L’industrie implantée dans la zone portuaire de Rotterdam et Moerdijk a produit en 2017 pour 33,1 millions de tonnes d’émissions de CO2, dont 10,7 Mt provenaient des centrales électriques au charbon et 8,5 Mt des raffineries pétrolières. Cela représente près de 20 % du total pour l’ensemble des Pays-Bas. A cela s’ajoutent les émissions de CO2 dues au transport, qu’il faudra lui aussi décarboniser. Rotterdam a donc une responsabilité majeure à assumer dans les efforts que doit faire tout le pays pour réduire son empreinte écologique.
Mais peu de ports sont déjà allés aussi loin dans la formulation d’une stratégie de transition. Rotterdam affiche clairement ses ambitions : « Nous voulons aligner notre port sur les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat ». La première étape doit consister en une réduction de 49 %, « et de préférence de 55 % », des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 en comparaison avec 1990. D’ici 2050, ce pourcentage devra être porté à 95 %.
Transition ne rime pas avec rupture
Montrer l’exemple peut permettre à Rotterdam de renforcer sa position, explique l’autorité portuaire. « C’est possible si l’on ne considère pas la transition énergétique comme la fin d’une ère industrielle mais comme le début d’une nouvelle économie durable ». Transition ne doit donc pas nécessairement rimer avec rupture. Le passage à l’économie durable et circulaire doit se faire par phases, sans tarder ni précipiter les choses mais en facilitant et en accélérant progressivement le processus.
Dans une telle optique, la présence d’un tissu industriel très dense avec l’expertise présente, sa taille critique, etc., peut servir de levier et se révéler être un atout plutôt qu’un handicap, à condition de mettre en œuvre « une approche commune qui englobe toute la zone portuaire ». Coopération et concertation sont des mots-clés dans la stratégie de Rotterdam. Car « aucune entreprise ou organisation n’est capable à elle seule de répondre au défi ».
Des dizaines de chantiers
Des dizaines de projets-pilotes ont été lancés et se trouvent à différents stades de développement. Par exemple, passage à la biomasse pour les centrales au charbon, électrification pour les navires et bateaux à quai, énergies alternatives et renouvelables, efficacité énergétique accrue, technologies nouvelles comme le captage et le stockage de CO2 dans d’anciens gisements gaziers sous la mer du Nord, soutien aux industries innovantes, récupération et réutilisation de flux résiduels, infrastructures nécessaires… de très nombreux chantiers sont ouverts.
Parmi les initiatives les plus récentes figurent la recherche sur la production par électrolyse d’hydrogène « vert » au moyen d’énergie renouvelable, dont un volume considérable sera requis, la réalisation d’une installation « waste to chemicals » qui transforme déchets et plastiques usés en nouvelles matières premières pour l’industrie, l’installation d’éoliennes plus performantes, la création d’un parc flottant de panneaux solaires d’une centaine d’hectares sur un dépôt de sédiments pollués à la Maasvlakte à l’horizon 2022-2023, ou la connexion d’un quartier de Rotterdam à un réseau qui permet de réchauffer 16 000 foyers avec la chaleur résiduelle d’une raffinerie, ce qui remplace le gaz naturel et permet d’économiser 35 000 tonnes de CO2. Dans chacun des cas cités, l’Autorité portuaire coopère avec un ou plusieurs partenaires industriels.
Réduire l’empreinte écologique du port passe parfois aussi par des mesures ne nécessitant pas de grands investissements, comme la meilleure planification des escales de navires, qui peuvent ainsi adapter leur vitesse et éviter d’avoir à attendre au large que leur poste à quai se libère.