La compagnie maritime bretonne Brittany Ferries a présenté, mi-février 2020 avec Ports de Normandie, un projet de liaison ferroviaire entre Cherbourg et Bayonne pour des remorques non accompagnées (non-préhensibles comme préhensibles, caisses mobiles, conteneurs) dont la mise en service pourrait avoir lieu au cours de l’année 2021.
La compagnie maritime deviendrait ainsi opérateur ferroviaire en plus de son activité de ferries dans le contexte d’un trafic des remorques non accompagnées transmanche en progression, d’un Brexit « consommé avec un besoin de renforcer les échanges nord-sud qui s’impose comme une évidence ». Il s’agit aussi d’anticiper les contraintes règlementaires en matière de réduction des émissions liées au transport, de réduire les externalités négatives, de rechercher des complémentarités entre les modes de transports. La liaison doit permettre de relier l’Espagne au Royaume-Uni et à l’Irlande en associant la route, le rail et le maritime.
Ports de Normandie met en avant « des préoccupations environnementales, tout particulièrement concernant la qualité de l’air et la réduction du recours aux énergies fossiles » ainsi que l’augmentation de la taille des navires amenant toujours davantage de remorques à évacuer vers l’hinterland « en mettant en œuvre des services multimodaux pour un acheminement massifié et performant, alternatif et complémentaire à la route ».
Pour le gestionnaire public des ports de Caen-Ouistreham, Cherbourg, Dieppe, le projet correspond à un investissement de 7 millions d’euros, financés par la région Normandie, le département de la Manche, la communauté d’agglomération du Cotentin et l’Union européenne. Il s’agit d’aménager un terminal multimodal à Cherbourg et dont l’emplacement a été choisi pour sa proximité avec les postes rouliers utilisés par les services de ferries transmanche. Le port de Cherbourg dispose d’une connexion ferroviaire existante. Pour Brittany Ferries, « l’ordre de grandeur de l’investissement est supérieur à 30 millions d’euros », comprenant l’acquisition des wagons et la construction du terminal sur un espace disponible au terminal de Mouguerre-Bayonne, déjà embranché fer, pour accueillir des trains de 750 mètres de long qui seront composés de 22 wagons.
Choix des wagons Lohr
L’itinéraire ferroviaire entre Cherbourg et Mouguerre-Bayonne passera dans un premier temps au Sud de Poitiers via Saint-Jean-d’Angély puis par Angoulême ultérieurement, compte tenu de travaux déjà programmés ou encore à confirmer concernant, entre autres, le gabarit de 4 tunnels entre Poitiers et Bordeaux.
Les wagons « Lohr » sont privilégiés par Brittany Ferries : « Ils permettent de charger tout type de remorque routière. Le transport de conteneurs ou de caisses mobiles est envisagé en utilisant des ReachStacker ».
La traction des trains sera faite par des locomotives thermiques entre Cherbourg et Tours puis électrique entre Tours et Bayonne, et, à terme, « bi-modes ». La fréquence du service est prévue de manière quotidienne, avec un départ tous les jours de Cherbourg et de Mougerre, 7 jours sur 7.
Selon Brittany Ferries, le niveau de trafic, à terme, pourrait être de 20 000 à 25 000 UTI par an, sur la base de 336 rotations et 80 camions transportés par jour.
Comme développement à plus long terme, il a été évoqué la possibilité d’une liaison ferroviaire au départ de Mouguerre-Bayonne à destination du port de Sète qui conduit, de son côté, un projet de plate-forme de ferroutage, ce qui permettrait de relier le Royaume-Uni et l’Irlande à la Méditerranée via Cherbourg.
Selon un communiqué des Ports de Normandie daté du 17 janvier 2020, pour le trafic marchandises, les lignes transmanche progressent de 3,54 % en tonnage et de 4,19 % en nombre de poids lourds.
La progression est de +1,41 % avec le Royaume-Uni (+1,28 % en nombre de poids lourds. Les trafics transmanche avec le Royaume-Uni progressent en tonnage de 3,11 % à Caen-Ouistreham, de 3,33 % à Cherbourg mais reculent de 2,57 % à Dieppe. Les trafics avec l’Irlande progressent sensiblement en tonnage : + 13,62 % (+19,25 % en nombre de poids lourds). « Cette augmentation résulte de la mise en service du W.B. Yeats et de l’évolution positive de l’activité non-accompagnée. Le trafic de Stena Line reste globalement stable ».
Le trafic conventionnel connait une dynamique positive avec une croissance de 1,31 % et s’établit à 918 000 tonnes. Cela est due à la forte augmentation des déchargements de granulats à Dieppe (+140 000 tonnes) qui fait plus que compenser le recul de 130 000 tonnes des exports de céréales à Caen à cause des travaux d’embectage et aux désordres constatés sur l’écluse ouest. Les trafics de niche à forte valeur ajoutée ont contribué aux bons résultats : bois (+62 %),bentonite (+34,37 %), à Caen-Ouistreham, les colis exceptionnels (transformateurs, hydroliennes...) à Caen- Ouistreham et Cherbourg.