Le Covid-19 a provoqué des coupes sombres dans ces résultats. Avec un premier confinement à partir du mois de mars 2020, la crise sanitaire avait frappé à la veille de la période de la plus forte fréquentation, celle qui, en avril et mai, attire des touristes venus du monde entier pour voir les champs de tulipes en pleine floraison du « Keukenhof ».
Dès le début de la crise sanitaire, certains armements avaient d’ailleurs pris la décision d’annuler toutes leurs réservations jusqu’à la fin 2020. Les chiffres sont éloquents : l’année dernière, Amsterdam a accueilli à peine 195 croisières fluviales et aucune maritime. En 2019, leur nombre avait grimpé à 2 282, établissant ainsi un nouveau record après ceux de 2018 (2 007 croisières fluviales malgré 413 annulations surtout dues à la sécheresse) et 2017 (1 946). Le port poursuivait ainsi sur une lancée amorcée en 2012, quand le score annuel avait été de 1 382 escales.
Moins de nuisances reste une priorité
Les mesures avaient été quelque peu assouplies à partir de juin 2020, mais les règles sanitaires en vigueur ont fait que la reprise n’a été que très partielle. En concertation avec les autorités compétentes et en plus des prescriptions d’ordre général quant à la distanciation sociale et aux précautions d’hygiène à prendre, le port avait adopté des mesures spécifiques : le nombre de passagers par bateau avait été limité dans un premier temps à un maximum de trente personnes, l’amarrage côte-à-côte des bateaux avait été interdit pour éviter tout contact entre groupes différents, des couloirs de circulation avaient été délimités sur les jetées et les quais, du personnel veillait au respect des règles édictées, un protocole opérationnel avait été rédigé en collaboration avec l’UENF/EBU.
De plus, face à la multiplication de règles souvent différentes, une application baptisée « Port See » avait été lancée avec d’autres ports fluviaux néerlandais pour fournir aux armements et opérateurs des informations actualisées -port par port - sur les installations accessibles, les procédures à respecter, etc.
Dans un tel contexte, seules des croisières utilisant des bateaux de plus faible capacité et ciblant un marché très spécifique étaient réellement possibles. Il s’agissait plus particulièrement de « croisières cyclistes » où les passagers alternent des temps de navigation et le séjour à bord avec des explorations ou tours à vélo. Ce type de croisières s’adresse à un public plus local et européen (majoritairement des Allemands) alors que le croisiériste « amstellodamois type » est non-européen à 61 %.
Même durant les mois d’été 2020, les 32 postes à quai pour bateaux à passagers que compte Amsterdam sont restés largement sous-utilisés. Le port n’en a pas moins poursuivi ses efforts pour réduire les nuisances causées par les bateaux de croisière, notamment en testant l’utilisation d’une « batterie flottante » pour leur approvisionnement en électricité quand une pointe se produit dans la demande et pour répondre à leur consommation croissante en énergie.
Amsterdam projette, par ailleurs, toujours de rendre la certification « Green Award » obligatoire pour toutes les unités qui veulent venir s’amarrer dans le centre-ville. Plus d’un tiers de la flotte -86 bateaux sur près de 220- répondent déjà aux critères requis et de nombreux armements œuvrent en ce sens. Toutefois, dans le contexte présent, faire les investissements requis est moins évident pour eux, reconnaît Monic Van der Heyden, responsable commercial croisière du port d’Amsterdam.
Au début de l’automne 2020, les Pays-Bas étaient repassés en « code rouge », ce qui s’est traduit par un nouvel arrêt complet des croisières fluviales. Cette paralysie a perduré durant les premiers mois de 2021.
Perte de compétences
La question reste de savoir quand les croisières pourront reprendre. Jusqu’à présent, l’échéance ne cesse de reculer, entraînant de 50 à 70 annulations par semaine au rythme actuel. « Nous espérons que les croisières fluviales pourront redémarrer à partir du mois de mai », indique Monic van der Heyden. Avec encore plus de 1 800 réservations placées par des armements pour des escales de leurs bateaux à passagers, elle n’est manifestement pas la seule à caresser cet espoir. Tout le secteur aspire à pouvoir repartir de l’avant. Mais Hans Boonstra, responsable des ventes et des opérations chez Dutch Cruise Line, reste prudent : « Nous modifions continuellement notre planification, mais il n’est pas encore certain que nous pourrons reprendre en mai ».
Pour l’heure, le secteur a échappé à une vague de faillites. « Mais la situation actuelle ne peut pas durer indéfiniment », souligne Nico Arnts, directeur général de Fijnstra Rijn Lijn, un organisateur de croisières fluviales. Son constat est partagé par Monic Van der Heyden, qui ajoute qu’une des difficultés à résoudre sera de trouver des remplaçants aux nombreux salariés qui ont été contraints de trouver un emploi ailleurs.
Nico Arnts et Monic Van der Heyden sont également d’accord sur un autre point : « Avec les protocoles sanitaires que nous avons mis au point, nous sommes parfaitement capables de reprendre nos activités sans mettre en danger la santé de nos passagers ou de nos équipages. Nous en avons déjà fait la preuve durant l’été passé. Si une reprise doit s’accompagner de mesures de restrictions, qu’il en soit ainsi. Mais les dépistages et les vaccinations devraient tout de même nous donner une plus grande marge de manoeuvre ».