Avec la crise du Covid-19 et la fermeture de nombreuses entreprises et entrepôts, un grand nombre de conteneurs parviennent jusqu’aux ports intérieurs, mais ne poursuivent pas leur trajet vers leur destination finale. Les lignes fluviales de transport de conteneurs n’étant pas interrompues, les boîtes importées sont en effet évacuées rapidement des terminaux maritimes, où les droits de stationnement sont plus élevés et les délais de franchise plus courts que sur les terminaux intérieurs. Mais cette situation peut conduire à un engorgement des terminaux intérieurs, dont les capacités de stockage de conteneurs ne sont pas extensibles à l’infini.
Afin de se prémunir contre toute congestion, les terminaux à conteneurs du port de Strasbourg ont ainsi décidé de favoriser le transfert de conteneurs vers Lauterbourg, dont l’exploitation a récemment été confiée à un nouvel opérateur. Ce terminal offre une capacité de stockage de 1 700 EVP et est également desservi par le rail avec deux voies de 400 mètres. Puisqu’il est situé en aval de Strasbourg, son accès fluvial n’est pas limité par les écluses du Rhin supérieur, dont les horaires de fonctionnement ont été réduits le temps de la crise du Covid-19.
Anticiper une saturation
« Pendant les quelques premières semaines du confinement, nous avons eu à Strasbourg une chute très forte des enlèvements de conteneurs pleins par les transporteurs routiers, mais avec une baisse du trafic fluvial et ferroviaire de conteneurs qui est restée mesurée, de l’ordre de 10% seulement, les ports maritimes continuant à envoyer les conteneurs vers l’arrière-pays alors qu’il n’y a plus d’entreprises en bout de chaîne pour procéder au dépotage », explique Jean-Louis Jérôme, directeur du Port autonome de Strasbourg et président de Rhine Europe Terminal (RET), filiale du PAS qui exploite les deux terminaux à conteneurs de Strasbourg ainsi que celui de Lauterbourg.
Au cours du mois d’avril, la situation a évolué, avec une diminution de l’ordre de 20% du trafic fluvial de conteneurs selon le port de Strasbourg et, en fin de mois, une petite reprise des enlèvements routiers ou des expéditions de la part d’entreprises qui reprennent leur activité. En organisant le transfert d’un certain nombre de boîtes vers le terminal de Lauterbourg, RET veut anticiper sur une éventuelle saturation des terminaux strasbourgeois, mais également éviter des files de camions à Strasbourg lors de la reprise de l’activité économique qui amènera toutes les entreprises à venir chercher en même temps leurs conteneurs. Les terminaux Sud et Nord du port de Strasbourg, qui affichent une capacité maximale théorique de 3 000 conteneurs, avaient atteint mi-avril un taux de remplissage de 65%.
Faire connaître Lauterbourg
Situé à une soixantaine de kilomètres au nord de Strasbourg, le terminal de Lauterbourg est surtout utilisé, jusqu’à présent, pour des chargements de colis encombrants : il a totalisé une centaine d’opérations en 2019 pour un tonnage total de 7 000 tonnes. Un seul bateau de conteneurs y a été traité en 2019. Le port de Strasbourg qui, via sa filiale RET, exploite ce terminal à conteneurs jusqu’à la prise de fonction du nouvel exploitant, au cours du dernier trimestre 2020, veut mettre ce dispositif de transfert en place pour soulager les terminaux strasbourgeois, mais aussi pour faire connaître cet outil portuaire du nord de l’Alsace, très bien placé également pour desservir les États allemands de Rhénanie-Palatinat et Bade-Wurtemberg. Le port met à disposition la plateforme, reste aux chargeurs et aux transporteurs à s’organiser, si possible en ayant recours au transport fluvial entre Strasbourg et Lauterbourg, voire à router dès le départ les conteneurs vers le nouveau terminal alsacien.
« Nous avons voulu avertir les transporteurs fluviaux et leurs clients que si la situation se prolongeait nous aurions un problème à Strasbourg, déclare Jean-Louis Jérôme. C’est pourquoi nous mettons l’accent sur le terminal de Lauterbourg, qui n’est pas connu. Depuis Rotterdam, les bargeurs peuvent directement mettre le cap sur ce terminal pour desservir l’Alsace et le sud de l’Allemagne. Et quand ils auront pris l’habitude de passer par Lauterbourg, ils en feront peut-être une escale sur leurs lignes régulières. »