Le port de Duisbourg et ses partenaires DLR (le centre allemand de l’aviation et de l’industrie aéronautique) et ZBT (centre pour les techniques de l’hydrogène) ont lancé en mars 2021 un projet-pilote visant à déterminer dans quelle mesure l’hydrogène pourrait servir de carburant pour les locomotives de manœuvre intervenant dans le port intérieur. « Concrètement, il s’agit aussi de définir quels sont les défis et les solutions envisageables, par exemple la transformation de locomotives en circulation ou au contraire le recours à des modèles neufs », explique un communiqué. Erich Staake, président de la société gérant le port, Duisport, a fait du développement de l’hydrogène dans la zone portuaire l’une de ses priorités. Pour lui, « l’hydrogène est l’un des piliers de notre stratégie de développement durable ».
L’Allemagne compte 2 700 locomotives de manœuvre au diesel. Nombre d’entre elles, en circulation depuis plus de 40 ans, sont dépourvues de tout système de régulation des polluants. Soucieux de réduire ses émissions de CO2, le Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, où se trouve Duisbourg, financera la moitié du budget du projet-pilote, évalué à 185 000 euros. Celui-ci s’inscrit dans le cadre du vaste projet européen RH2INE impliquant 17 partenaires essentiellement néerlandais et allemands avec le but de faire du corridor Rhin-Alpes une voie de circulation à l’hydrogène tant sur l’eau que sur la route ou par le rail, neutre du point de vue climatique de Rotterdam à Gênes. La Commission européenne finance RH2INE à hauteur de 500 000 euros.
Des procédures longues
Au sujet de du projet-pilote de Duisbourg, pour Alexander Garbar, directeur adjoint stratégie de Duisport : « C’est une étude exemplaire portant sur un terrain très complexe. Avec 25 000 trains par an à Duisport, nous nous sommes dit qu’il fallait faire quelque chose. Surtout que nous pensons être représentatifs en termes de charge lourde, de profil de conduite. L’étude va durer six mois et les premiers résultats sont prévus pour août 2021. Mais vu la longueur des procédures d’autorisation, il faudra attendre trois ou quatre ans avant que de premières locomotives à hydrogène puissent effectivement circuler ».
Duisport possède 15 locomotives Vossloh de manœuvre, consommant plusieurs millions de litres de diesel par an. « Nous travaillons avec Vossloh, mais nous pourrions aussi le faire avec Stadler ou Siemens. Transformer les locomotives actuelles présente de nombreux défis et il ne sera pas possible d’adapter les modèles les plus anciens. L’une des difficultés porte sur la place nécessaire pour stocker l’hydrogène. On parle de 1 600 kwH ! Les projets déjà menés, comme en Suisse et en Autriche, portaient sur 600 kwH et n’apportent donc que peu d’informations concrètes pour Duisport », précise Alexander Garber.
Dans son souci de durabilité, Duisport s’intéresse également au recours à l’ammoniaque pour ses locomotives. Selon Alexander Garber : « Comme pour la navigation fluviale, l’ammoniaque peut être une solution pour le rail, et à plus court terme que l’hydrogène. Je pense qu’on pourra tester les deux en parallèle. L’ammoniaque sera sans doute plus rapidement utilisable que l’hydrogène, pour lequel se pose à long terme la question du coût et des quantités disponibles. Aura-t-on assez d’hydrogène vert à des prix abordables ? C’est toute la question ».
Duisbourg, l’un des terminus de la nouvelle Route de la Soie, se présente comme étant le plus grand port intérieur au monde, avec un trafic de 25 000 trains et 20 000 bateaux par an.