L’élargissement du pont des Trous, situé sur l’Escaut à Tournai, essentiel à la continuité de la liaison européenne Seine-Escaut, a constitué l’un des chantiers fluviaux le plus en vue de Wallonie. Les travaux entamés en 2019 viennent de s’achever. L’occasion de rappeler que ce pont n’est pas le seul élément de mise à grand gabarit de la traversée de la ville.
Parmi les éléments essentiels à la mise à grand gabarit de la liaison européenne Seine-Escaut, c’est le canal Seine-Nord qui constitue sans conteste le chantier le plus important. Mais, côté belge, c’est aussi vers Tournai que les regards se sont portés, avec un projet qui fut très contesté : l’élargissement du pont des Trous, afin de porter le gabarit de l’Escaut de la classe IV à la classe Va.
Des travaux depuis 2019
Le début des travaux, en 2019, avait été précédé de plusieurs recours déposés par les défenseurs du patrimoine. Le pont des Trous a en effet été construit au XIIIe siècle. Cette porte d’eau, faisant partie des fortifications de la ville médiévale, assurait le contrôle de l’accès à Tournai par l’Escaut. Mais ses arches de style gothique, pourtant surélevées lors de leur reconstruction après la seconde guerre mondiale, ne permettaient pas le passage des bateaux dans de bonnes conditions. Pour assurer la navigation des bateaux de 11,4 m, il fallait les élargir.
« Le pont des Trous n’est qu’un des éléments de la mise à grand gabarit de la traversée de Tournai, précise Pascal Moens, directeur du transport des marchandises au Service public de Wallonie. Il a aussi fallu élargir le Pont-à-Pont, ce qui a été fait précédemment. Nous avons donc pu ouvrir la navigation à 110 m par 11,4 m dès 2020, puisque le pont des Trous avait été déconstruit ». La hauteur libre, en revanche, était jusqu’à présent limitée par la structure provisoire du chantier de pont des Trous.
Amélioration de l'enfoncement
Le passage au grand gabarit de l'Escaut s’est aussi traduit par une amélioration de l’enfoncement, porté de 2,6 m à 2,9 m :
- Cela a concerné tout l’itinéraire de l’Escaut, mais surtout les deux écluses de Kain et Hérinnes, en aval de Tournai, dont les seuils ont été rabotés.
- Il a aussi fallu reconstruire leurs barrages afin de sécuriser la navigation.
- Des travaux restent à mener sur la partie flamande de l’Escaut pour porter l’enfoncement à 2,9 m.
« Tout le monde se focalise sur le pont des Trous, car c’était la dernière pièce à mettre en place, mais le gabarit de la traversée de Tournai a été amélioré sous tous ses aspects », résume Pascal Moens.
Vers un doublement des écluses
En Wallonie, où le fleuve connaît déjà un trafic annuel supérieur à 7 Mt, les écluses sont proches de la saturation. Avec l’augmentation de trafic attendue avec la mise en service de la liaison Seine-Escaut en 2030, le doublement des écluses est à prévoir pour faire face à un nombre accru de bateau et sécuriser l’itinéraire en assurant la continuité de l’exploitation en cas de panne ou de travaux.
Les études ne sont pas encore lancées, mais ce doublement des écluses devrait cependant se réaliser à l’horizon 2030, selon Pascal Moens : « C’est le dernier grand chantier prévu en Wallonie dans le cadre de Seine-Escaut. Le financement de ces travaux n’est pas encore prévu, mais il devrait l’être dans le cadre d’un troisième Mécanisme pour l’interconnexion en Europe. Depuis 2005, l’Union a apporté un soutien majeur, constant et très volontaire à Seine-Escaut ; le financement des écluses devrait donc pouvoir être obtenu ».
Sans oublier la Lys et le canal Condé-Pommeroeul
Outre l’Escaut via Tournai, la liaison Seine-Escaut comporte aussi un second itinéraire : celui par la Lys, pour lequel la Wallonie a achevé depuis l’été 2022 les travaux qui lui incombaient. Là encore, c’est le programme Seine-Escaut qui a permis de résoudre un goulet d’étranglement du transport fluvial ainsi qu’un casse-tête transfrontalier.
La Lys constitue en effet la frontière entre la France d’une part et, d’autre part, la région wallonne puis la région flamande. L’accord franco-belge de 1985 n’avait jamais pu être mis en œuvre du fait de la régionalisation intervenue en Belgique. « C’est l’implication dans le projet Seine-Escaut qui a permis de débloquer la situation et de faire avancer les travaux, malgré les frontières, sur la Lys où les conditions de navigation et d’environnement sont sensibles », précise Pascal Moens.
Autre dossier transfrontalier réglé dans le sillage de Seine-Escaut : le canal Condé-Pommerœul. Les travaux nécessaires à la remise en navigation de canal, fermé depuis 1992 pour cause d’envasement, ont débuté en 2018. Ils sont presque achevés.
- Côté wallon, on finalise les portes d’écluses.
- Côté français, on en est aux derniers dragages.
- La réouverture du canal est prévue pour septembre 2023.
« Là aussi, c’est un objectif qui paraissait insurmontable et qui a été rendu possible par Seine-Escaut, souligne Pascal Moens. Sur la Lys, sur la traversée de Tournai ou sur Pommerœul-Condé, l’Union européenne a eu un rôle majeur, apportant des financements importants et redonnant ses lettres de noblesse à la voie d’eau ».