« Le transport fluvial est généralement utilisé pour des lots importants de marchandises, avec rupture de charge, alors que les palettes sont transportées en direct, par petits lots, souligne Yves de Blic, chef de projet au centre de recherche Multitel. Pour une cargaison fluviale de charbon, la traçabilité n’est pas une priorité. Ça le devient quand un bateau transporte un grand nombre de palettes pour plusieurs clients différents : chacun veut savoir quelle palette est à quel endroit, et à bord de quel bateau ou quel camion. C’est le but de la plate-forme que nous proposons ».
Interconnecter les systèmes existants
L’idée de ST4W n’est pas de suivre et de localiser sur une carte chaque palette, mais d’interconnecter différents systèmes existants pour agréger les données concernant chaque évènement intervenu au cours du transport d’une palette : palette scannée, embarquée sur tel bateau etc. La localisation se fait ensuite très simplement, car la position de l’entrepôt ou du quai de chargement est connue, et celle du bateau peut être obtenue facilement.
« Cela nécessite d’harmoniser les données et de les sécuriser afin de pouvoir les partager en choisissant les partenaires à qui nous voulons les confier, précise Yves de Blic. Il faut aussi intégrer dans la plate-forme des informations sur le planning prévu, afin de pouvoir donner l’alerte si les prévisions ne sont pas respectées : horaire non tenu ou erreur de chargement par exemple. Le but final est de pouvoir offrir une visibilité de la marchandise en continu ».
Quelques transports de palettes, en milieu urbain principalement, se font déjà à bord de bateaux fluviaux. Sur la Seine, c’est le cas de transports de matériaux de construction pour le compte de Point P et Raboni. Mais la traçabilité n’étant pas jugée utile pour leurs activités, c’est le projet Fludis de livraison fluviale urbaine dans Paris, qui doit démarrer en septembre 2019, qui a été retenu comme projet pilote pour ST4W.
Des initiatives existent aussi en Belgique pour développer le transport fluvial de palettes, avec, par exemple, les péniches Zulu, de Blue Line Logistics, qui a fait une démonstration de chargement en janvier 2019 au port de Lille. Le projet pilote ST4W s’est fait autour de transports réalisés par Blue Line Logistics pour le compte de Roosens Bétons, avec la livraison de matériaux au groupe Gobert, à Bruxelles. « Nous avons vu que nous pouvions interconnecter les plannings de ces opérateurs, ainsi que le suivi du bateau avec les outils SIF, en France comme en Belgique, résume Yves de Blic. La deuxième partie de ce projet pilote consistera à s’adapter à des trajets plus complexes, avec des arrêts à plusieurs quais pour le chargeur comme pour son client, et même avec plusieurs chargeurs à bord du même bateau ».
Maîtrise du partage des données
La plate-forme en ligne ST4W est basée sur la norme GS1, qui permet à chaque acteur d’être maître de ses données et de choisir avec qui les partager. « Dès qu’il y a davantage que deux acteurs fonctionnant en boucle fermée, ce qui est toujours le cas dans les activités logistiques, il est important que la traçabilité repose sur une norme, qui constitue le langage commun assurant que les différentes sociétés travaillant ensemble comprennent et interprètent les données de la même façon », explique Nicolas Pauvre, chef de projet traçabilité à GS1 France.
Au-delà des transports de palettes, l’utilisation de la plate-forme ST4W peut être étendue à d’autres types de marchandises diverses comme les big bags ou encore les conteneurs. Seul le vrac ne peut être concerné par ce système de traçabilité. Des contacts sont pris par Multitel pour un troisième projet pilote, qui se déroulerait en Allemagne avec des transports d’engrais en big bags.