« D’après les premiers retours que j’ai eus, la saison touristique 2022 a été plutôt meilleure que l’an dernier », affirme Antoine Vallée, adjoint à la cheffe de la Loire aval chez Voies navigables de France (VNF). L’ensemble des données de fréquentation n’a cependant pas encore été transmis, la saison touristique n’étant pas encore tout à fait terminée.
Sur le périmètre géré par VNF, qui va de Bouchemaine (Maine-et-Loire), confluent avec la Maine, jusqu’à Nantes où commence la navigation maritime dans l’estuaire, naviguent une vingtaine de bateaux-promenades ainsi qu’un paquebot fluvial, le Loire Princesse de CroisiEurope. Avec ses 80 cm de tirant d’eau et sa propulsion à roues à aubes, ce bateau de 48 cabines est bien adapté à la navigation en Loire, où l’enfoncement est réduit faute de barrages de navigation.
Le Loire Princesse remonte habituellement de Saint-Nazaire jusqu’à Chalonnes-sur-Loire, voire Bouchemaine quand les conditions s’y prêtent. Quand le débit du fleuve est inférieur à 250 m³/s, ce qui arrive quasiment chaque été, il ne remonte avec la marée que jusqu’à Ancenis, à 35 km en amont de Nantes, où l’on constate encore 1 m de marnage à l’étiage.
Des interruptions de navigation limitées
En deux endroits, la navigation a dû être interrompue par manque d’eau sur arrêté préfectoral, du 11 août au 22 septembre : à l’aval du pont de Saint-Florent-le-Vieil, et en amont de Chalonnes. Le 26 août, la navigation a été rouverte aux activités nautiques non motorisées, sur demande des loueurs de kayaks.
Enfin, sur cette zone gérée par VNF, un opérateur a dû arrêter de naviguer cet été : l’association Les Chalandoux du 5e vent, qui exploite un gabarot (bateau traditionnel de Loire) affichant 80 cm de tirant d’eau. Basé à Chalonnes, en amont de la zone marnante, il ne bénéficie pas de la marée pour gonfler l’enfoncement. « Je n’ai pas eu d’autre retour d’opérateurs sur des arrêts de navigation, car les bateaux à fond plat utilisés sont adaptés aux conditions de navigation en Loire », ajoute Antoine Vallée.
À Montjean sur Loire, le Ligériade, bateau embarquant 80 passagers, a connu une meilleure saison que l’an dernier, sans cependant revenir à une fréquentation aussi importante qu’au cours des années pré-Covid, notamment pour les groupes.
« Savoir jouer de la marche arrière »
Plus en amont, la Loire n’est pas sous autorité de VNF mais administrée par l’État via les préfectures. À Saumur, Bernard Henri, qui exploite le bateau-promenade Saumur Loire, d’une capacité de 64 passagers, fait état d’un « étiage à un niveau habituel dans la région, sans conséquence pour la navigation. Notre bateau affiche 35 cm de tirant d’eau, et, ici, il y a toujours environ 50 cm d’eau. Avec un équipage courageux, ça passe. Quand on s’échoue, il faut savoir jouer de la marche arrière ». Avec 14 000 passagers en août 2022, l’activité a augmenté d’un tiers par rapport à 2021, qui était déjà une bonne année, et de plus de moitié par rapport aux 9 000 passagers enregistrés en août 2019. La saison s’avère donc « excellente » selon Bernard Henri : « On a vu revenir les étrangers, surtout les Anglais qui constituent une clientèle habituelle mais aussi, et c’est nouveau, de nombreux Espagnols ».
À Blois, la navigation a bien failli s’arrêter la troisième semaine d’août, en pleine saison estivale, quand le débit de la Loire est tombé sous les 50 m³/s. La décision a en effet été prise de ne plus soutenir l’étiage, préservant l’eau des barrages-réservoirs situés plus en amont pour assurer l’approvisionnement en eau potable et les refroidissements des centrales nucléaires, même en cas d’automne sec. « Avec la présence d’îles, de bancs de sable et un ancien barrage, le bassin de navigation est particulièrement compliqué à l’état d’étiage », souligne Alain Amiot, le directeur de l’Observatoire Loire, association d’éducation à l’environnement qui propose des sorties en Loire à bord de plusieurs bateaux traditionnels. Grâce à quelques pluies, l’activité a pu continuer, avec des bateaux dont le tirant d’eau s’échelonne de 17 à 35 cm. « Nous avons embarqué 3 000 passagers au cours de l’été, et 5 000 au total avec les groupes accueillis au printemps. Soit un retour, pour la première fois, au niveau d’activité de 2019 », résume Alain Amiot.
« VNF très à l’écoute »
Encore plus en amont, l’été a été compliqué pour la société « Les Bateaux touristiques », basée à Briare, qui exploite sur le canal du même nom deux bateaux-promenade de 12 et 90 places, ainsi qu’un bateau-restaurant de 12 places. Du 21 août au 12 septembre, par manque d’eau, la navigation a été interrompue sur les canaux ; les écluses sont restées fermées. « VNF a été très à l’écoute, et nous avons bénéficié d’une dérogation pour continuer à naviguer, sans possibilité cependant de franchir les écluses », indique Marjorie Morel, qui a repris avec sa sœur la société familiale depuis quelques mois. « À partir du 12 septembre, les écluses ont été rouvertes, mais avec des passages groupés obligatoires dont les horaires ne conviennent pas à l’itinéraire habituel de notre bateau-restaurant, que nous avons donc dû repositionner sur le canal latéral à la Loire, vers Châtillon, avec franchissement du pont-canal de Briare dans les deux sens ». Malgré ces désagréments, auxquels s’ajoute la baisse d’une cinquantaine de centimètres du niveau d’eau dans le canal qui a obligé à adapter les passerelles, la fréquentation a été très bonne, notamment grâce à la présence de touristes étrangers : avec 40 000 passagers, Les Bateaux touristiques retrouvent leur niveau d’activité de 2019.