«Après le baccalauréat, j’ai été à la faculté d’Orsay où j’ai obtenu une maîtrise d’optométrie qui conduit à tous les métiers en lien avec la santé de l’œil et du système visuel. J’ai travaillé à Paris, à Lausanne, à Genève, puis je suis revenu en France pour devenir directeur d’un magasin d’optique », raconte Didier Gilliot. La crise économique est survenue, transformant le quotidien de ce professionnel de santé en journée passée à réaliser du recouvrement auprès des complémentaires santé avec le tiers payant devenu systématique pour le règlement de lunettes (9 ventes sur 10).
« Mes parents habitaient près de la Seine en région parisienne et je voyais passer les bateaux. Je me suis demandé quel était ce métier, pourquoi pas moi ? ». Renseignements pris, il apprend que deux écoles peuvent lui permettre de devenir batelier. « J’ai choisi le CFANI à Tremblay car la formation est diplômante à la différence du Cnam à Elboeuf ». Didier Gilliot est licencié économique, s’inscrit à Pôle Emploi ce qui va lui permettre de se lancer dans une reconversion. « Je repartais de zéro. Je devais obtenir le CAP en 1 an dans le cadre d’un contrat de professionnalisation et trouver une entreprise qui accepte de me former. J’ai été pris à la CLT sur la Loire, je naviguais sur une barge qui transportait du charbon ».
Il se souvient de ses débuts au CFANI : « Les premiers jours, mes camarades me prenaient pour un professeur à cause de la différence d’âge, j’avais 40 ans et eux plus de deux fois moins. Et bien non, j’étais comme eux. Une fois passé l’étonnement, ils m’ont bien accepté ».
En quelques mois, Didier Gilliot passe d’un métier scientifique à une profession technique, physique, manuelle : « Cela signifie beaucoup de travail car il faut tout apprendre en 1 an. Il y a beaucoup de qualifications et de certifications à obtenir. Comme je ne viens pas du monde de la batellerie, certains enseignements, le matelotage par exemple, ont été durs au début ». Pour lui, l’un des atouts du CFANI, c’est aussi le bateau-école.
Motivation et volonté
A l’issue de sa formation, ayant obtenu son CAP et tous les brevets ou qualifications nécessaires, la CFT a embauché Didier Gilliot en CDI. Il est aujourd’hui matelot timonier sur une unité (barge/pousseur) de 180m sur la Seine.
« Je voulais vivre dehors. C’est un beau métier, il n’y a pas de routine. Les conditions de navigation changent, les vents, les situations, il y a de la diversité d’un jour à l’autre », conclut Didier Gilliot.
« Mon métier, avant, c’était pâtissier-chocolatier puis j’ai eu un accident et j’ai dû réfléchir à une reconversion, se souvient Johan Devaux. Mon cousin travaille chez CFT Rhône. Mes parents étaient mariniers. A la mort de mon père, ma mère a vendu le bateau, j’avais 14 ans. C’est donc un milieu que je connaissais ».
Pour lui aussi, la solution est un contrat de professionnalisation pour obtenir le CAP en 1 an compte tenu qu’il avait le baccalauréat et était dispensé des enseignements généraux. L’entreprise qui accepte de le former pendant son année de CAP de septembre 2012 à juillet 2013, c’est la CFT où il suit le rythme habituel de navigation du jeudi au jeudi.
« J’ai été totalement mobilisé pendant la formation. Vous êtes en entreprise puis au CFANI, vous enchaînez. Il faut être motivé et avoir de la volonté. La réussite dépend aussi beaucoup de l’entreprise où vous êtes, la CFT Rhône a fait son maximum. Ça s’est bien passé au CFANI même si les autres élèves avaient l’âge de mes enfants ».
A l’issue de sa formation, Johan Devaux obtient un CDI à la CFT Rhône où il est aujourd’hui second capitaine sur une unité de transport d’hydrocarbures. Pour lui : « Le transport fluvial, la batellerie, ça reste un monde très fermé, peut-être moins aujourd’hui qu’hier. La transmission de père en fils est toujours réelle ». L’un de ses enfants a d’ailleurs choisi la navigation intérieure en suivant le parcours « classique » après la troisième et travaille lui aussi à la CFT Rhône.
Le développement du transport fluvial dépend d’une volonté politique qui, pour le moment, n’est pas là, selon Johann Devaux. Il relève aussi que la situation du CFANI n’est pas facile : « Il y a trop peu de soutiens ou d’aides alors que c’est la seule école qui a formé 80 à 85% des bateliers français ».