La collaboration fonctionne entre voies d’eau et vélos

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Après trois ans de partenariat, Voies navigables de France (VNF) a rejoint le réseau de collectivités publiques « Vélo & territoires » en février 2020. Un an après cette adhésion, le point sur le rapprochement entre tourisme à vélo et tourisme fluvial avec Camille Thomé, directrice générale de Vélo & territoires.N.P.I. : Quel bilan pouvez-vous faire de ce rapprochement avec VNF, un an après l’adhésion de cet établissement public à votre association ?Camille Thomé : L’adhésion est un signe très fort de la part de VNF, et cela poursuit et renforce le travail mené conjointement au cours des trois années de partenariat qui l’ont précédée. Nous menons des interventions réciproques lors des évènements auxquels nous participons ou que nous organisons, pour sensibiliser nos professions respectives, qui au tourisme à vélo, qui au tourisme en bateau. Nous relayons les appels d’offres de VNF auprès de notre communauté métier et sur nos réseaux sociaux, pour informer des personnes que VNF n’aurait pas pu directement atteindre. Deux journées consacrées au tourisme fluvestre ont aussi été organisées : en 2017 à Paris et en 2019 à Lyon. Vélo & territoires sera associé à la prochain édition des Rencontres nationales du tourisme fluvial en 2022. Cette intégration est symbolique de la nouvelle dynamique enclenchée, cela prouve que la collaboration entre voie d’eau et tourisme à vélo fonctionne. Faire connaître les deux formes de tourisme est très important, car les complémentarités sont évidentes.

N.P.I. : Quelles sont ces complémentarités entre tourisme à vélo et tourisme fluvial ?

C.T. : La complémentarité est tout d’abord géographique, puisque 91 % des abords de voies fluviales VNF sont des itinéraires cyclables existants ou en devenir. Il y a donc une convergence d’intérêts entre le patrimoine VNF et le tourisme à vélo. La complémentarité se voit aussi à travers les attentes des touristes, qui sont similaires. Les uns et les autres sont itinérants, et se déplacent sur un itinéraire donné. La recherche de ravitaillement le long de cet itinéraire est une préoccupation partagée. Les profils des touristes sont d’ailleurs similaires : ils sont dans une démarche hédoniste, aiment prendre leur temps et avoir la tête au grand air.

N.P.I. : Comment ces convergences peuvent-elles être exploitées concrètement ?

C.T. :  La voie d’eau peut, par exemple, proposer des hébergements flottants. VNF fait en sorte que les haltes fluviales aient des utilisations plus larges et soient identifiées par des affiches « accueil vélo », indiquant aux cyclistes qu’ils y seront bien accueillis. « Accueil vélo » est une marque de l’association France vélo tourisme qui regroupe plus de 6 000 établissements en France, dont une majorité d’hébergeurs. 

Les haltes fluviales, au-delà de l’accueil des bateaux, peuvent avoir plusieurs autres types d’utilisation, y compris pour les randonneurs et notamment pour ceux à vélo. Les maisons éclusières aussi peuvent être mises au service du tourisme fluvial comme au service des cyclistes. Certaines se délabrent, et VNF a lancé des appels à projets pour les requalifier et donner à cet important patrimoine une seconde vie. Cela vise à recréer des lieux d’accueil qui sont fréquentés bien au-delà des navigants, et très largement par les cyclistes. 

Ce qui manque le plus aux pratiquants du tourisme à vélo, c’est l’accès à des toilettes et à un point d’eau : le cycliste aura tendance à faire halte là où ces services lui seront proposés. Avec VNF, nous croisons régulièrement nos données cartographiques pour pointer les trous dans la raquette. D’un côté, la carte cyclable, de l’autre, la carte VNF, pour voir où les accueils vélo feraient défaut et pour identifier le potentiel de requalification des maisons éclusières à cet usage.

N.P.I. : Au-delà de ces convergences d’intérêts et de la coopération qui vous unit à VNF, peut-on imaginer une intégration plus forte des deux types de tourisme ?

