Le confinement sur le modèle italien et espagnol est entré en vigueur en France à midi le 17 mars 2020 pour 15 jours. Cette durée pourrait être prolongée en fonction de l’évolution de l’épidémie.
Annoncé par le président de la République dans une deuxième allocution sur l’épidémie le 16 mars 2020 à 20 heures après celle du 12 mars, le confinement a été précisé un peu plus tard dans la soirée par Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur : « On pourra toujours sortir son chien » ou « prendre l’air », mais « la consigne générale est simple : restez chez vous. Et renoncez aux déplacements de loisirs, aux dîners entre amis et familles, au pique-nique dans un parc. C'est interdit. Il s'agit de sauver des vies, y compris la vôtre comme celle de vos proches ».
À partir du 17 mars à midi afin de limiter les contacts et réduire les déplacements au maximum, « partout sur le territoire français », « seuls doivent demeurer les trajets nécessaires ». Ceux-ci sont ceux pour aller faire des courses alimentaires, pour aller travailler s’il n’y a pas de solution pour le faire à distance, pour se rendre chez le médecin, à l’hôpital ou à la pharmacie, pour des besoins familiaux impérieux. Sur ce dernier point, il s’agit de l’aide à un proche dépendant ou vulnérable, pour les enfants en garde alternée.
Chacun doit être muni d’une attestation sur l’honneur avec la raison de sa sortie (modèle en ligne sur www.interieur.gouv.fr) qui peut être imprimée ou simplement transcrite à la main. Il y aura des contrôles, y compris des piétons, avec 100 000 policiers et gendarmes mobilisés en France, pour des points de contrôle fixes et mobiles. La « violation de ses règles sera sanctionnée par une amende de 38 euros » qui pourra être portée à 135 euros.
Il faut limiter le nombre de personnes avec lesquelles chacun est en contact chaque jour, continuer à respecter les gestes barrière et les consignes sanitaires. Selon le ministre de la Santé, Olivier Véran, dans une vidéo du 16 mars, il faut limiter les contacts à 5 par jour, « c’est-à-dire que si vous allez faire des courses alimentaires, vous ne faites rien d’autre ».
Sur le plan politique, Emmanuel Macron a annoncé « que toutes les réformes en cours seraient suspendues, à commencer par la réforme des retraites ». Il s’agit de faire en sorte que « toute l'action du gouvernement et du Parlement » soit « tournée vers le combat contre l'épidémie ». Concrètement, « un projet de loi permettant au gouvernement de répondre à l’urgence et, lorsque nécessaire, de légiférer par ordonnances dans les domaines relevant strictement de la gestion de crise. Ce projet sera soumis au Parlement ».
Des mesures de soutien économique
Les 12 et 16 mars 2020, le président de la République a consacré une partie de ses allocutions aux conséquences économiques de l’épidémie et aux mesures de soutien aux entreprises. Le 16 mars, il a indiqué : « Nous sommes en guerre. J’appelle tous les acteurs politiques, économiques, sociaux, associatifs, tous les Français à s’inscrire dans cette union nationale qui a permis à notre pays de surmonter tant de crises par le passé. Vous l'aurez compris, vous le pressentiez, cette crise sanitaire sans précédent aura des conséquences humaines, sociales et économiques majeures. C’est aussi ce défi que nous devons mener. Je vous demande des sacrifices pour ralentir l’épidémie. Jamais ils ne doivent mettre en cause l’aide aux plus fragiles, la pérennité d’une entreprise, les moyens de subsistance des salariés comme des indépendants.
Pour la vie économique, pour ce qui concerne la France, aucune entreprise, quelle que soit sa taille, ne sera livrée au risque de faillite. Aucune Française, aucun Français, ne sera laissé sans ressources. S’agissant des entreprises, nous mettons en place un dispositif exceptionnel de report de charges fiscales et sociales, de soutien au report d’échéances bancaires et de garanties de l’Etat à hauteur de 300 milliards d’euros pour tous les prêts bancaires contractés auprès des banques. Pour les plus petites d’entre elles et tant que la situation durera, celles qui font face à des difficultés n’auront rien à débourser, ni pour les impôts, ni pour les cotisations sociales. Les factures d’eau, de gaz ou d’électricité ainsi que les loyers devront être suspendus ».
