Dès le lendemain de l’incendie qui a frappé la cathédrale Notre-Dame de Paris le 15 avril 2019, le Président de la République Emmanuel Macron a annoncé la reconstruction de l’édifice dans un délai de cinq ans. Un projet de loi a d’ailleurs été présenté en conseil des ministres le 24 avril, qui prévoit des dérogations à la réglementation afin d’accélérer le chantier et de permettre son achèvement pour les Jeux olympiques, qui doivent se tenir à Paris en 2024. Adopté par les députés le 11 mai, le texte a été transmis au Sénat où son examen est prévu pour la fin mai.
Une durée réduite à cinq ans pour la reconstruction d’un tel monument constitue un défi architectural, technique et financier, mais aussi un défi logistique que les acteurs du transport fluvial entendent relever. Pour évacuer les déblais comme pour approvisionner le chantier en matériau de construction, l’utilisation du transport fluvial pourrait en effet s’imposer, la cathédrale parisienne étant construite sur l’île de la Cité. La Seine y est donc divisée en deux bras, le Grand Bras passant au nord de l’île et le bras de la Monnaie au sud.
La navigation des bateaux, par alternat, passant par le Grand Bras, c’est le bras de la Monnaie qui pourrait être utilisé pour la logistique fluviale du chantier de Notre-Dame, selon Haropa-Ports de Paris, qui a procédé, avec Voies navigables de France (VNF), la préfecture et la Communauté portuaire de Paris, à un recensement des sites utilisables pour le chargement ou le déchargement de matériaux à proximité immédiate de la cathédrale, sans perturber la navigation.
Grand Bras et bras de la Monnaie
« L’usage du fleuve permet, d’une part, l’évacuation des déblais et, d’autre part, l’approvisionnement de matériaux de construction sans perturbation pour l’environnement sensible de l’île de la Cité, indique Haropa-Ports de Paris. De nombreuses filières de la construction privilégient déjà l’usage de la voie d’eau à proximité directe des chantiers, du fait d’un réseau portuaire dense au cœur de la capitale. La filière bois s’organise elle aussi pour revenir à un usage du fleuve, notamment pour approvisionner des chantiers parisiens depuis la Normandie ».
Rappelons que le transport fluvial dans Paris est déjà massivement utilisé pour l’acheminement en centre-ville de sable et gravier, permettant l’approvisionnement des centrales à béton installées sur les berges de la Seine. Cette logistique fluviale urbaine, qui tend aussi à se développer pour l’évacuation des déblais de chantier, permet d’éviter les nuisances que créerait la circulation d’un grand nombre de camion.
La logistique fluviale est à l’œuvre pour l’évacuation des déblais extraits par les tunneliers des chantiers du Grand Paris Express. Elle est utilisée pour d’importants chantiers de bâtiments proches de la Seine : la rénovation de la Samaritaine, par exemple, en cours depuis 2015, produit 110 000 t de déblais et déchets, dont un tiers environ est chargé sur bateau au port de Bercy.
Des techniques innovantes et un retour aux sources
Pour le chantier de Notre-Dame, c’est un site de chargement plus proche qui pourrait être choisi, puisque Haropa-Ports de Paris propose que les bateaux s’amarrent dans le bras de la Monnaie, au pied de la cathédrale. « L’usage de la Seine pour ce chantier permettra non seulement de réduire drastiquement les nuisances, mais aussi de rendre visible l’avancée de ce chantier exceptionnel, pour tous les Parisiens et touristes qui fréquentent les quais de Seine, met en avant Haropa-Ports de Paris. Des techniques innovantes de chargement-déchargement et de transport des matériaux, du parvis jusque dans les barges, pourraient compléter le dispositif fluvial : téléphérique, stockage à même les barges, portiques en quai haut, tapis avitailleurs, etc. Certaines ont déjà été expérimentées à l’occasion de chantiers dans Paris et le long de l’axe Seine ».
Une logistique fluviale pour le chantier de reconstruction de Notre-Dame serait un retour aux sources, souligne le président de la Communauté portuaire de Paris, Olivier Jamey : « Si l’on dispose de peu d’illustrations d’époque, on sait que la Seine a joué un rôle essentiel pour acheminer les matériaux ayant servi à la construction de Notre-Dame. L’histoire est en passe de se renouveler, le fleuve y est prêt ».