A Paris, conjuguer les activités logistiques et de loisirs

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« Ce qui nous anime avec les acteurs du fleuve, c’est de parvenir à conjuguer les activités industrielles et de loisirs. On a besoin de cohabitation, de co-activité, d’usages partagés», a dit Pierre Rabadan, adjoint à la maire de Paris, lors de Riverdating.

La Solideo, Point P et Poulingue ont témoigné, lors de Riverdating, de l’utilisation du transport fluvial pour approvisionner les grands chantiers parisiens, répondant aussi à une volonté politique de la ville, selon Pierre Rabadan, adjoint à la maire. Celui-ci a annoncé qu’Ikea France entamait ses premières livraisons sur la Seine à Paris ces jours-ci avec un lancement officiel prévu le 14 décembre 2022.

« La société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo) a signé en janvier 2020 une convention pour favoriser le recours à une logistique fluviale pour la construction du Village Olympique et Paralympique avec Voies navigables de France (VNF), Haropa Port (de Paris), la préfecture de la région Ile-de-France, a rappelé Florian Sannino, responsable coordination inter-chantier, lors d’une conférence de Riverdating consacrée aux à la « fluvialisation » des grands chantiers de la région parisienne. Cela a permis l’évacuation par le fleuve de près de 500 000 tonnes de déblais dont 146 000 tonnes de terres des travaux de viabilisation, soit plus de 25000 camions de 20 tonnes évités sur les routes ».

La Solideo, établissement public industriel et commercial, a pour mission de veiller à la livraison des ouvrages et à la réalisation des opérations d’aménagement nécessaires à l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024, en tenant le budget défini et en assurant « un héritage » des structures réalisées par une reconversion en équipements, logements ou bureaux après l’événement sportif lui-même.

La Solideo est directement maître d’ouvrage de certains des équipements prévus (dont le Village) et supervise les maîtres d’ouvrages d’autres projets. « Nous les avons incités à utiliser la voie d’eau le plus que possible. Un travail en amont est indispensable, notamment avec VNF et Haropa Port, car le fluvial n’est pas encore un réflexe naturel pour les maîtres d’ouvrage. Le recours à la logistique fluviale s’inscrit aussi dans une démarche d'économie circulaire et de réduction de l’empreinte carbone des JOP de Paris 2024 » qui sont présentés comme devant être « durable et exemplaire ». La Seine constitue aussi un axe stratégique de ces JOP pas seulement pour les chantiers mais aussi pendant la cérémonie d’ouverture, qui se déroulera sur le fleuve et non pas dans un stade, et les épreuves.

Le fluvial, un atout commercial pour Point P

Point P, filiale du groupe Saint Gobain, a été l’une des entreprises impliquées dans le chantier du Village, qui accueillera les athlètes, situé en bord de Seine, dans une zone routière déjà très congestionnée. Pour Olivier Veloso, directeur des grands comptes de Point P : « Le fluvial est une solution pertinente pour approvisionner ce chantier qui a compté jusqu’à 4000 ouvriers et 38 grues. Nous livrons depuis plusieurs années nos agences situées en bord de quai dans Paris intra-muros depuis la région parisienne, l’une de nos deux péniches passant régulièrement juste devant l’implantation du Village ». Point P a ainsi livré des matériaux au chantier deux fois par semaine.

« Cela a l’air simple quand je le raconte mais, dans la réalité, non car les acteurs et intervenants sont nombreux, c’est un puzzle. Il a fallu convaincre que la solution fluviale à iso-coût répondait aux prescriptions de la Solideo. Nous prenions les matériaux en sortie d’usine, les transportions par notre péniche puis par un camion au gaz pour les derniers mètres. En flux retour, nous avons repris des palettes », explique Olivier Veloso. Point P se prépare pour la phase « héritage » des Jeux qui consistera au démantèlement du Village pour le transformer en 6000 logements, le fluvial sera là aussi impliqué.

Le responsable de Point P ajoute avoir été contacté pour livrer des matériaux pour la rénovation du restaurant parisien la Tour d’Argent dont les promoteurs avaient eu connaissance de ce qu’avait fait Point P pour le Village des JOP. « Pendant 1,5 mois, nous avons livré au quai de la Tournelle pour ce chantier avec le Freedom. Nous avons eu un accompagnement de VNF. Il a fallu beaucoup organiser et anticiper ». Pour lui, « commercialement, associer le fluvial est un avantage pour les chantiers en réhabilitation ou en construction neuve dans Paris ».

