Les entreprises du secteur fluvial, comme celles de toutes les autres filières économiques, ont travaillé à un plan de sobriété énergétique de leurs activités qui vient d’être publié sous la forme d’un « guide » recensant un ensemble de mesures simples et de bon sens pour un résultat rapide et à court terme de réduction des énergies consommées, conformément aux demandes du gouvernement.
Entreprises fluviales de France (E2F), organisation représentative au niveau national de la filière fluviale, vient de publier un « guide opérationnel pour un transport fluvial responsable et économe en énergie ». Ce document présente « une série d’actions simples à mettre en œuvre dont l’effet cumulé permettrait de réduire de 5 à 10 % l’énergie consommée au niveau du secteur tout entier ».« Ces actions s’entendent hors modification du système propulsif lui-même, c’est-à-dire à périmètre technique identique, pour permettre une mise en œuvre la plus large possible de ces actions et ainsi garantir un résultat rapide à court terme », précise E2F qui ajoute : « Ce guide se veut une réponse opérationnelle et immédiate aux défis de la consommation énergétique ».Ces actions répondent ainsi aux demandes de sobriété énergétique globale du gouvernement qui avait lancé une démarche en juin 2022 pour mobiliser l’ensemble des acteurs économiques, publics et privés, pour bâtir un plan de réduction de 10 % de la consommation d’énergie du pays, première marche avant une réduction de 40 % d’ici 2050.Un groupe de travail « sobriété énergétique des transports » avait été mis en place le 6 septembre par le ministre délégué aux transports Clément Beaune et la ministre de la transition énergétique Agnès Pannier-Runacher afin de mobiliser les acteurs du monde des transports pour élaborer des propositions opérationnelles sur le sujet. Le gouvernement a présenté un plan général de sobriété énergétique le 6 octobre.
Un contexte global
Le plan de sobriété énergétique de la filière fluviale s’inscrit dans ce contexte général et concerne les entreprises effectuant du transport de marchandises comme du transport de passagers et des activités touristiques. E2F en est l’organisation professionnelle représentative au niveau national, réunissant des artisans bateliers, armateurs, opérateurs en compte propre, transporteurs de passagers, bateaux-promenade, péniches-hôtel.Il compte 10 pages, s’organise autour de 4 chapitres (équipement du bateau, gestion des transports, vie en navigation, vie en escale) et liste 6 actions :
1/ « Recourir aux carburants de substitution » pour remplacer le gazole non routier, (GNR)
Des carburants (biocarburants, Oleo 100, GTL…) existent sur le marché et sont déjà utilisés par plusieurs compagnies fluviales. Leur intérêt est double : aucune modification lourde du moteur thermique à bord et fonctionnement des bateaux avec des carburants moins polluants (en termes d’émissions de GES essentiellement et de CO2 dans une moindre mesure). C’est la première étape avant d’aller vers des solutions de propulsion totalement « décarbonées » des bateaux.
2/ « Eco-concevoir les équipements du bateau et acheter responsable »
Il s’agit à la fois de diminuer la consommation de carburant « par un emploi raisonnable de l’énergie électrique pour la vie à bord » et optimiser la gestion des consommations et des émissions de GES, liés aux fonctionnements annexes à la propulsion.Pour cela, il est possible d’installer des panneaux solaires, ou un équipement permettant de récupérer l’énergie de refroidissement des moteurs pour la réutiliser pour le fonctionnement à bord, ou un système de post-traitement, etc. Ces solutions sont déjà présentes à bord de plusieurs bateaux fluviaux.
3/ « Organiser ses transports de manière optimale »
La mesure est d’abord de réduire la vitesse du bateau en navigation pour qu’elle soit « la plus optimale du point de vue du régime moteur et de son niveau de consommation » mais aussi en fonction des impératifs commerciaux d’arrivée au port, au quai. La réduction des voyages à vide (c’est-à-dire sans chargement de marchandises) est une autre action à organiser.Il faut comprendre ici que les entreprises fluviales ne peuvent complètement décider d’agir seules, étant tenu par des impératifs relevant de la navigation (passage aux écluses) mais aussi de leurs clients/chargeurs (temps d’attente, respect des ordres de transport) ou encore des gestionnaires de plate-forme portuaires pour optimiser les temps techniques (opérations de mautention), les programmes de croisières, de promenade...
4/ « Sensibiliser et former le personnel de conduite »
C’est d’abord informer et sensibiliser les équipages à bord aux enjeux de la consommation énergétique lors des manutentions à quai, en navigation.Pendant celle-ci, il s’agit d’appliquer « l’éco-conduite » à la conduite d’un bateau : savoir le placer sur le cours d’eau, gérer les phases de démarrage, d’accélération, d’arrêt, de ralentissement… Mais sans oublier non plus qu’un bateau doit aussi être gérer dans des conditions optimales au regard des impératifs de sécurité : « l’éco-sensibilisation consiste aujourd’hui à intégrer un critère supplémentaire, celui de la modération énergétique ».
5/ « Limiter la consommation d’énergie à bord »
La sobriété énergétique d’un bateau ne consiste pas seulement à réduire la consommation de carburant mais concerne aussi tous les équipements annexes (comme les pompes, éclairages, chauffage, ventilation…) possiblement énergétivores qui doivent d’abord être régulièrement entretenus, vérifiés qu’aucune fuite n’existe…Ensuite, on retrouve ici des mesures similaires à la vie à terre : chauffage à 19°C en hiver, climatisation à 26°C en été, limiter l’éclairage en l’absence de clients/touristes à bord, diminuer les éclairages extérieurs et éteindre les enseignes lumineuses en fin de soirée pour les bateaux à passagers, une eau moins chaude au robinet (ballon à 55°C), des ampoules basse consommation…
6/ « Brancher les bateaux sur les bornes électriques de quai »
Lorsque les bornes électriques existent, brancher les bateaux sur elles permet d’éviter l’utilisation de groupes électrogènes lorsque le bateau n’est pas en navigation. Le bateau doit toutefois être équipé pour ce branchement.C’est une mesure très importante de sobriété énergétique : les bateaux de fret ou de tourisme passant entre 10 et 50 % de leur temps d’utilisation à quai.Ici aussi, les entreprises du fluvial ne peuvent agir seules, étant dépendantes du déploiement des bornes électriques le long des voies d’eau, sur les quais par les autorités compétentes (VNF, autorités portuaires, collectivités territoriales…).