rail ». La société s’efforce de trouver de nouveaux entrepôts ou une solution ferroviaire. « Les problématiques de multimodalité du train persistent », selon lui. Il rappelle que le rail est un transport décarboné.
Jean-Louis Salva (transports Salva) utilise le rail-route qu’il considère comme étant sous-utilisé dans l’Hexagone. « Entre Perpignan et Paris, le succès du fret ferroviaire l’a vite saturé ». Si des efforts sont attendus pour développer la ligne, le réseau ferroviaire national est perçu comme « trop vieux ». « Pour que le rail-route soit une option, il faut aussi être isocoût avec les camions et penser autrement que le flux tendu ».
Sur le transport fluvial, la politique de l’Occitanie, mouillée par le canal des Deux Mers, apparaît balbutiante. Le transporteur et président d’APLF, Jean-Marc Samuel, relève un manque d’équipements et de quais pour un potentiel de flux identifié par les collectivités. « Le déficit d’entretien dû à la baisse de dotation de VNF par l’État handicape tout le réseau. Quelque cent millions d’euros annuels permettraient d’y remédier. Sur le réseau régional, le transport d’un transformateur de 100 tonnes en 2021 a démontré un canal du Midi navigable ». Le transporteur rappelle que l’hydrogène est à l’étude sur différents projets fluviaux.
Une réglementation à améliorer
Un autre cas concret a été relaté par Christophe Caset-Carricaburu pour sa société Service Ecusson Vert, des livreurs urbains conventionnés avec la métropole de Montpellier. L’entrepreneur se bat avec une réglementation limitée qu’il trouve inadaptée : « Nous transportons 40 % d’air car nous ne pouvons pas mélanger les produits, c’est aberrant ». Des essais sur des prototypes de véhicules électriques « petits gabarits » lui permettraient de limiter ses coûts. Il fustige aussi l’impossibilité d’accéder à des données, problématique des commissaires de transport. « Nous pourrions gérer les flux et économiser camions et chauffeurs. Nous avons fait les choses à l’envers, nous avons créé un algorithme pour démontrer les économies possibles ».