Brune Le Maire, ministre de l'Économie et des Finances, a donné des chiffres le 17 mars 2020 sur la radio RTL où il était invité : 45 milliards d'euros d'aides immédiates pour les entreprises et les salariés, 300 milliards d'euros de garanties de l'État pour les prêts bancaires, 1 000 milliards d'euros de garanties de l'Union européenne pour les prêts bancaires. La volonté est de « rebondir rapidement » et, pour cela, « il faut prendre les bonnes décisions maintenant » et aider les entreprises à ne pas faire faillite.
Un fonds de solidarité alimenté en premier lieu par l'État et les régions est mis en place pour les PME « qui souffrent ». Concrètement, une indemnité forfaitaire de 1 500 euros sera versée aux entreprises enregistrant une baisse de chiffre d’affaires d'au moins 70 %. La fréquence de ce versement doit encore être déterminée.
Bruno Le Maire a indiqué : les charges sociales et fiscales du mois de mars seront reportées, voire annulées pour les entreprises menacées de faillite et dans l'incapacité, sur le long terme, de payer. Cela se fera « au cas par cas ».
Par ailleurs, l'État et la Banque de France interviendront auprès des banques privées pour que les crédits bancaires soient rééchelonnés. Les clients de BPIFrance pourront également bénéficier, « sur demande motivée par le contexte », d'un réaménagement de leur dette pour les crédits de moyen et long terme.
Une année en récession
Bruno Le Maire a également précisé que l’année 2020 sera marquée par « une récession » en France. Un propos qui fait suite à une déclaration similaire du Commissaire européen en charge du marché intérieur Thierry Breton le 16 mars sur BFM Business : « Avant la crise, on était aux alentours de 1,4 % sur l'ensemble du continent. Et là, on pense que l'on va avoir un impact entre 2 et 2,5 %, soit une récession de l'ordre de 1 % au niveau de l’UE. La priorité c'est d'accompagner les entreprises et leur permettre de faire face à leur échéances de liquidités ». Il a estimé que les plans de soutien annoncés par les différents Etats-membres de l'UE n'y suffiront pas : « Quels que soient les problèmes de trésorerie que les entreprises rencontrent de façon passagère, il faut que les banques jouent leur rôle ».
A noter, le 13 mars, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a garanti une « flexibilité maximale » dans l'application des règles communautaires sur les déficits et sur les aides d'Etat.
Les mesures détaillées par Bruno Le Maire le 17 mars s'ajoutent à celles déjà annoncées et prises les jours précédents et qui sont détaillées au fur-et-mesure notamment par le ministère de l’Economie :
-« Des délais de paiement d’échéances sociales et/ou fiscales (URSSAF, impôts),
-Dans les situations les plus difficiles, des remises d’impôts directs pouvant être décidées dans le cadre d'un examen individualisé des demandes,
-Un soutien de l’État et de la Banque de France (médiation du crédit) pour négocier avec sa banque un rééchelonnement des crédits bancaires,
-La mobilisation de Bpifrance pour garantir des lignes de trésorerie bancaires dont les entreprises pourraient avoir besoin à cause de l’épidémie,
-Le maintien de l'emploi dans les entreprises par le dispositif de chômage partiel simplifié et renforcé,
-L’appui au traitement d’un conflit avec des clients ou fournisseurs par le médiateur des entreprises,
-La reconnaissance par l’État du coronavirus comme un cas de force majeure pour ses marchés publics. En conséquence, pour tous les marchés publics d’État, les pénalités de retards ne seront pas appliquées ».
