En 2020, 8,2 millions de tonnes (en repli de -3,1 % par rapport à 2019) et 7,5 milliards de tkm ont été transportés sur le Danube qui relie 10 pays européens le long de 2850 km. La majorité de ce total est composée de marchandises vracs ou générales. « Avec un peu de chance, vous apercevrez des conteneurs mais il s’agira de boîtes vides », a indiqué Lisa-Maria Putz, professeur à l’université des sciences appliquées de Haute-Autriche (FH Oberösterreich) lors de la réunion de Platina 3, plate-forme de mise en œuvre de Naiades 3, les 10 et 11 février 2022.
Dans un contexte de déclin « prévisible » des vracs, le transport de conteneurs (pleins) sur ce fleuve peut constituer un axe de développement important et une réponse à l’objectif de réduction de 90 % des émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports fixé dans le « Pacte vert » (Green Deal) européen, a continué Lisa-Maria Putz. Il s’ajoute « une conscience environnementale de plus en plus élevée qui pousse les entreprises à recourir à des modes de transport plus durables ».
Elle a indiqué que le Danube est actuellement une voie navigable sous-utilisée par rapport à ses capacités, ce qui permet d’accueillir le nouveau marché des conteneurs sans difficulté.
Depuis 2005, trois tentatives ont été faites pour mettre en place un service conteneurisé fluvial de conteneurs sur le Danube mais n’ont pas réussi (voir encadré).
Ces échecs répétés ne rebutent pas 7 partenaires qui travaillent à un nouvel essai (ou projet-pilote) annoncé pour mai 2022 par Nothegger Transport Logistik, TTS Groupe et FH Oberösterreich pour « sensibiliser à la faisabilité du transport de conteneurs sur le Danube ».
Avant de programmer ce test grandeur nature, les 7 partenaires (les 3 cités précédemment auxquels s’ajoutent Kanzlei Anzböck, Austrian Institute Technology, Skillz et Navrom Shipyard) ont mené plusieurs travaux d’analyses.
« Nous avons d’abord cherché à identifier les ports et le long du Danube pouvant accueillir des conteneurs 45 pieds, les manutentionner. Quatre ports sont adaptés : Enns, Vienne, Ruse et Giurgiu », a précisé Lisa-Maria Putz.
Deux couches de conteneurs possibles
Un autre axe de travail a porté sur l’élaboration de barges adaptées au transport de conteneurs et aux conditions de navigation du Danube. « Le changement climatique nécessite de nouvelles solutions pour faire face aux fluctuations des niveaux d'eau du fleuve ». Le Danube, comme le Rhin, est concerné par des périodes de basses eaux.
Une vaste collecte de données le long du corridor Rhin-Main-Danube a été conduite sur les écluses, les ponts, les ports, les spécification des voies navigables sur lesquelles les barges vont naviguer.
Ce sont 8 modèles de barges qui ont été établis, correspondant à autant de modèles économiques et de designs différents avec une constante : l’emport de deux couches de conteneurs.
Le test prévu en mai 2022 concerne le transport de conteneurs 45 pieds pour un flux marquant aussi un report modal de la route vers le fleuve entre l’Autriche et la Roumanie.
Le Projet Interreg « Dionysus »
Lors de la réunion de Platina 3 les 10 et 11 février 2022, Vladislav Maras, de l’université de Belgrade, a présenté le projet Interreg « Dionysus » qui étudie lui aussi le transport fluvial de conteneurs sur le Danube afin de définir les opportunités et les freins pour son implantation.
Concernant les trois tentatives réalisées au milieu des années 2000, « les services n’ont pas prouvé leur pertinence économique ». Ils ont concerné les liaisons Giurgiu-Constantza, Belgrade-Constantza, Budapest-Belgrade-Constantza.
Selon ce chercheur, les études menées dans le cadre du projet « Dionysus » montrent qu’il existe des conditions favorables au transport fluvial de conteneurs sur le Danube qui relie des régions industrielles et des capitales importantes dans cette partie de l’Europe. Des conteneurs arrivent au port maritime de Constantza sur la mer Noire et pourraient emprunter le Danube. Autre point positif : des ports existent et seraient susceptibles d’accueillir et de traiter des conteneurs comme Budapest, Bratislava, Vienne, etc.
Mais les freins sont nombreux : le transit time fluvial entre Constantza et Budapest voire Kopper est de 11 jours (à comparer à 1 ou 2 jours par la voie terrestre), les basses eaux, les obstacles administratifs et politiques avec un grand nombre de pays successifs, le manque de connaissance sur les opportunités du fluvial, la concurrence féroce de la route au départ de Constantza.