Les enjeux du combiné fleuve-route

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De gauche à droite, Eloi Flipo, responsable développement de Voies navigables de France (VNF), Benoit Mugnier, directeur métier multimodal du groupe Sogestran, Gilles Dansart, journaliste animateur de la journée du transport combiné. 

La journée du transport combiné a abordé la partie fleuve-route de cette filière avec une table-ronde dédiée permettant d’en mettre en lumière les enjeux. L’occasion, par exemple, pour Benoit Mugnier, directeur métier multimodal du groupe Sogestran, d’évoquer la difficulté que crée le surcoût de la manutention fluviale au Havre et à Fos-Marseille.

La journée du transport combiné organisée par le groupement national des transports combinés (GNTC) est un rendez-vous habituel qui a eu lieu cette année le 26 octobre 2023 et permet d’abord de passer en revue les résultats de la filière désormais dotée d’un « observatoire ».

Celui-ci est le résultat d’une initiative des deux gestionnaires de réseau (SCNF Réseau et VNF), du GNTC, de l’Ademe, du ministère des Transports (DGITM), de l’ART.

Les chiffres. Après une année 2022 qui avait poursuivi la progression de 2021, aussi bien pour le transport combiné rail-route (TCRR) que pour le fleuve-route (TCFR), « le premier semestre 2023 est marqué par un coup de frein conjoncturel », a indiqué Ivan Stempezynski, président du GNTC, les mouvements sociaux contre la réforme des retraites ont affecté la circulation des trains et les volumes qu’il était possible d’acheminer ». La hausse du coût de l’électricité dans les coûts d’exploitation avec des répercussions sur les prix de vente se poursuit, la conjoncture économique morose (inflation, remontée des taux d’intérêt, situation géopolitique) sont deux autres facteurs qui entraînent les trafics à la baisse.

  • TCRR : au premier semestre 2023, les tonnes-kilomètres atteignent 10,23 milliards soit une contraction de -22% par rapport aux 13,9 milliards du premier semestre 2022 et sont en dessous également du niveau du premier semestre 2021 (et ses 11,3 milliards). Sur les 12 mois de 2022, le niveau a atteint 20,6 milliards (+9,4% comparativement aux 19,1 milliards de 2021) pour le transport combiné rail-route.
  • TCFR : au premier semestre 2023, ce sont 272 000 EVP transportés, en repli de -12% par rapport au 309 000 EVP de la même période de 2022. Ce niveau apparaît également inférieur aux 288 000 EVP du premier semestre 2021. Sur les 12 mois de 2022, 605 414 EVP ont été transportés en combiné fleuve-route (+3,9% par rapport aux 582 946 EVP de 2021).

L’analyse de la DGITM. Pour Thierry Coquil, directeur général de la DGTIM, le fret ferroviaire bénéficie des soutiens de l’Etat tandis que le réseau fluvial connaît un effort d’investissement pour sa régénération et sa modernisation de 3 milliards d’euros sur 10 ans (entre 2020 et 2030).

Il a indiqué : « Il faudrait avoir une stratégie de filière pour le fluvial sur le modèle de celle existante pour le fret ferroviaire, également coconstruite pour avancer de manière cohésive ». Il a cité la convention entre VNF et SNCF Réseau, « les échanges entre les deux modes sont essentiels ».

Il a fait part d’un optimisme mesuré : « Relancer les modes massifiés, on en parle depuis longtemps, le contexte général de la planification écologiques donne des raisons d’espérer, insuffle de nouvelles perspectives. La demande de transport va augmenter et il faut éviter de continuer le tout poids lourd. Le prix du TRM va augmenter comme celui des deux modes massifiés mais eux moins que le premier. Entre aussi en compte la robustesse et la fiabilité, la préservation du foncier en plus du défi de la réduction des émissions ».

Une table-ronde consacrée au transport combiné fleuve-route

La première table ronde de la journée a été consacrée à un rapide survol des enjeux du transport combiné fleuve-route, donnant la parole à Benoît Mugnier, directeur métier multimodal du groupe Sogestran, et à Eloi Flipo, responsable développement de Voies navigables de France (VNF).

Des résultats différents selon les bassins. Au-delà d’une baisse globale de -12%, les résultats du TCFR au premier semestre 2023 apparaissent variables selon les bassins, ont indiqué ces deux responsables.

