La Seine est le fil rouge des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024, deux tiers des sites sont au bord de la voie d’eau en banlieue parisienne comme dans le centre de la capitale, la cérémonie d’ouverture va se dérouler sur la Seine, des épreuves de natation sont aussi prévues dans le fleuve….
« La dimension fluviale est ainsi évidente dans l’organisation des Jeux », rappelle François Houix, chargé de mission JOP chez Voies navigables de France (VNF), direction territoriale du bassin de la Seine.
Avant les Jeux : déblais et approvisionnement des chantiers
- En janvier 2020, « une priorité est donné au transport fluvial » avec un partenariat signé entre la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo), l’Etat, VNF et Haropa, qui a d’abord concerné le transport des déblais et des matériaux de construction du chantier du village olympique. Cet engagement a porté ses fruits avec près de 500 000 tonnes de déblais évacués en phase déconstruction du Village olympiques (voir article de NPI).
- Depuis 2022, le fluvial joue un rôle pour l’approvisionnement des chantiers olympiques en matériaux de second-œuvre. Par exemple, depuis décembre 2022, des modules préfabriqués en bois ont été acheminés par la voie fluviale jusqu’à L’Île-Saint-Denis, pour la construction de la résidence étudiante de Pichet-Legendre au sein du Village des athlètes. Entre 11 et 16 modules sont livrés chaque semaine par bateaux.
- En 2023, un total de 141 modules préfabriqués en bois sera livré par le fleuve. Un flux intégralement fluvial du départ à Valenciennes à l’arrivée où les modules préfabriqués sont récupérés directement dans le bateau par la grue du chantier avant d’être installés sur le bâtiment. En janvier et février, 2 800 m2 de façades en bois ont aussi été livrés par la voie fluviale.
Pendant les Jeux : un engagement
Il ne faut pas oublier que tout ce qui concerne l’organisation des JOP de Paris 2024 relève du comité d’organisation (COJOP).
Pour la navigation fluviale, VNF s’appuie sur les instances existantes de concertation (comité d’usage, commission locale des usagers…) et est également membre d’un groupe de travail dédié piloté par l’Etat.
« Il y a un engagement très fort de l’Etat, du préfet de la région Ile-de-France, du délégué interministériel aux JOP pour faire en sorte que la navigation, y compris le transport fluvial de marchandises, pendant l’événement soit maintenu, explique François Houix.
Pour nous c’est un signal très fort : oui, il y aura du transport fluvial de marchandises pendant les Jeux dans Paris. Cela ne sera pas comme d’habitude, cela ne sera pas simple, il y aura des restrictions. Mais il y a un engagement, une volonté de l’Etat qui s’impose aussi au COJOP pour que la navigation fonctionne pendant les Jeux ».
Il y a des flux qu’on ne peut pas annuler ou reporter pendant plusieurs semaines, rappelle le chargé de mission, comme le transport de céréales, les sorties de mâchefers, les approvisionnements des centrales à béton, la logistique urbaine, les bateaux à passagers…
François Houix donne en exemple les épreuves de natation dans la Seine au centre de Paris : « Le préfet a demandé une programmation des épreuves le matin et un arrêt de navigation par demi-journée, pour permettre la navigation fluviale l’après-midi, le soir, la nuit pour les bateaux de fret et de passagers ». Des « test events » de natation vont être organisées en 2023 pour, comme leur nom l’indique, tester le déroulement des épreuves et les mesures envisagées.
La réussite des Jeux : un bénéfice pour tous
Une répétition de la cérémonie d’ouverture sur la Seine est programmée pour le 17 juillet 2023, le matin avec des préparatifs et installations qui vont se dérouler la nuit. François Houix précise :
- « Nous avons pris en compte la demande des navigants : faire en sorte que les écluses qui ferment aujourd’hui à 20h puissent opérer un peu plus tard pour leur permettre de passer plus facilement la veille. L’idée est aussi de conserver l’accès entre la Seine amont et le port de Bonneuil-sur-Marne le matin », poursuit François Houix .
