« Les basses eaux de 2018 sur le Rhin ont été un avertissement » pour toutes les parties prenantes concernées : profession fluviale, chargeurs, industriels, ports, institutions comme la Commission centrale pour la navigation du Rhin (CCNR).
En novembre 2019, celle-ci a organisé un atelier consacré à cette thématique, le précédent avait eu lieu 10 ans plus tôt. Une publication nommée « Act Now » a été publiée en 2020 pour mettre par écrit les échanges. Une mise à jour de ce document a été réalisée en 2021 à la suite d’une nouvelle réunion. Une troisième version vient d’être diffusée pour prendre en compte les informations issues d’un atelier début 2023.
Un mix de solutions. La principale conclusion tirée de l’atelier de 2019 demeure valide : « il n’y a pas de solution universelle » mais plusieurs : adaptation des bateaux, des infrastructures, de la logistique et du stockage (concernent les chargeurs), déploiement d’outils numériques. Sans oublier l’instauration d’un dialogue régulier entre toutes les parties prenantes… C’est le rôle d’Act Now et des ateliers de la CCNR.
Vulnérabilité. Le document rappelle les conséquences des étiages « extrêmes » : « il devient difficile d’assurer la continuité du transport par les voies navigables (…) Bien que les épisodes de basses eaux ne soient pas nouveaux et ne constituent pas, en tant que tels, un phénomène exceptionnel, la vulnérabilité du transport fluvial a augmenté (…) Des conditions météorologiques extrêmes peuvent limiter l'efficacité de la navigation intérieure à court terme, tandis qu'à long terme, elles pourraient influer sur les choix modaux des chargeurs ».
Les mots sont lâchés : la crainte du « report modal inversé » plane ou plus simplement « une réticence » de certains chargeurs à avoir recours au transport fluvial.
Il s’ajoute deux faits : une augmentation de la taille et du tirant d’eau des bateaux qui ne peuvent plus naviguer en dessous d’un certain seuil, le principe du « juste à temps » de la logistique d’aujourd’hui qui a du mal à être concilié avec des retards. Il s’ajoute encore les ambitions affichées de report modal et de réduction des émissions dans le contexte du défi climatique dans lesquelles la navigation intérieure à un rôle à jouer.
Les avancées depuis 2019
Parmi les actions qui ont avancé depuis le premier atelier de 2019 :
- Les outils numériques permettant des prévisions améliorées du niveau d’eau du Rhin sur de plus longues périodes qu’auparavant. « L’administration allemande met ainsi à disposition des prévisions à 4 et 14 jours, pour certaines échelles rhénanes pertinentes pour la navigation. Ces prévisions pouvant aller jusqu'à 6 semaines pour certaines d’entre elles ».
- L’adaptation des bateaux : au-delà des programmes de recherche, « les investissements dans la construction de nouvelles unités capables de naviguer dans des conditions de basses eaux ont augmenté » (BASF, voir article de NPI). Thyssenkrupp étudie « les options pour réduire le tirant d’eau de ses convois ». « Le défi consiste à développer des bateaux innovants, capables de naviguer pendant les basses eaux mais dont l'utilisation reste viable sur le plan économique, y compris dans des conditions d'hydraulicité différentes », enfonce le document.
- Les mesures du côté des chargeurs et de la logistique en général : ce sont par exemple « des contrats d’affrétement sur des durées longues avec des opérateurs disposant de barges peuvent encore naviguer lorsque les niveaux d’eau sont bas, une optimisation de la manutention, une capacité de stockage supplémentaire, des processus de communication, l’ajout de barges à un convoi poussé pendant les basses eaux pour pouvoir transporter des volumes équivalents répartis sur un nombre supérieurs de barge, un report à court terme sur d’autres modes ». Il s’agit plutôt d’une alternative ferroviaire.
Il y a basses eaux et… basses eaux
Après 2018, il se trouve que l’année 2022 a elle aussi connu un épisode de basses eaux sévères. De nouveau, la CCNR rappelle dans ce document « Act Now » que chaque phénomène d’étiage présente ses spécificités propres.
Le document souligne qu’il faut raison garder en quelque sorte :
- « Les basses eaux ne sont pas de loin le seul facteur influant sur le transport fluvial. Elles s’ajoutent à d’autres facteurs comme la situation globale du développement macroéconomique ».
- Il faut veiller à ne pas transposer les conséquences d’un épisode de basses eaux sur une voie d’eau à une autre.
- Mais « les faibles niveaux d’eau d’une voie d’eau donnée peuvent avoir des répercussions sur d’autre fleuves et canaux. Tel a été le cas de la Flandre en 2018 dont les voies d’eau ont beaucoup souffert des épisodes de basses eaux sur le Rhin ».