« Un manque de volonté politique et de moyens pour le fluvial »

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Pour Pascal Viret, président de l’Association Saône-Rhin Europe, la concertation sur le « devenir » du canal du Rhône à Sète et le bilan rédigé par le préfet montrent, une fois de plus, le manque de volonté politique et de moyens pour entretenir, régénérer et moderniser le réseau national des voies navigables et engager un réel report modal vers le fluvial. L’association Saône-Rhin Europe a participé à la concertation sur le « devenir » du canal du Rhône à Sète qui s’est déroulée de mi-octobre à fin novembre 2020 et dont un bilan a été publié en février 2021 par le préfet en charge du dossier. Dans une participation à cette concertation, cette association a indiqué « porter son choix sur le scénario n°1 » soit le passage du canal du Rhône à Sète au gabarit 2 500 t (voir encadré). Pour Pascal Viret, président de cette association, le bilan de la concertation rédigé par le préfet en charge du dossier et le choix de la mise en avant du scénario de 1 500 à 1 800 tonnes ne sont pas acceptables : « L’administration et l’Etat ont, dès la réunion de lancement de la concertation, orienté les débats comme lors de nombreuses autres études ou consultations ».

Pour lui, les scénarios 1 et 5 ont été écartés et « il y a eu une forte pression des services de l’Etat » pour orienter les choix des participants vers les autres scénarios et donc vers une solution qui n’est pas satisfaisante ni pour le développement du fluvial ni pour le report modal : le 2 (entre 1 800 et 1 500 t), le 3 (entre 1 500 et 1 000 t) et le 4 (entre 1 000 et 650 t). « Il faut lire l’ensemble des documents. Dans le compte-rendu des échanges en ateliers, le préfet reconnaît explicitement avoir éliminé d’office le scénario 1 (2 500 t) ».

« Orienter les échanges avant la concertation est un procédé que nous avons vu trop souvent et qui démontre le manque de volonté politique et l’existence d’un double discours : on affiche une volonté de développer les modes alternatifs mais dans les faits, ce n’est pas le cas ».

Pour Pascal Viret, il y a l’affichage d’une politique de report modal dans les intentions mais pas dans les décisions depuis de trop nombreuses années et cela concerne aussi le manque d’investissements dans l’entretien, la régénération et la modernisation du réseau national des voies navigables en France.

« On oppose encore les usages »

Pour l’association Saône-Rhin Europe, « le gabarit de 1 800 t pose problème : l’utilisation de  bateaux de 110 mx11,40 m (norme la plus courante sur Rhône-Saône) n’est pas rentable (car chargés à seulement 70 %), tandis que ceux de 110 mx9,50 m sont plutôt rares sur le bassin, ce qui pose un problème de disponibilité de la cale et réduit l’offre fluviale ».

Concernant la nécessité mise en avant dans le bilan de la concertation de développer les activités touristiques fluviales, l’association relève : « Curieusement, la problématique des bateaux de croisières fluviaux est abandonnée (en raison du rejet du scénario 1, le seul permettant l’accès de ces derniers au canal ?) ; amener jusqu’à 200 personnes par bateau dans une ville constitue pourtant un avantage certain pour l’activité touristique d’une région ».

Pour Pascal Viret, sur le canal du Rhône à Sète comme sur l’ensemble du réseau, « On oppose une fois de plus les usages de voie d’eau, on ne prend pas en compte sa polyvalence. Il y a des conflits d’usage mais quand les usagers se retrouvent en situation d’échanger, des solutions sont trouvées. Tout le monde et tous les usages peuvent cohabiter sur la voie d’eau ».

L’association note encore : « Si les enjeux de développement du trafic fluvial pour le canal et le port de Sète sont pris en considération, les objectifs manquent singulièrement d’ambition, à commencer par celui des tonnages annuels, ramené de 1 Mt à 500 000 t (l’étude socio-économique retenait 1,3 Mt pour le gabarit 2 500 t) ».

En conclusion, pour Pascal Viret : « Cette concertation pour le devenir du canal du Rhône à Sète aura, au moins, eu l’avantage de révéler à nouveau les conséquences d’un manque chronique de moyens financiers pour entretenir, régénérer et moderniser  le réseau national des voies navigables ».

Il ajoute : « Le volet fluvial du plan de relance 2021-2022 (176 M€) constitue aujourd’hui une véritable opportunité pour engager, dès à présent, une politique fluviale volontariste. Il faut poursuivre ce budget supplémentaire au-delà des deux ans du plan de relance dans la suite des préconisations du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures. Il faut des financements à la hauteur pour le fluvial, pour mettre en place un report modal ambitieux où ce mode a logiquement toute sa place. Cela doit s’accomplir au niveau national pas seulement au plan régional ou local ».

Les raisons du choix du gabarit à 2 500 t pour Saône-Rhin Europe

Dans une participation à la concertation sur le devenir du canal du Rhône à Sète, l’association Saône-Rhin Europe a indiqué « porter son choix sur le scénario n°1 (gabarit 2 500 t) pour les motifs suivants :

  • Performances des expéditions et report modal route-fleuve : gabarit moderne et très massifié, le plus compétitif, cohérent avec celui de Rhône-Saône. Le scénario 2 (1 800t) diminuerait de 700 t la capacité de chargement (-28 %), augmentant le coût d’acheminement et réduisant le report modal.
  • Rend possible le croisement des bateaux,
  • Trafics prévisionnels au-delà de 10 ans élevés,
  • Solution qui en optimisant la compétitivité du transport fluvial facilite au mieux le report modal et amplifie ses avantages : desserte massifiée du port maritime de Sète, impact environnemental réduit (gaz à effet de serre, pollution atmosphérique, bruit), sécurité des transports, diminution des accidents de circulation par réduction du trafic routier et desserte en cœur de ville sans nuisances,
  • Environnement : émissions les plus réduites de gaz à effet de serre et polluants par t/km transportée (4 fois moins qu’un poids lourd signifie une optimisation environnementale du transport fluvial),
  • Option permettant de développer le tourisme fluvial (accessibilité du canal aux paquebots fluviaux) et compatible avec toutes les autres activités fluviales ou fluvestres : plaisance, sports (création possible d’un chemin à vélo en haut de la zone humide tampon des étangs) et loisirs,
  • Ecart acceptable des coûts de mise à gabarit 1 800 t par rapport à 2500 t (115 M€) au regard de la durée de vie  d’un canal (un siècle au minimum) ».

Pour l’association, « le scénario n°2 manque d’ambition pour le fret fluvial et le devenir du canal du Rhône à Sète, tandis que les 3, 4 et 5 correspondent à une régression et obèrent même l’avenir du canal ».

Dans sa contribution à la concertation, l’association précise également : « Le dossier du devenir du canal du Rhône à Sète et son aménagement met en relief les difficultés rencontrées par des collectivités territoriales -même très impliquées comme le conseil régional d’Occitanie-  pour financer et mener à bien dans les délais les travaux d’un pareil  projet fluvial. Pour VNF, Il soulève aussi le manque chronique de financements subi depuis des décennies par l’établissement pour assurer l’entretien régulier des infrastructures fluviales,  situation conduisant à leur inexorable dégradation et à la nécessité de reconstructions forcément coûteuses ».

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