Les convictions fluviales de Poulingue SA

Victor Fraboulet, chargé de projet de Poulingue SA, entreprise du bâtiment, installée en Normandie, a expliqué le choix du fluvial pour livrer des éléments en bois préfabriqués pour la réalisation d’une tour (Wood Up) dans le quartier de Tolbiac (13ème arrondissement parisien) : « Nous n’avons pas été retenu pour l’un des ouvrages des JO mais cela a été un déclic pour nous mettre au transport fluvial pour livrer des charpentes en bois pour une tour de 15 étages qui comprend aussi des éléments de type métal ou béton. Nous avons eu beaucoup de remarques sur le fait qu’utiliser le fluvial freinait le projet mais nous avons tenu bon. Notre usine est en Normandie à Beuzeville, les charpentes sont amenées à Rouen par la route, chargées sur un  porte-conteneurs fluvial qui arrive à Gennevilliers. Là, les charpentes sont placées sur un autre bateau, un Zulu de Blue Line Logistics, puis livrées au port de Tolbiac. La tour est située à 300 mètres de ce port, les charpentes parcourent ces derniers mètres par la route ». Les charpentes sont placées dans des « Fleximalle », sorte de conteneurs spécifiques conçus par Sogestran, et sont ainsi transportées, chargées/déchargées sans difficulté et sans casse. Un total de 15 conteneurs a été transporté.

Victor Fraboulet ajoute : « Nous transportons actuellement 10 % de nos flux par le fluvial, nous souhaitons atteindre 25 % en 2025, soit 50 conteneurs par an. Là est l’avenir : il faut raisonner avec le fluvial, utiliser la chaine logistique de manière différente. Il va y avoir un changement des mentalités : ce sont ceux qui n’iront pas vers le fluvial qui seront pointés du doigt ».

Conjuguer les activités industrielles et de loisirs

La parole a ensuite été donnée à Pierre Rabadan, adjoint à la maire de Paris, en charge des sports, des JOP, de la Seine : « Nous avons la volonté de développer la logistique fluviale dans la ville. Il s’agit de réinventer les modèles d’approvisionnement dans les zones congestionnées, de réduire l’empreinte carbone des transports. Ce qui nous anime avec les acteurs du fleuve, c’est de parvenir à conjuguer les activités industrielles et de loisirs, il y a des solutions, une volonté partagée, c’est la transformation de la ville. Nous ne voulons pas privatiser le bord du fleuve à Paris, ni pour les loisirs, ni pour les besoins industriels ou logistiques. On a besoin de cohabitation, de co-activité, d’usages partagés, d’inventer de nouvelles solutions de livraison. La volonté de la ville est de mettre en place une articulation globale avec les acteurs comme VNF et Haropa entre autres ». Il a cité en exemple le port de la Bourdonnais où se déroule la logistique urbaine fluviale de Franprix, et le projet de faire évoluer l’engin de manutention actuellement utilisé et encombrant, gênant l’accès sur une partie de l’emprise et freinant d’autres activités.

Cet élu a poursuivi son propos par la nécessité de transformer les motorisations des bateaux naviguant sur la Seine dans Paris, citant l’objectif de transformer 40 premiers bateaux de compagnies de tourisme fluvial d’ici les JOP. (C’est le projet porté par la Communauté portuaire de Paris, NDLR). « Il restera encore beaucoup à faire après ses premiers 40 bateaux, sachant que le coût de la transformation des motorisations est élevé pour des entreprises dont les capacités d’investissements sont limitées ».

Parmi les nouveaux entrants dans le fluvial, Pierre Rabadan a confirmé qu’Ikea France entamait ses premières livraisons sur la Seine à Paris ces jours-ci avec un lancement officiel prévue le 14 décembre 2022. Il a aussi indiqué que l’entreprise de construction Fayolle envisageait le fluvial pour des travaux sur les Champs Elysées.

Il reste que le chantier de rénovation de la cathédrale Notre Dame de Paris a peu eu recours au fleuve jusqu’à présent. Les lieux d’origine des matériaux n’étaient pas bien situés, selon le responsable de Point P, qui a toutefois relevé que la charpente devrait être livrée par la Seine. Il a aussi indiqué un chantier de RER vers Austerlitz avec des éléments là aussi livrés par la Seine.

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