« Les avancées en matière de financement se trouvent aussi du côté de l’Union européenne à travers la mise en œuvre « d’un acte d’exécution », ou implementing act en anglais », a annoncé Pierre-Yves Biet, directeur partenariats territoires Europe à la société du canal Seine-Nord Europe. Avec cet acte d’exécution, l’Union européenne souhaite conforter sur la durée le financement de Seine-Escaut au-delà des périodes de 7 ans habituels. Avec cet acte, il s’agit de financer les travaux de la liaison fluviale européenne Seine-Escaut, et de son maillon français le canal Seine-Nord Europe, sur plusieurs tranches du mécanisme pour l'interconnexion en Europe (MIE), ou Connecting Europe Facility (CEF) en anglais, et à hauteur de 50 % du coût du projet. La ministre des Transport Elisabeth Borne a fait part de l’accord de la France à la signature de cet acte, les autres Etats membres devraient suivre. Cet acte pourrait être signé début juillet 2019.
Article 36 de la loi d’orientation des mobilités
Carole Bureau-Bonnard a indiqué que l’article 36 du projet de loi d’orientation des mobilités (Lom) portant sur la régionalisation de la société du canal Seine-Nord Europe avait bien été adopté et ne sera pas remis en cause. Il va seulement falloir attendre l’adoption définitive de la Lom, « sans doute en fin d’année », pour que la mesure se concrétise. Initialement envisagé, le recours à une ordonnance pour cette régionalisation a été abandonné afin que celle-ci puisse être effective au 1er janvier 2020, sans nécessiter un passage devant le Conseil d’Etat.
Dans le cadre de la Lom, un sous-amendement a aussi été adopté avec l’accord du gouvernement et qui autorise la société du canal Seine-Nord Europe à acquérir directement du foncier « intéressant pour développer des activités autour du canal », par exemple, en vue de la réalisation de plates-formes multimodales. La société du canal Seine-Nord Europe doit toutefois obtenir l’accord des collectivités pour réaliser les acquisitions de foncier qu’elle souhaite faire directement. « Cette nouvelle capacité doit être désormais débattue avec les collectivités territoriales afin de déterminer son champ d’application, notamment pour les plates-formes dont le positionnement géographique a évolué depuis la déclaration d’utilité publique », a précisé Pierre-Yves Biet.
La société du canal au travail avec les collectivités
« Nous sommes dans une phase de structuration de la société du canal Seine-Nord Europe, a poursuivi Pierre-Yves Biet, qui a lui-même rejoint l’équipe en début d’année 2019. Il y a actuellement 26 personnes dans les locaux à Compiègne où est installée la société depuis début juillet 2018. Nous serons 40 fin 2019 et entre 75 et 100 d’ici 2 à 3 ans ».
Pour la société du canal, parmi les événements récents, il y a le dépôt du dossier d’autorisation environnementale le 15 avril 2019 pour les 18 km du secteur 1 de Compiègne à Passel. Ce dépôt ouvre une période d’instruction de 16 mois, mène à une enquête publique entre le printemps et la fin d’été 2020 et ouvre la voie à des travaux en 2021 pour le secteur 1. Pour les secteurs 2,3 et 4, les études d’avant-projet et la désignation de la maîtrise d’œuvre suivent leur cours. La société poursuit aussi les acquisitions foncières dans le cadre du dialogue à l’amiable.
Un autre axe de travail de la société du canal en lien avec les collectivités territoriales porte sur les plates-formes multimodales qui seront adossées au futur canal. Il s’agit d’affiner les projets de plate-forme qui sont d’initiative locale. Toutefois, selon l’ordonnance du 21 avril 2016 relative à la société du canal, celle-ci « a également pour mission de favoriser le développement économique en lien avec cette infrastructure. (…) apporter un appui technique aux collectivités territoriales ou aux aménageurs pour la réalisation d’opérations directement liées à l’infrastructure du canal et accompagner le développement économique des places portuaires situées le long de l’infrastructure fluviale ». Le protocole de financement de mars 2017 précisant que la maîtrise d’ouvrage de la société « comprend les terrassements et murs de quai des plates-formes ».
Les collectivités territoriales travaillent aussi avec la société dans le cadre de la « démarche Grand Chantier » pour anticiper les préparatifs du chantier et l’accueil des travailleurs (voir aussi notre article). Il s’agit d’anticiper et de coordonner les contributions des territoires dans cette perspective, sur les thématiques suivantes : emploi, formation, insertion, développement économique et développement territorial. L’Etat participe à la démarche Grand Chantier. L’emploi constitue tout l’enjeu de cette démarche et nécessite d’abord la réalisation d’un vaste recensement des besoins en termes de compétences mobilisables, de formations pour rendre les emplois accessibles. Cela nécessite aussi de se pencher sur les mobilités possibles pour les futurs travailleurs sur le chantier, leur hébergement, etc.
La société du canal travaille aux mesures compensatoires, par exemple à Ribécourt avec une parcelle écologique réalisée en partenariat avec le lycée horticole de cette commune et inaugurée en mai 2019. La création de deux mares, les plantations de boisements et d’une haie de cours d’eau, la construction d’un cheminement piéton et d’un ponton d’observation… Les aménagements réalisés à Ribécourt visent à constituer une référence pour les travaux environnementaux qui seront menés dans le cadre du projet de canal Seine-Nord Europe. Il s’agit de la deuxième réalisation financée par la société du canal après l’aménagement de 6 hectares sur la commune de Bienville où 3 800 arbres ont été plantés fin 2017.
La parole aux acteurs économiques
Après ce large point sur les avancées du projet de canal, la parole a été donnée à des opérateurs économiques. Ils ont rappelé tout l’intérêt de ce futur canal pour sa capacité de massification des échanges et de réduction des coûts de transport.
Robert Morand, directeur industriel de la coopérative Agora, a souligné la forte diminution de l’empreinte carbone des expéditions de céréales que le canal permettrait.
Cédric Fouquier, directeur transport EMEA de Kohler/Jacob Delafon, a relevé les capacités de massification du transport de conteneurs vers les ports maritimes d’exportation à partir du centre de distribution de Passel, près de Noyon.
Franck Grimonprez, président de Log’s et du Gerif, a rappelé que de nombreux chargeurs comptaient s’appuyer sur ce futur canal pour massifier leur transport et être davantage éco-responsable.
L’assemblée générale s’est conclue par la reconduction de Philippe Marini, maire de Compiègne, à la présidence de l’association, de Jean-François Dalaise, membre du Ceser et administrateur de Haropa-Ports de Paris, comme vice-président/secrétaire général. Laurent Degroote, président du Ceser Hauts-de-France, et Frédéric Chereau sont également vice-président.
Le budget 2018 a été validé et celui prévisionnel pour 2019 adopté en intégrant les contributions de 4 nouveaux membres : les conseils départementaux des Hauts-de-Seine et du Val d’Oise et les villes de Saint-Quentin et de Saint-Leu d’Esserent.