« C’est zéro licenciement »
De son côté, la ministre du Travail Muriel Pénicaud a annoncé le 16 mars lors d'une conférence téléphonique avec les partenaires sociaux, côté patronales et syndicales, l’interdiction de licencier durant la période de crise sanitaire, a rapporté le quotidien Les Echos. « Pendant la période actuelle, c'est zéro licenciement », a-t-elle insisté auprès des leaders des organisations patronales et syndicales, écrit le quotidien rapportant un témoignage d’un participant à cette réunion téléphonique : « La ministre a été extrêmement ferme. Elle nous a sollicités pour faire remonter les informations localement aux Direccte et, pour les plus grandes entreprises, directement à son cabinet » en cas de projet de licenciement. La période de crise sanitaire a commencé le 15 mars avec les fermetures des commerces non indispensables.
Des mesures nécessaires à long terme
Dans son discours du 12 mars, le président de la République avait indiqué : « L'épreuve que nous traversons exige une mobilisation générale sur le plan économique. (…) Nous n'ajouterons pas aux difficultés sanitaires la peur de la faillite pour les entrepreneurs, l'angoisse du chômage et des fins de mois difficiles pour les salariés. Aussi, tout sera mis en œuvre pour protéger nos salariés et pour protéger nos entreprises quoi qu'il en coûte (…). Je veux que nous puissions préserver les emplois et les compétences, c'est-à-dire faire en sorte que les salariés puissent rester dans l'entreprise, même s'ils sont obligés de rester à la maison, et que nous les payions. Je veux que nous puissions protéger aussi nos indépendants. Nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour donner cette garantie sur le plan économique. (…). Je veux, pour nos forces économiques, des mesures simples. Nous défendrons nos entreprises de toutes tailles. Nous défendrons l'ensemble des travailleurs et des travailleuses. En parallèle, j'ai demandé au gouvernement de préparer d'ores et déjà un plan de relance national et européen cohérent avec nos priorités et nos engagements pour l'avenir ».
De son côté, au-delà des mesures d’urgence, le Medef plaide « pour des actions structurelles de long terme destinées à rendre l’outil productif plus compétitif. Le pacte productif annoncé par le gouvernement doit être accéléré et amplifié pour tenir compte de la situation exceptionnelle que nous traversons aujourd’hui et soutenir sur le long terme la production en France. Assurer la continuité économique, c’est soutenir notre capacité nationale de rebond car les entreprises sont les principales contributrices à la croissance, à l’emploi et aux finances publiques. La France doit agir vite, fort et en anticipation. Juguler l’épidémie est une urgence absolue. Sauver l’emploi et donc, nos entreprises, sera déterminant dans la gestion et la sortie de crise ».
Le passage au stade 3 du dispositif de gestion de l’épidémie de Covid-19/coronavirus a été annoncé le 14 mars 2020. Ce stade 3 est celui de l’épidémie déclarée : le virus circule et il est transmissible sur l’ensemble du territoire. Il ne s’agit plus d’une stratégie d’endiguement comme lors du stade 2 de l’épidémie pendant laquelle il s’agissait de freiner la propagation du virus.
Le passage au stade 3 ne signifie pas une dangerosité accrue du virus mais une nouvelle gestion de l’épidémie avec la mobilisation complète du système sanitaire hospitalier et de ville. Le stade 3 renforcent des mesures déjà existantes et/ou préconisées comme la limitation des déplacements, le télétravail pour le plus grand nombre possible de salariés. Il entraîne la fermeture des établissements recevant du public et non-indispensables à la vie du pays. Les commerces « indispensables » restent ouverts : pharmacies, alimentation, banques, bureaux de tabac et de presse, stations-essence. Un arrêté du 15 mars 2020 complétant l’arrêté du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19 fournit la liste des magasins autorisés à rester ouvert (voir : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041723302&categorieLien=id)
Pour rappel, la fermeture de tous les établissements scolaires de tous les niveaux ainsi que des crèches avait été annoncée le 12 mars par le président de la République et est en entré en œuvre le 16 mars. A noter que le ministère du Travail a publié le 15 mars un document précisant les règles applicables aux centres de formations des apprentis et autres organismes de formation qui suspendent eux aussi l’accueil en formation « jusqu’à nouvel ordre ».
Le stade 4 marquera le retour à une situation normale et non pas une nouvelle aggravation de la situation.