Comme prévu, le rapport « pour dynamiser le transport fluvial sur l’axe Méditerranée-Rhône-Saône » (MeRS) avec son plan d’action a été rendu public par Cécile Avezard, présidente de Medlink Ports, sur le stand de cette association à la SITL le 13 septembre 2021. Elle avait remis ce rapport au ministre en charge des transports à l’issue de sa mission fin juillet.
« C’est le rapport de l’ensemble des membres de Medlink Ports, a expliqué Cécile Avezard, présidente de cette association et directrice territoriale de VNF Rhône-Saône. Pour mener à bien la mission qui m’avait été confiée, une co-construction avec les acteurs de terrain publics et privés et une concertation large ont été privilégiées ».
Cela signifie qu’au-delà de VNF, de CNR, de SNCF Réseau, du GPM de Marseille, d’autres services de l’Etat sur l’axe, des échanges ont eu lieu avec des acteurs logistiques au niveau national et local (comme l’AUTF, la FNTR, TLF, E2F, l’UMF…) mais aussi avec des élus de tous les niveaux des collectivités (régions, départements, métropoles, villes, communautés d’agglomérations). Haropa et Norlink, désignés comme « les responsables des autres axes en France », ont aussi fait partie des interlocuteurs de Cécile Avezard.
Cette responsable a rappelé que « le trafic fluvial patine sur l’axe MeRS alors que l’infrastructure est là et disponible, sauf peut-être sur le canal du Rhône à Sète ». Sans oublier que c’est l’un des principaux corridors de transport et de logistique entre la Méditerranée, le Nord de la France, et l’Europe du Nord et de l’Est. Le rapport et le plan d’action s’inscrivent dans ce contexte.
« Diminuer le coût de la manutention »
Pour lever les freins et dynamiser le transport fluvial sur l’axe MeRS, le rapport, qui est disponible sur le site de Medlink Ports, propose un plan d’action qui comprend 60 mesures« opérationnelles et concrètes » à mettre en œuvre par l’Etat, Medlink et les collectivités locales, autour de 4 objectifs et 3 conditions.
Le premier objectif est intitulé « diminuer le coût de la manutention, améliorer sa fiabilité et sa productivité ».
Il est indiqué ici « l’importance de changer les modes de facturation pour neutraliser le surcoût lié à la manutention fluviale des conteneurs dans les ports maritimes et fluviaux (à intégrer dans les THC-Terminal Handling Charges) ».
Il est préconisé « la mobilisation de la place portuaire de Marseille pour optimiser les accès aux quais sur les terminaux à conteneurs et programmer des investissements pour améliorer le traitement du fluvial ».
« Capter de nouveaux flux »
« Capter de nouveaux flux » constitue le deuxième objectif. Il est rappelé que « de nombreuses études montrent que les trafics fluviaux sur l’axe pourraient au moins doubler à horizon 2030 » pour les filières traditionnelles (matériaux de construction, agroalimentaires, énergies…) comme pour les filières spécifiques (colis lourds, déchets ultimes, logistique urbaine, économie circulaire, matières dangereuses).
Pour augmenter la part du fluvial dans le transport de marchandises, le rapport préconise « une démarche coordonnée, par exemple, pour lancer des expérimentations pour les filières spécifiques, développer des outils au service de la promotion commerciale, intégrer dans les documents d’urbanisme des territoires les modes massifiés ou encore réserver les terrains équipés disponibles fer/fleuve aux entreprises utilisant les modes massifiés ».
Favoriser le recours au fluvial par les chargeurs
Le troisième objectif vise à « favoriser l’investissement dans les systèmes de transport fluviaux et le recours à ce mode par les chargeurs ».
La fiabilisation des infrastructures fluviales et la disponibilité d’une flotte fluviale performante sont des éléments déterminants dans le choix des entreprises pour basculer leur logistique vers ce mode vertueux, selon le document.
Il préconise que « l’Etat s’engage à poursuivre le volet fluvial du CPIER Rhône-Saône au travers d’un avenant à signer en 2022 pour planifier les investissements jusqu’en 2027. Dans ce cadre, il est nécessaire que le canal du Rhône à Sète fasse l’objet d’une rénovation pour pérenniser le transport de fret. Il apparaît également indispensable que l’Etat soutienne l’investissement des acteurs privés dans le secteur fluvial (flotte et système de transport). Les territoires sont quant à eux appelés à favoriser l’implantation d’investisseurs par la présence des infrastructures ferroviaires et fluviales et à soutenir et développer la formation professionnelle dans le secteur fluvial ».
Accélérer le verdissement et la digitalisation
Le quatrième objectif porte sur des mesures pour « accélérer le verdissement et la digitalisation des services de transports.
Le rapport préconise « d’intégrer un volet fluvial aux objectifs de l’agence d’innovation pour les transports, d’accélérer les homologations à l’échelle européenne des innovations françaises, et de mettre en place des mesures fiscales incitatives en faveur du renouvellement de la flotte. Il appuie le développement de l’électrification des quais, l’accélération de la digitalisation des services (connexion des SI ferroviaires, fluviaux et maritimes, mise en place d’un éco-calculateur…) et la poursuite des expérimentations visant à développer une flotte hydrogène ».
Un « territoire organisé » sur le sujet du report modal
Pour Cécile Avezard : « Il n’y a pas une mesure évidente pour changer immédiatement les habitudes logistiques sur l’axe mais il y a la nécessité de mobiliser l’ensemble des acteurs, que sont les membres et les partenaires de Medlink Ports, l’Etat, les collectivités locales, autour d’une feuille de route pour aller tous dans le même sens. L’un des points forts du rapport est de publier notamment les engagements des 4 régions, de plusieurs métropoles ou intercommunalités. De son côté, Medlink Ports doit devenir l’organisation qui rassemble tout le monde autour des objectifs afin de faire émerger une conscience territoriale et parvenir à modifier les chaînes logistiques sur l’axe ».
Au final, l’accomplissement de l’ambition de « dynamiser le transport fluvial sur l’axe Méditerranée-Rhône-Saône » repose sur 3 conditions : « Une impulsion politique forte et indispensable de l’Etat, une coopération renforcée des opérateurs d’infrastructures et de réseaux, et un soutien des territoires dans l’exercice de leurs compétences en matière de transport, de développement économique, d’urbanisme, de transition écologique ».
Concernant l’Etat, le rapport préconise « la nomination d’un délégué interministériel placé auprès du Premier ministre à l’instar de ce qui existe pour l’axe Seine ». Le précédent a vu son mandat de 3 ans s’achever en 2020. « Ce délégué assurera le lien avec Medlink et sera en prise avec les administrations centrales et les instances européennes. Il coordonnera la vision et l’action de l’Etat sur l’ensemble des problématiques logistiques de l’axe (routières, ferroviaires et fluviales) ».
L’association Medlink peut se renforcer en augmentant ses membres partenaires (opérateurs économiques, clients ou usagers du réseau), en s’ouvrant aux régions, métropoles et communautés d’agglomérations, ce qui signifie au préalable de modifier ses statuts. A terme, l’idée est qu’elle devienne « le creuset du « territoire organisé » sur le sujet du report modal ».
Pour Thierry Guimbaud, directeur général de VNF, présent à la conférence de presse de présentation du rapport : « Il est important que l’axe Méditerranée-Rhône-Saône prenne sa place dans la dynamique à l’œuvre avec Haropa sur l’axe Seine, avec Norlink dans le Nord mais aussi sur la Moselle ou sur le Rhin ».