Le géant allemand de la chimie, BASF, a souffert en 2018 de la brutale décrue du Rhin. Cette année-là, le niveau du fleuve, inhabituellement bas, avait lourdement perturbé l’approvisionnement du groupe, brisant même la chaîne logistique. BASF chiffre ses pertes liées aux basses eaux du Rhin à 100 millions d’euros en 2018.
Les années se suivent mais ne se ressemblent pas. « En 2020, nous avons comme en 2019 échappé au pire », se félicite le responsable de la logistique Ralf Busche, qui avoue tout de même « avoir perdu sa confiance » dans le Rhin, lors d’un symposium consacré à la question. BASF, qui s’attend à de nouvelles périodes de sécheresse et de basses eaux à l’avenir, a développé un plan de crise pour ne pas revivre la catastrophe de 2018.
Le Rhin, artère vitale
55 % des approvisionnements du groupe sur le site de Ludwigshafen sont assurés par le Rhin, un dizième est acheminé par la route, un cinquième par le rail et 15 % par canalisations. « Pour nous, le Rhin est une artère vitale, souligne le chef logisticien. Sans le Rhin, le site de Ludwigshafen n’est pas rentable. Et la rentabilité est plus importante que jamais en cette période de crise sanitaire ». Le Rhin est d’autant plus vital pour BASF que l’entreprise mise sur le fleuve pour réaliser les objectifs de neutralité climatique qu’elle s’est fixée à l’horizon 2030.
Des bateaux adaptés
Afin qu’une crise d’approvisionnement comme celle de 2018 ne se reproduise plus, BASF a élaboré un plan de crise.
Le premier point de ce plan met l’accent sur la nécessité de mieux prévoir les variations du niveau de l’eau sur le fleuve sur le long terme. BASF a développé, à cet effet, avec différents partenaires un modèle de prévision à six semaines d’avance. « Des prévisions à quelques jours comme celles livrées par ELWIS ne suffisent pas », précise Ralf Busche. Six semaines est le bon délai, selon l’entreprise, pour prévoir des solutions de rechange en cas de décrue brutale : augmentation des stocks de matières premières, location de capacités fluviales supplémentaires tant que le transport est possible… « La route n’est, pour nous, pas une alternative pour l’approvisionnement en matière première », rappelle Ralf Busche.
Deuxième point du plan de crise, BASF a développé un nouveau concept de citernes pour le rail, les « BASF Tankcontainers BTC ». 1 000 de ces conteneurs spéciaux, capables de transporter également des biens inflammables, sont désormais en circulation. Surtout, BASF mise sur de meilleurs contrats avec les armateurs, prévoyant davantage de cale, de plus gros contenants et, surtout, des bateaux moins exigeants en termes de niveau d’eau. « Un problème reste le manque de volonté d’innovation de certains bateliers pour investir dans des bateaux capables de naviguer même lorsque le niveau d’eau est extrêmement faible », regrette le chef logisticien du chimiste allemand qui déplore également le manque d’investissement public dans les voies fluviales.
Le site BASF de Ludwigshafen, l’un des plus grands au monde de ce type, compte 230 km de voies ferrées, 106 km de routes et 2 850 km de canalisations. Il compte son propre port, déchargeant 6,5 millions de tonnes par an pour l’approvisionnement et chargeant 8,1 millions de tonnes de marchandises. Chaque jour, 15 bateaux, 400 wagons et 2 500 poids lourds desservent le site de Ludwigshafen du groupe.