Platina 3, plate-forme de mise en œuvre de Naiades 3, organise les 10 et 11 février 2022 un troisième séminaire d’échanges pour le secteur fluvial européen avec plus de 200 participants annoncés sur un jour et demi, intégralement en ligne.
L’un des thèmes abordés lors de ce séminaire a été celui des conséquences du changement climatique avec des phénomènes accentuées de basses et hautes eaux des fleuves et les adaptations possibles des infrastructures et des bateaux pour que les activités de la navigation intérieure se poursuivent.
Le groupe BASF est intervenu pour présenter les solutions mises en place pour son site de Ludwigshafen implanté au bord du Rhin et dont les activités ont été particulièrement affectées lors des basses eaux, qualifiées « d’extrêmes », de ce fleuve en 2018.
Ludwigshafen, c’est le siège social de ce groupe leader de la chimie sous toutes ses formes (de la chimie de base à la chimie fine en passant par les spécialités, les matières plastiques, les peintures pour l'automobile, la chimie du bâtiment, les produits pour la protection des plantes…). C’est aussi le centre principal de ses activités, voire l’un des sites industriels les plus importants au monde pour la chimie.
Importance critique du fluvial pour les flux entrants
« Le Rhin et le transport fluvial sont d'une importance critique pour l'approvisionnement en matières premières du site de Ludwigshafen. Les barges représentent 52 % des flux entrants, le rail 25 %. Les oléoducs et gazoducs sont également essentiels avec 13 % tandis que les poids lourds sont minoritaires avec 10 % », a indiqué Benoit Blank de BASF, lors de la réunion de Platina 3 le 10 février 2022. Pour les flux sortants, la répartition n’est pas tout à fait la même : les poids lourds atteignent une part de 47 %, les barges 29 %, le rail 24 %.
Lors des basses eaux « extrêmes » en septembre et octobre 2018 (après des alertes en 2015 et 2017), « les capacités d’emport des barges ont significativement chuté, avec seulement 200 à 300 tonnes possibles. Les taux de fret ont été jusqu’à 7 fois plus élevés par rapport à des prix lors de niveaux d’eau normaux, en incluant les surestaries. Mais ce n’est pas qu’une question de coûts, il n’y avait tout simplement pas de cale disponible. Nos flux logistiques ont été fortement perturbés et donc l'approvisionnement du site également », a poursuivi Benoit Blank.
En 2018 l’étiage a duré deux mois et pendant 6 jours, les barges n’ont pas pu livrer le site alors qu’elles sont majoritaires pour les flux entrants. Cette interruption des livraisons par le Rhin en 2018 a été un choc majeur pour le groupe BASF et a entraîné une réflexion et des actions concrètes pour éviter que le site ne se retrouve de nouveau en difficulté en cas de reproduction de tels étiages.
Un outil numérique et un bateau adapté
L’une des solutions de BASF fait appel à des outils numériques pour obtenir des prévisions à long terme et les plus précises possibles sur les évolutions des niveaux d'eau du Rhin (water level forecasting tool). En travaillant avec le projet européen Imprex et l’institut fédéral d’hydrologie, BASF dispose désormais d’informations de prévision sur une période de 10 jours à 6 semaines pour les niveaux du Rhin à l’échelle de Kaub, « pour un usage interne ». Cela lui permet d’anticiper la survenue d’épisodes de basses eaux et de prendre les mesures de compensation nécessaires en amont.
Le groupe BASF a « sécurisé » l’utilisation de barges « avec des capacités de tonnage améliorées et qui peuvent continuer à naviguer même avec des niveaux d’eaux faibles », dans le cadre de contrats d’affrètement à temps (time charter).
Il a lancé la conception d’un bateau « optimisé pour les basses eaux », c’est-à-dire avec « une capacité de port en lourd élevée pour un faible tirant d'eau, soit 650 tonnes de fret possible à un tirant d'eau de 1,20 m » et 2 500 t à 2,05 m. Ce bateau peut ainsi naviguer en période de niveau d’eau « normale » et « faible »
Selon Benoit Blank, « nous avons la chance d’avoir pour partenaire Stolt Nielsen pour construire et opérer ce bateau-citerne. La mise en service est prévue pour cette année 2022 ».
Ce bateau se distingue d’une unité standard par ses dimensions plus grandes qui sont de135 mètres au lieu de 110 m et 17,5 m au lieu de 11,5 m ainsi que par « l’amélioration de l'hydrodynamisme de la coque afin d'assurer des caractéristiques d'écoulement optimales ».
La présence de « trois hélices et tunnels flexibles optimisés permettent une adaptation à des situations d’étiage extrêmes comme à des conditions d’eau normales ». Il compte 10 réservoirs en acier inoxydable et 3 systèmes de chargement séparés. L’aspect environnemental n’a pas été oublié avec des moteurs diesel-électriques et un traitement des gaz d'échappement (conforme à la norme Stage V/EMNR).
Une autre solution mise en place par BASF est de recourir davantage aux transports ferroviaire et combiné.
En conclusion, Benoit Blank a souligné « l’importance de travailler sur l’infrastructure elle-même afin de garantir la navigabilité du Rhin à long terme », avec un horizon de planification d’ici 2032, les rôles de l’Etat (fédéral en Allemagne) et des instances politiques régionales (Länder) sont ici centraux tout comme une information large du public et une meilleure intégration de l’économie et de l’environnement.