Le projet Multirégio, consistant à construire des barges et automoteurs pouvant naviguer sur le réseau à « petit » gabarit et susceptibles d’être assemblées en convoi sur le réseau de grand gabarit, a été conçu initialement par VNF.
Il a été repris en 2020 par des céréaliers et des industriels de la construction, qui ont le projet de faire construire 20 bateaux : 8 barges et 12 automoteurs, dont l’un pourra ultérieurement être équipé pour fonctionner sur pile à combustible à hydrogène.
Quel est le projet aujourd’hui ?
« Nous souhaitons aller au-delà d’un simple projet de construction de bateaux, avec la mise en place d’une quinzaine de ports sur les différents axes fluviaux, pour avoir une approche systémique », indique Bruno Bouvat-Martin, premier vice-président de la coopérative agricole Axéréal, qui coordonne les entreprises souhaitant investir dans ce projet.
Le projet portuaire, précise ce responsable, a été déposé dans le cadre du plan de relance pour obtenir des financements publics à hauteur de 30 % des investissements. Des financements européens sont aussi demandés dans le cadre du Mécanisme pour l’interconnexion (MIE).
Le premier projet portuaire concerne le site de Languevoisin, près de Nesle (Somme). Le silo, exploité par Noriap, coopérative agricole des Hauts-de-France, est situé le long du canal du Nord. Le projet Euroseine, mené par Noriap avec cinq autres coopératives, consiste à créer sur ce site une nouvelle plateforme, qui aura accès au futur canal Seine-Nord Europe et pourra aussi être utilisée pour des transports de granulats.
Où en sont les financements ?
« Le projet de Languevoisin a été accepté et fera donc l’objet de financements européens, déclare Bruno Bouvat-Martin. Pour les 14 autres ports, les dossiers seront déposés en janvier 2024 au plus tard, dernier délai possible pour obtenir des subventions dans le cadre du MIE » pour la période en cours. Le mécanisme européen ne s’intéressant qu’aux infrastructures de long terme, ces financements concernent uniquement des créations de darses, des constructions de bâtiments et aménagements de terrains, mais pas les équipements de manutention.
« Les investissements pour les équipements de manutention portuaire sont complémentaires de Multirégio, pour avoir une approche plus systémique de la logistique fluviale, précise Bruno Bouvat-Martin. Nous sommes persuadés que pour faire venir vers le fluvial des PME ou PMI, il faut leur proposer une offre globale de bout en bout, prenant en compte toutes les ruptures de charges dans les ports et les pré- et post-acheminements ».
Où en sont les engagements de chargeurs et d’entreprises ?
Le projet de construction de bateaux, de son côté, continue à avancer :
- Autour de la table, surtout des céréaliers : les coopératives Noriap, Cérèsia et Axéréal.
- Le spécialiste de la gestion d’équipements logistiques Touax est aussi présent.
- La participation des entreprises de construction est plus incertaine. Eiffage indique s’être retiré du projet. Du côté de Vinci, on refuse de communiquer car « le groupe n’a pas confirmé sa participation dans le projet Multirégio ».
Pour Bruno Bouvat-Martin :
- « Tant qu’on n’a pas travaillé le financement, les marques d’intérêt des entreprises ne peuvent pas se transformer en validation d’investissement.
- L’investissement pour compte propre est une chose qui avait été un peu abandonné par les acteurs français. Or nous avons absolument besoin de bateaux, et ceux-là nous permettront d’utiliser le canal du Nord et continueront à être pertinents après l’ouverture de Seine-Nord Europe ».
Quelles sont les prochaines étapes ?
Le cahier des charges, travaillé avec le cabinet d’études Mauric, devrait être validé dans les jours qui viennent et définir précisément le coût du projet, qui devrait approcher 37 millions d’euros pour vingt bateaux, et non 20 millions d’euros comme prévu initialement.
L’engagement ou non des différentes entreprises dans la construction des bateaux devrait intervenir au quatrième trimestre 2023. C’est à ce moment que seront constituées deux sociétés :
- La première détiendra les bateaux, et aura pour actionnaires les coopératives agricoles (et les groupes de BTP) mais aussi Touax, l’Ademe et la Banque des territoires.
- La seconde, constituée par les chargeurs, paiera un loyer à la première pour utiliser les bateaux. Elle fera ensuite un appel d’offres auprès de logisticiens pour en organiser l’exploitation opérationnelle.
Les appels d’offres pour la construction des bateaux sont prévus pour fin 2023 ou début 2024.