Un premier contrat d’objectifs et de performance (COP) entre l’Etat et Voies navigables de France (VNF) a été signé le 30 avril 2021 à Paris et couvrait la période 2020 à 2029. Prévu par la loi d’orientation des mobilités, le COP de VNF comprend un principe triennal de revoyure et d’actualisation, qui a eu lieu au cours de l’année 2023 et a abouti à son renouvellement. Celui-ci a fait l’objet d’une signature formelle le 23 décembre 2023 entre l’Etat, représenté par le ministre des Transports Clément Beaune, et Thierry Guimbaud, directeur général de l’établissement public.
Renouvelé et prolongé jusqu’en 2032. Le COP renouvelé acte plusieurs éléments du premier contrat dont le maintien d’un haut niveau d’investissement, prévoit une stabilisation des effectifs et sa période court désormais jusqu’en 2032.
Les objectifs du COP renouvelé et prolongé demeurent les mêmes : « la mise en œuvre d’un programme d’investissement fortement augmenté, une politique active dans le domaine du fret, une ouverture aux territoires, une évolution de son modèle économique et un pacte social ambitieux pour accompagner les personnels dans la modernisation du réseau fluvial », ont rappelé les signataires.
Concrètement, l’ambition pour le début de la prochaine décennie est présentée de manière plus prudente qu’auparavant : « le volume de fret transporté par voie fluviale pourrait augmenter de moitié » ce qui porterait le potentiel trafic à plus de 10 milliards de tonnes-kilomètres, soit plus de 75 millions de tonnes de marchandises.
Il est par ailleurs étonnant de lire dans le dossier de presse le rappel des niveaux de trafic de… 2019 sans doute car ils ont la caractéristique d’afficher une hausse alors que les derniers résultats connus, ceux de 2022, apparaissent en régression et la tendance pour 2023 ne semble guère positive.
Pour le tourisme fluvial, l’ambition est exprimée en termes de « retombées économiques » avec un niveau à 3 milliards d’euros à l’horizon 2030 au lieu de 1,4 milliard en 2019.
Qu’en est-il des investissements ? Dès la signature du premier COP, le maintien des investissements sur toute la période de 10 ans était le sujet qui revenait régulièrement dans les commentaires des acteurs de la filière. Avec le COP, les niveaux ont en effet connu un doublement entre une dotation budgétaire de 170 millions d’euros en 2019 à près de 300 millions d’euros en 2021 et 345 millions en 2022.
A l’occasion de la signature, il a été indiqué :
- « La première actualisation triennale du COP attribue à l’établissement des moyens complémentaires pour mettre en œuvre une modernisation de ses méthodes d'exploitation et la régénération de ses infrastructures ».
- « Les dotations de fonctionnement de l’établissement sont, quant à elles, stabilisées sur la durée du contrat ».
- « Le contrat actualisé prévoit ainsi sur la période 2023-2032 une forte progression de la participation de l’Etat qui avec les autres recettes d’investissements de l’établissement lui permettra d’investir 4,3 milliards d’euros dans la durée du contrat sur le réseau qui lui est confié ».
Qu’en est-il des effectifs ? Autre sujet central dans le contexte de la modernisation et de la conduite du changement, la question du nombre des personnels au sein de VNF, qui depuis plusieurs années, comme tous les établissements et opérateurs de l’Etat, est soumis à des plafonds d’effectifs.
Le COP renouvelé prévoit « une stabilisation des effectifs de VNF actée pour les trois prochaines années pour déployer son projet industriel ».
Il est indiqué que « dans les cinq prochaines années, Voies navigables de France recrutera 1000 personnes environ ».
Le maintien des investissements et la stabilisation des effectifs visent « à atteindre l’ambition que l’Etat et Voies navigables de France portent pour le fluvial à 10 ans » qui se traduit dans la réalité par « un projet de modernisation de l’établissement avec la rénovation des infrastructures, la mise en place de la téléconduite et l’automatisation des ouvrages pour permettre une gestion du réseau plus moderne, un service plus réactif et performant et des conditions de travail plus sûres pour les personnels ».
Vers une stratégie nationale du fret fluvial ? Lors de la signature du COP renouvelé et prolongé le 23 décembre 2023 à Paris, le ministre des Transports a également indiqué « le lancement de travaux avec la profession fluviale en vue d’une stratégie nationale pour le développement du fret fluvial »… Qui évoque bien évidemment la stratégie nationale du fret ferroviaire signée en 2021, ce que confirme le ministère. Selon ce dernier, iI s’agit « d’accompagner les mutations à l’œuvre et accélérer le nécessaire report modal vers les modes massifié bas carbone, à l’instar de ce qui a pu être réalisé pour le fret ferroviaire ».
Il est rappelé les atouts du transport fluvial en termes de réduction de gaz à effet de serre dans le contexte du réchauffement climatique par rapport au transport routier et dans l’amélioration de la résilience des usages de l’eau :
- « Le transport fluvial nécessite 4 fois moins d’énergie et est 5 fois moins émetteur de GES à la tonne transportée que la route. La voie navigable est une infrastructure de transport fret bas carbone mais aussi un outil d’industrialisation historique et donc aujourd’hui de réindustrialisation des territoires ».
- « Le transport fluvial, dispose d’importantes réserves de capacité pour du transport de fret massifié sur les axes de grand gabarit que sont Rhône-Saône, la Seine, la Moselle, le Rhin et la liaison européenne Seine-Escaut en cours d’aménagement. La mise en service à venir du canal Seine- Nord Europe et le développement de l’axe Méditerranée Rhône Saône (MeRS) présentent des perspectives de développement des hinterlands des ports de Marseille-Fos, Haropa, et Dunkerque ».
Quatre priorités. Il était prévu, selon les informations données le 23 décembre 2023, que les travaux d’élaboration soient lancés dès le début 2024 par le ministre des transports : une planification qui va sans doute être un peu différée compte tenu du changement de Premier ministre (Gabriel Attal a succédé à Elisabeth Borne le 9 janvier 2024) et de la mise en place d’un nouveau gouvernement en vue d’un conseil des ministres pour le moment programmé pour le 12 janvier.
La stratégie pourrait être articulées autour de quatre priorités :
- accroître la part modale du fluvial et compléter les mesure prises pour réussir l’objectif de passer de 2 à 3% à l’échelle nationale à l’horizon 2030 pour accélérer la décarbonation du transport de marchandises ;
- développer l’avantage écologique du secteur fluvial en accélérant la décarbonation des bateaux avec des technologies compatibles avec l’impératif de protection de la ressource en eau ;
- renforcer le rôle de la voie d’eau au service de l’industrie et de l’aménagement du territoire et retrouver "l’esprit Freycinet" en agissant sur le plan économique et industriel mais aussi par la standardisation des bateaux ;
- développer le transport de voyageurs et la logistique urbaine.
A l’occasion de la signature du renouvellement du COP de VNF avec l’Etat, une démonstration de livraison fluviale au port de Debilly (16ème arrondissement) a eu lieu par le Zulu 3 du groupe Sogestran pour le compte de deux chargeurs : OBD Grand Paris, distributeur de boissons dans la capitale et en Ile-de-France, et Paprec, spécialiste de la gestion de déchets.
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