NPI : La baisse d’activité constatée en 2020 est-elle aujourd’hui surmontée, ou êtes-vous encore confrontés à des difficultés ?
Stéphane Trouillet : La reprise est au rendez-vous : après une baisse d’activité de 20 % en 2020, nous retrouvons des niveaux de trafic pré-Covid. Mais la situation peut se retourner très vite et la reprise pourrait être entravée, avec, par exemple, la difficulté à trouver des pièces de rechange en cas de panne d’un engin de manutention. Si le besoin s’en faisait sentir, nous aurions aussi des difficultés à recruter pour des métiers aussi spécialisés que les nôtres sur un bassin en plein emploi.
NPI : Quels sont les effets sur vos ports des tensions du transport maritime de conteneurs et de la pénurie de boîtes ?
Stéphane Trouillet : Les affréteurs, plutôt que d’immobiliser les conteneurs vides pour rechargement, préfèrent les faire partir à vide vers la Chine. Cette situation est préjudiciable à nos exportateurs qui utilisent les conteneurs sur les terminaux de Chalon et Mâcon. À Chalon, des grumes de bois sont habituellement exportées vers la Chine. À l’arrivée, il faut désinfecter le conteneur qui doit donc être immobilisé deux semaines en Chine. Cela n’intéresse plus les acteurs du transport maritime qui préfèrent faire tourner davantage leurs boîtes.
NPI : Quels sont les derniers développements en matière ferroviaire ?
Stéphane Trouillet : À Chalon, Delta Rail a mis en place en 2020 une navette ferroviaire pour les conteneurs à destination de Fos. Le même opérateur a lancé en avril 2021 une navette hebdomadaire avec Le Havre. Le résultat est satisfaisant, avec des taux de remplissage de 80 % à 100 %. Sur Fos, la fréquence est passée à deux trains par semaine et pourrait prochainement être portée à trois trains. Toujours à Chalon, Combronde transporte des conteneurs avec deux trains par semaine pour Fos depuis fin 2020. En juin 2022, une nouvelle liaison sera mise en place par Deutsche Bahn entre Chalon et deux destinations du Nord de l’Europe : un port maritime et une autre destination non-maritime.
Fin 2021, nous lançons les travaux d’extension du terminal ferroviaire de Chalon pour passer de deux à trois voies de chargement et porter de 20 000 à 35 000 m² la plateforme à conteneurs.
À Mâcon, l’autoroute ferroviaire lancée en 2019 par Viia aura échangé 12 000 à 13 000 remorques P400 avec Calais d’ici la fin de l’année, à raison de six trains par semaine. Il s’agit d’une bonne montée en puissance, puisque le nombre de remorques était de 3 000 en 2019 et inférieur à 10 000 en 2020. En revanche, l’arrêt à Mâcon sur l’autoroute ferroviaire entre Calais et Le Boulou a été supprimé, cette escale étant considérée comme non rentable.
NPI : Le ferroviaire connaît-il un essor supérieur au fluvial sur la Saône ?
Stéphane Trouillet : En effet, Pagny connaît un trafic stable qui n’est tourné que vers la voie d’eau, alors que le développement de Chalon et Mâcon est porté bien davantage par le ferroviaire que par le fluvial. Les trafics fluviaux réguliers restent stables, avec par exemple 200 000 t par an de sables et graviers à Chalon. Les exportations de céréales ou les importations de tourteaux via Sète sont confrontées à des difficultés pour trouver des bateaux disponibles. Depuis fin 2020, nous n’avons plus de conteneurs fluviaux à Mâcon, le trafic export de Danone géré par Alainé ayant été réorganisé.
La décarbonation commence à faire son chemin auprès des industriels, mais le train constitue une alternative bien plus souple que le fluvial pour les nouveaux schémas logistiques qui se mettent en place. Les bateaux mettent trois jours à remonter de Fos à Chalon, contre une journée pour le train. Pour les conteneurs, la Saône est limitée à deux couches ce qui obligeait la barge Greenmodal entre Mâcon et Fos à compléter son chargement à Lyon.