La hausse du coût de l’électricité dans les coûts d’exploitation avec des répercussions sur les prix de vente et la conjoncture économique morose (inflation, remontée des taux d’intérêt, situation géopolitique) ont arrêté l’embellie qu’avait connu le transport combiné rail-route et fleuve-route en 2021 et 2022. C’est ce que montrent les chiffres pour le premier semestre en 2023, les seuls disponibles pour le moment et diffusés lors de la journée du transport combiné (lire l’article de NPI) en novembre 2023. Les échanges lors de cet événement ont montré que la situation n’allait pas en s’améliorant pour la suite de l’année 2023.
Quelle tendance pour 2024 ? Le Groupement national des transports combinés (GNTC) relève, dans un nouvel indice de conjoncture tout juste créé, que l’optimisme n’est pas de mise pour l’année 2024 parmi ses adhérents interrogés en décembre 2023 :
- 90% des adhérents ont vu en 2023 la conjoncture se dégrader. Pour 2024, ils sont 46,7% à anticiper une nouvelle dégradation et 43,3 % à prévoir une activité stable, seuls 10% voyant un espoir d’amélioration.
- 63,3% des adhérents prévoient une suspension de leurs investissements et 73,3% envisagent de renoncer à embaucher, leurs analyses qualitatives faisant état de trop importants manques de visibilité sur l’état de la demande et la dynamique des marchés.
Le GNTC, instance représentative du transport combiné en France, compte 70 adhérents qui sont des transporteurs routiers ayant recours à ce mode de transport, des opérateurs de transport combiné, aussi bien rail-route que fleuve-route, ainsi que des exploitants de terminaux et des loueurs de matériels.
La révision de la directive transport combiné, l’un des dossiers de 2024
Parmi les dossiers pour 2024, le GNTC met en avant « la très attendue révision de la directive de 1992 sur le transport combiné » pour laquelle la Commission européenne a publié sa proposition, le 7 novembre 2023 (voir article de NPI).
Le texte « a vieilli et ne prend pas en compte la stratégie de verdissement de l’UE : c’est pourquoi, après de premières tentatives en 2017, la Commission souhaite amender la directive pour conforter et accélérer le développement du transport combiné en Europe », rappelle le GNTC.
Pour cette association, « de façon générale, cette révision de la directive de 1992, que la communauté européenne du combiné appelait de ses vœux depuis longtemps, est bienvenue et les objectifs généraux de la Commission à cet égard doivent être salués, à commencer par la reconnaissance de la performance du combiné en matière de coûts externes, l’homogénéisation des définitions de ces coûts externes et de leurs méthodes de calcul, ainsi que l’obligation aux Etats de concevoir et d’appliquer des stratégies de soutien et de développement ».
4 modifications de fond. La proposition de la Commission européenne comprend quatre principaux axes modifications du texte de 1992, selon le GNTC :
- Une définition du transport combiné plus homogène, plus précise et mise à jour: dans ce premier axe figurent notamment des règles communes pour mesurer les coûts externes ainsi que des règles nouvelles sur l’identification de certaines UTI comme les semi-remorques non préhensibles.
- Un cadre légal rénové aux interventions des Etats membres : dans ce deuxième axe figurent notamment l’obligation faite aux Etats d’analyser la situation du transport combiné et de concevoir des stratégies de soutien comprenant toutes mesures réglementaires ou financières, l’obligation de publier ces éléments, un objectif de réduire par ces moyens de 10% les coûts du transport combiné de façon à en renforcer la compétitivité ainsi que la possibilité de faire circuler les camions en pré/post acheminement intermodal le week-end.
- Une exigence accrue de transparence sur les modalités de soutien au transport combiné pratiqué dans chaque Etat membre.
- Une exigence accrue de transparence sur les terminaux intermodaux, avec notamment une homogénéisation des services qu’ils offrent, ce dernier axe étant proposé en cohérence avec le développement des réseaux trans-européens de transport (RTE-T).
Ce n’est que le début. Le GNTC reste toutefois vigilant car « le texte tel qu’il est actuellement recèle aussi des problématiques », par exemple :
- Le fait que la définition du transport combiné intègre un nouveau paramètre lié aux coûts externes éludés, dans une proportion d’au moins 40% par rapport au même transport effectué en mode routier. Comme aucun élément n’existe pour estimer l’impact de cette mesure, un risque existe qu’elle amène à disqualifier certains services intermodaux et donc à entraîner des reports modaux inversés.
- L’obligation faite aux semi-remorques non préhensibles d’être désormais immatriculées comme le sont déjà les conteneurs maritimes, les caisses mobiles et les semi-remorques préhensibles. Or, plus de 85% des semi-remorques circulant en Europe ne sont pas préhensibles : cela revient à instaurer une nouvelle (et injustifiée) barrière à leur accès au transport combiné.
Il faut aussi noter que la révision de la directive n’a été détaillée par la Commission que le 7 novembre 2023, « il faut donc s’attendre encore à de longs mois d’échanges avec les parties prenantes et les colégislateurs avant d’aboutir au texte final ». Les élections pour le renouvellement des députés du Parlement européen en juin 2024 vont également ajouter un délai supplémentaire aux travaux de révision.