C.T. :  Sur la Seine, nous manquons encore de recul. L’itinéraire Seine à vélo (voir ci-dessous) comporte encore beaucoup de sections provisoires et ne touche donc pas encore autant le grand public que la Loire à vélo (voir p.22). D’autres itinéraires cyclistes le long des voies d’eau ont un grand potentiel et sont déjà très fréquentés. C’est le cas de la Voie bleue, de Lyon à Luxembourg le long de la Saône et de la Moselle : connecté à la métropole de Lyon et à Via Rhôna au sud, il s’agit d’un itinéraire très accessible. Sur le Rhin, deux offres en une sont proposées, avec des véloroutes sur les deux rives, côté français et côté allemand. Le long du Rhône, des haltes fluviales existent pour les bateaux de croisière. On peut imaginer que des offres d’hébergement flottant soient proposées aux touristes à vélo. 

Mais tourisme fluvial et tourisme à vélo constituent encore trop souvent deux offres séparées. Combiner grande croisière et cyclisme est difficile : ce sera au choix de l’organisateur de la croisière de proposer ou non du vélo. Alors que pour les locations de pénichettes sur le petit gabarit, la location de vélo est presque systématiquement proposée.

N.P.I. : L’année 2020, très particulière, a-t-elle été favorable au développement du tourisme à vélo ?

C.T. : En 2020, il y a eu une très forte hausse de la pratique du vélo, avec une augmentation de 27 % de la fréquentation générale des équipements cyclables, en milieu urbain comme en milieu rural. Cette progression du vélo est continue depuis dix ans, mais avec habituellement une croissance à un seul chiffre. 

L’essor a surtout concerné les villes en 2020, le déplacement à vélo étant vu comme un geste-barrière, mais il y a aussi eu 21 % de fréquentation supplémentaire sur les itinéraires touristiques de fin mai à fin octobre, c’est-à-dire hors période de confinement. Cela est dû à une clientèle touristique domestique, de proximité, portée par une volonté d’activité en extérieur et avec un choix de dernière minute. On atteint, en milieu urbain, un phénomène de masse critique de néo-cyclistes qui vont vouloir continuer cette pratique pendant leurs vacances. 

Le tourisme à vélo commence dès avril et peut durer jusqu’à fin octobre. Selon une étude réalisée en 2020, le poids économique du vélo est de 8 milliards d’euros, dont un peu plus de la moitié concerne le tourisme à vélo. Les retombées économiques sont donc très importantes pour les territoires concernés, et augmentent d’ailleurs d’année en année. Sur la Loire à vélo, le panier moyen des cyclistes est passé de 68 à 80 euros par jour et par personne entre 2010 et 2015, ce qui est supérieur à la moyenne générale du tourisme, et s’explique par la structuration de l’offre. On observe d’ailleurs ce phénomène sur d’autres itinéraires.

La Seine à vélo ouverte à l’automne 2020

L’itinéraire de la Seine à vélo a été inauguré à l’automne 2020 avec une ouverture officielle au grand public le 15 octobre. Cet itinéraire cyclable long de 420 km correspond à la véloroute 33, qui n’existait jusqu’à présent qu’en pointillé, faute de continuité des aménagements. Le fleuve français le plus navigué était aussi le moins adapté aux vélos par rapport au Rhin ou au Rhône ou à la Loire à vélo, dont le succès est un cas d’école. La Seine à vélo traverse 8 départements pour relier Paris à la mer avec deux destinations : Le Havre et Deauville. Cette inauguration ne marque pas la fin des aménagements mais signifie que l’itinéraire est complet de bout en bout. De nouveaux kilomètres de voies cyclables vont être aménagés à l’avenir, constituant autant de variantes à l’itinéraire principal pour offrir des chemins différents entre Paris et la mer ou proposer des boucles locales pour permettre un détour vers un site intéressant. Au cyclotourisme, l’itinéraire ajoute la mise en avant du patrimoine industriel de la vallée de la Seine : les ports fluviaux, les installations du canal de Saint-Denis, le musée de la batellerie de Conflans-Sainte-Honorine sont présentés comme des éléments concourant à l’attrait touristique du voyage à vélo. Les cyclistes sont même invités à naviguer sur la Seine le temps d’une traversée, les bacs pour traverser le fleuve, au niveau des boucles aval, pouvant être empruntés gratuitement avec un vélo.

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