La chute est particulièrement forte sur le Rhône où le mouvement de grève contre la réforme des retraites au moment de la période de chômage pour travaux a entraîné une interruption de la navigation des bateaux pendant un mois de mars à avril 2023. Le repli est aussi notable dans le Grand Est, avec par exemple une baisse à deux chiffres au port autonome de Strasbourg. La situation est plus dynamique sur la Seine.

La question de la manutention dans les ports maritimes. Pour des offres multimodales pertinentes, « il faut une manutention fiable dans les ports », selon Benoît Mugnier, relevant que ce n’était pas toujours le cas dans ceux maritimes. « Nous manquons de mesure de la fiabilité du service au fluvial dans les ports maritimes. Le seul retard que prend le fluvial, c’est à cause de la manutention dans les ports maritimes. Nous avons besoin que soient mises en place des escales fixes dans ces ports, c’est une demande toujours forte de la profession fluviale ».

C’est la fameuse « exception française » du surcoût de la manutention fluviale et toujours à l’œuvre dans les GPM du Havre et de Fos-Marseille alors qu’elle a disparu au GPM de Dunkerque. Elle affecte la compétitivité du fluvial à hauteur de 10% par rapport à la route.

« Il faut en parler tous ensemble pour trouver le point d’accord comme on a réussi à le faire à Dunkerque. Cette mesure permettrait de gagner en compétitivité », a plaidé Benoît Mugnier. Il a aussi alerté sur les conditions d’éligibilité « peu claires » des aides au transport combiné, le trop long délai de versement, le sujet autour de la distance qui perdure, une perte d’avantage sur la partie douanière du multimodal.

Eloi Flipo a insisté sur les investissements pour assurer la fiabilité du réseau fluvial, l’une des missions centrales de l’établissement. Il a indiqué que la manutention fluviale dans les ports maritimes ne relève pas de VNF. En plus des aides au transport combiné existantes, le plan d’aide au report modal (PARM) peut constituer un autre soutien tout comme le programme CEE ReMoVe.

La commission fluviale du GNTC. Parmi les annonces de cette journée, Benoit Mugnier a été désigné président de la commission fluviale du GNTC avec Eloi Flippo en tant que vice-président.

L’objectif de cette commission est de relayer les enjeux communs entre le TCRR et le TCFR et de développer ceux plus spécifiques au fret fluvial : actions de développement du report modal, accompagnement du plan de relance du Rhône, suivi de la mise en place de la « chatière » au Havre, suivi du projet du canal Seine Nord Europe, dossier des coûts de manutention fluviaux dans les ports maritimes, prise en compte des enjeux fluviaux dans le schéma directeur des plateformes multimodales, suivi des dispositifs de soutien au développement de la filière, promotion de la formation au multimodal.

Pour Benoît Mugnier : « Les objectifs ambitieux de report modal en France seront atteints grâce au mode fluvial car il a la capacité de multiplier par 4 les volumes sans investissement dans les infrastructures. Nous sommes une filière confidentielle et nous avons besoin de compétences, de sensibiliser au transport multimodal ».

Du côté des chargeurs. Au cours d’une autre table-ronde, Denis Choumert, président de l’AUTF, a relevé l’inutilité d’opposer les modes, soulignant une tendance favorable au multimodal ferroviaire et fluvial. Il a évoqué une nouvelle association « chargeur de l’axe Seine », une réflexion en cours pour la décliner sur Rhône-Saône-Méditerranée.

Pour lui, il y a trois priorités pour développer le transport combiné qu’il soit rail-route ou fleuve-route : davantage de fiabilité/flexibilité, améliorer les plans de transport à moyen terme, adapter les réseaux et services aux besoins des chargeurs industriels avec des flux capillaires, des flux sur les moyennes distances sans oublier la possibilité que les chantiers sachent gérer les différents types de caisses mobiles. L’un des points positifs pour le transport combiné, selon lui, est que le TRM va rester encore 5 ou 6 ans majoritairement au diesel et faire face à des hausses de coûts pour faire passer les véhicules à l’électricité ou autres solutions alternatives dans le contexte de la transition énergétique des motorisations (biocarburants).

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