Dans cette histoire, il faut aimer les jeux de mots, sigles, noms de codes et autres acronymes... Deux premiers lauréats de l’appels à projets « ZIBaC » (pour « zones industrielles bas carbone ») ont été désignés à la mi-janvier 2023 par le ministère chargé de l’industrie. L’un se trouve au Nord de la France à Dunkerque, l’autre au Sud à Marseille-Fos. Ce n’est pas tout à fait un hasard : les deux zones géographiques sont les plus émettrices de CO2 du pays avec la présence de « gros émetteurs industriels », la « décarbonation » des activités y est donc une priorité dans le cadre des objectifs de neutralité carbone d’ici 2050. Par exemple, les émissions de la zone de Dunkerque représentent 13,8 millions de tonnes de CO2eq émis en 2019.
13,6 millions d’euros pour Dunkerque
Dans le Nord de la France, le programme lauréat se nomme « DKarbonation », concerne la zone industrialo-portuaire (ZIP) de Dunkerque, est porté par 30 partenaires publics et privés. Il se voit attribuer une aide globale à hauteur de 13,6 millions d’euros « pour réaliser des études d’ingénierie et de faisabilité de « décarbonation ».
Parmi les études prévues :
- « Trajectoire ZIBaC » pour définir une trajectoire de « décarbonation » de la ZIP et des synergies d’écologie industrielle et territoriale (EIT).
- « Alimentation, déploiement, utilisation de nouvelles infrastructures » : notamment pour le captage, transport et stockage et la valorisation du carbone (CCS/CCU), mais aussi pour des réseaux de chaleur, électricité, ou encore pour l’hydrogène.
Ces études s’inscrivent dans le cadre de la phase dite « de maturation » de ZIBaC et doivent permettre de disposer d’une vue complète des besoins en infrastructures et des meilleures options pour la « décarbonation » de la ZIP. Les projets concrets définis lors de la « maturation » pourront ensuite (à partir de 2025) obtenir un financement public lors d’une deuxième phase de l’appel à projets.
Une dimension territoriale au-delà de la zone industrialo-portuaire
De la lecture du dossier de presse du ministère de l’industrie, il faut aussi retenir que si les porteurs des projets de « décarbonation » sont des industriels installés dans les ZIP, ils doivent s’inscrire dans une dimension territoriale plus vaste.
D’un côté, « les projets doivent avoir pour objectif d’accélérer la « décarbonation » de la zone industrielle en mettant en œuvre un ensemble d’investissements, d’expérimentations, de synergies et d’innovations ». D’un autre côté, « ils doivent être des projets de territoires ambitieux en matière de « décarbonation », de résilience climatique et de transition écologique et qui expérimentent et soutiennent des solutions organisationnelles ou technologiques et des procédés innovants qui contribuent à répondre aux problématiques qui s’y posent. Ces zones industrielles doivent intégrer ainsi une stratégie d’entrainement en vue de leurs élargissements ou de leurs diffusions sur d’autres territoires ».
DRI, DMX Demonstrations, K6
Concernant Dunkerque, plusieurs projets en cours autour de la « décarbonation » des activités industrielles sont plus particulièrement cités avec une affection marquée pour des désignations sous forme de noms de code :
- « DMX Demonstrations » porté par ArcelorMittal en partenariat avec l’IFPEN et TotalEnergies. Son objectif est de capter 1 million de tonnes de CO2 par an grâce à un procédé aux amines, développé par l’IFPEN. Il s’agit de valider des solutions techniques reproductibles et de parvenir à un déploiement industriel de la technologie de captage et de stockage.
- « K6 » porté par Eqiom et Air Liquide pour transformer l’usine du premier située à Lumbres en l'une des premières cimenteries neutres en carbone d'Europe. Une fois purifié et liquéfié, le CO2 capté à l'usine de Lumbres serait acheminé vers le port de Dunkerque puis transporté par navire vers des sites de stockage permanent en mer du Nord.
- « DRI » ou réduction directe par hydrogène, projet porté par Arcelor Mittal. Il s’agit de remplacer un des hauts fourneaux de l’usine de Dunkerque par une technologie nouvelle de DRI. Les hauts fourneaux produisent de l’acier liquide à partir de minerais de fer au moyen d’une réduction par le charbon/coke. Ils seraient remplacés, d’une part, par des unités de réduction directe de minerais de fer par un mix gaz naturel et hydrogène bas carbone ; d’autre part, par des fours électriques, qui produisent de l’acier liquide à partir de ferrailles et/ou de briquettes de fer issus de la technologie DRI. L’acier liquide produit par les fours électriques en aval du DRI poursuivra ensuite sa route dans les installations existantes pour produire l’acier final.
Dans un autre article, NPI reviendra sur l’autre lauréat de ZIBaC, à Marseille-Fos, le programme Syrius.