Des sénateurs pas vraiment satisfaits de la stratégie nationale portuaire

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Les sénateurs de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ont analysé la stratégie nationale portuaire, présentée par le gouvernement au Cimer en janvier 2021. S’ils notent des avancées, ils pointent des « angles morts » sur plusieurs sujets dont le financement des ambitions de report modal autour des modes massifiés. Les sénateurs de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ont publié début avril 2021 un rapport analysant la stratégie nationale portuaire, présentée par le gouvernement lors du Cimer de janvier, après une audition du ministre des Transports en février. Ce travail sur la stratégie nationale portuaire, réclamée à de nombreuses reprises par les élus après bien des annonces et des reports du gouvernement, s’inscrit dans la suite du plus récent rapport du Sénat sur les ports maritimes (juillet 2020 « Réarmer nos ports dans la compétition internationale » de Martine Filleul et Michel Vaspart) ainsi que de la proposition de loi relative à la gouvernance et à la performance des ports maritimes français adoptée par le Sénat en décembre 2020, transmise à l’Assemblée nationale, et qui est en cours de navette parlementaire. D’ailleurs, pour les sénateurs, « cette initiative législative, qui concrétise des travaux de contrôle de plusieurs mois faisant l’objet d’un assez large consensus, pourrait utilement accompagner la mise en œuvre de la stratégie nationale portuaire ».

Les sénateurs de la commission notent des avancées favorables pour les ports dans la stratégie nationale portuaire (SNP) présentée par le gouvernement. « La commission a accueilli favorablement la SNP qui fait écho à ses préconisations : elle fixe un objectif clair de reconquête de parts de marché à nos ports (atteindre 80 % de parts de marché pour le fret conteneurisé manutentionné à destination et en provenance de la France d’ici 2050) et elle instaure un pilotage par la performance, à la fois au niveau portuaire, avec les contrats d’objectifs et de performance, et national, grâce au comité dédié au suivi de la SNP. Ces outils de pilotage sont, comme l’a indiqué le ministre chargé des transports, directement inspirés des propositions du Sénat ».

« Une trajectoire financière en-deçà des enjeux »

Les sénateurs pointent également plusieurs sujets qui constituent des « angles morts » de la SNP et concernent la gouvernance, la trajectoire financière, la réalisation des ambitions de report modal vers le fluvial et le ferroviaire d’ici 2030, le passage portuaire.

Pour la gouvernance, les sénateurs rappellent qu’ils avaient proposé de réformer celle des grands ports maritimes (GPM), « en associant davantage les acteurs économiques et les collectivités territoriales et en distinguant Haropa et Marseille des autres. Il s’agissait de promouvoir une gouvernance souple et adaptée à la taille des places portuaires ». Pour eux, « la SNP n’aborde pas la modernisation de la gouvernance des ports français de manière robuste. Elle se borne à apporter certaines précisions concernant la future gouvernance de Haropa (dans chaque place portuaire, un conseil de surveillance, un conseil d’orientation de l’axe Seine, un conseil de développement territorial), qui sont toutefois en phase avec les préoccupations de la commission ». La commission « regrette l’absence de volonté d’une évolution similaire dans l’ensemble des GPM. Plus généralement, elle déplore la faible prise en compte des enjeux de gouvernance des ports, qui renferment pourtant de réels gisements de gains de performance ».

Pour les sénateurs, la trajectoire financière associée à la SNP est « en-deçà des enjeux » avec les 175 millions d’euros d’investissements pour les ports dans le cadre du plan de relance et les 200 millions d’euros au total pour le secteur portuaire.

Les aspects financiers insuffisants concernent aussi les ambitions de report modal : la commission « s’interroge sur le caractère réaliste de l’objectif d’augmenter de 30 % la part des modes de transport massifiés dans les acheminements portuaires compte tenu de l’ambition limitée des investissements annoncés (outre le plan d’investissement pour l’axe Seine-Nord Europe, 400 millions d’euros sur deux ans pour le portuaire et le maritime et 200 millions d’euros pour le fret avec une priorité pour le ferroviaire) ».

Le report modal et son financement est abordé une autre fois sous l’intitulé « la transition écologique, un impératif insuffisamment priorisé financièrement ». Les sénateurs relèvent : « La SNP prévoit l’accroissement de 30 % de la part des modes massifiés (ferroviaire et fluvial) dans les pré- et post-acheminements d’ici 2030 et l’élaboration d’un plan de transition écologique pour chaque port dans le cadre d’une feuille de route pour le déploiement des carburants alternatifs à l’horizon 2025. Si cet objectif est louable, la trajectoire financière prévue pour l’atteindre, largement inférieure aux projections de la commission, suscite des inquiétudes ».

Les sénateurs déplorent aussi l’absence dans la SNP d’une volonté d’avancer sur l’amélioration du passage portuaire. « La SNP mise avant tout sur les outils numériques et l’instauration d’un schéma des plateformes multimodales », Si elle juge ces évolutions positives, la commission « déplore que la question des coûts de passage portuaires, qui pèsent sur la compétitivité-prix des ports français, ne soit pas directement abordée ».

En conclusion, les sénateurs de la commission indiquent qu’ils seront « attentifs à l’articulation de la SNP avec le « Fontenoy du maritime » destiné à dynamiser le pavillon français (prévu au printemps 2021) et la stratégie nationale sur le fret » ferroviaire prévue dans l’article 178 de la loi d’orientation des mobilités qui devait être présentée en janvier 2021.

L’ensemble des documents (rapport de 30 pages avec le compte-rendu des échanges lors de l’audition du ministre des Transports, un document reprenant l’essentiel des analyses des sénateurs de la commission) est en libre accès sur le site du Sénat.

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