- « Nous faisons tout à notre niveau pour compenser, réduire les effets de l’événement sur la navigation sur la Seine dans le centre de Paris, avec les moyens dont nous disposons comme modifier les horaires des écluses, travailler sur la Seine amont… C’est aussi informer et former le COJOP sur les flux, les trafics, les bateaux, les zones d’attentes.
- Notre rôle est d’être un facilitateur. Tout en tenant compte que les JOP sont un événement hors normes et leur réussite est dans l’intérêt de tous, notamment sur la Seine pour la cérémonie, les épreuves, la logistique. C’est combiner des enjeux complexes : ceux des JOP avec ceux des navigants et de l’économie fluviale ».
Le bras secondaire de Gennevilliers…
La problématique de la navigation fluviale lors des JOP ne concerne pas seulement la Seine dans Paris mais aussi dans le bras principal de Saint Denis et le bras secondaire de Gennevilliers :
- Le bras principal de Saint Denis sera fermé (vu sa situation par rapport au Village des athlètes), sachant qu’il est emprunté par 60 à 70 convois par jour pour 10 millions de tonnes de trafic par an. C’est une zone très importante pour le transport fluvial de marchandises entre Gennevilliers et Paris centre, le canal de Saint Denis.
- La solution de repli est le bras secondaire de Gennevilliers pour accueillir la navigation de commerce et de passagers durant les Jeux. VNF est ici l’un des maîtres d’ouvrage de la Solideo pour aménager et rouvrir le bras secondaire.
… Les travaux sont en cours
Le chantier a démarré, sachant qu’il comprend trois types de travaux :
- des opérations de dragage,
- la création d’un alternat,
- l’installation de postes d’attente pour les bateaux.
- « C’est un plan d’actions qui a été anticipé depuis plusieurs années car ce sont des travaux qui ont nécessité des autorisations, de la concertation, des consultations de marché public… », précise le chargé de mission.
Les opérations de dragage ont été lancées en janvier 2023 et sont quasiment achevés avec l’objectif de garantir un mouillage de 4 mètres suffisant pour les plus grandes unités fluviales de 135 mètres de longueur. Elles sont réalisées dans « un cadre règlementaire strict précisé par le code de l’environnement et suivies par un écologue », rappelle VNF.
Environ 6 000 mètres-cubes de sédiments sont extraits puis valorisés, par exemple dans la filière du BTP, pour la construction de routes ou d’infrastructures routières… Le montant total du dragage de ce bras secondaire de Gennevilliers s’élève à 1,5 millions d’euros, financé entièrement par la Solideo.
La mise en service d’un alternat est nécessaire dans le bras secondaire de Gennevilliers car cette voie d’eau ne permet pas le croisement des bateaux. VNF crée environ 1000 mètres de nouveaux garages à bateaux pour permettre de se mettre en attente durant l’alternat. L’établissement installe également « une signalisation adaptée, la fibre optique et des caméras pour superviser les trafics de l’alternat du bras de Gennevilliers et garantir ainsi une navigation fluide et sûre ».
Héritage des Jeux
Le chantier du bras secondaire de Gennevilliers est conçu « en héritage des Jeux » : les postes d’attente serviront après l’événement pour la logistique fluviale de grands chantiers franciliens (stockage des barges pour les évacuations de déblais) ou pour les territoires de la Seine-Saint-Denis, par exemple pour le développement d’activités de loisirs.
En conclusion, pour François Houix :
- « Je suis assez confiant, la navigation sera bonne, quasi normale, sur le bras secondaire de Gennevilliers. Il y aura certes un alternat mais que nous allons optimiser avec des horaires pour le passage le jour et à la demande la nuit.
- Nous avons eu les soutiens et les moyens financiers pour pouvoir maintenir la navigation commerciale fret et passagers au niveau du secteur du Village olympique pendant les JOP. Ce qui n’était pas forcément évident il y a quelques années.
- Tout est également mis en œuvre pour que les effets négatifs sur la navigation soient les moindres possibles sur la Seine dans le centre de Paris ».