Pour Lineas, le transfert modal est une raison d’être

Article réservé aux abonnés

Lineas est devenu un acteur de tout premier plan dans le transport de marchandises par le rail. Le « plus grand opérateur privé de fret ferroviaire en Europe » est prêt à franchir de nouvelles étapes dans son développement.

Sous l’égide de Geert Pauwels, aux commandes depuis 2009, l’ancienne division, puis filiale, de la société ferroviaire belge SNCB, a subi une transformation radicale au cours des dix dernières années. Une restructuration en profondeur a remis la compagnie sur les rails au niveau financier. Sur le plan opérationnel, un cap important a été franchi en 2014 avec le lancement du « Green Xpress Network » (GXN), qui a fait de Lineas un acteur de plus en plus présent à l’international, qui dispose aujourd’hui de filiales en France, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Italie, en Espagne. Tout cela s’est accompagné d’une privatisation en 2015 qui a fait entrer dans l’actionnariat le groupe d’investissement Argos Wityu. Celui-ci détient aujourd’hui, avec la direction, 90 % du capital, les 10 % restants étant toujours aux mains de la SNCB. Pour marquer sa mutation, l’ancienne B-Logistics a adopté en 2017 le nom et la nouvelle livrée de Lineas.

Cette compagnie a fait du transfert modal, dans le cadre de solutions porte-à-porte, son cheval de bataille. L’opérateur belge joue dans ce contexte sur le triple tableau de l’intermodal, des wagons isolés et des trains complets. Pour le pdg de Lineas, Geert Pauwels : « L’objectif de notre entreprise est d’offrir des produits et services ferroviaires d’une qualité telle que ses clients se décident à transférer leurs marchandises de la route vers le rail. Ceci permet non seulement d’améliorer leur chaîne d’approvisionnement, mais aussi de réduire les conséquences négatives sur le climat, la mobilité et la pollution. Nous allons continuer à nous focaliser sur le transfert modal ». Le pdg de Lineas a fait preuve du même volontarisme lors de la remise de l’European Railway Award (voir photo), en appelant à saisir l’opportunité du « Green Deal » européen pour réinventer le rail et remettre en question le statu quo dans les transports.

Connexion avec la Chine

Le produit phare de la compagnie est le « Green Xpress Network » (GXN), qui comprend, à l’heure actuelle, vingt connexions à haute fréquence entre la Belgique et différents hubs européens. Ces trains combinent différents types de cargaison. Cela permet d’associer les avantages liés aux trains complets (la régularité, la rapidité et le suivi personnalisé) à la flexibilité sur les volumes offerte par les réseaux en wagons isolés, affirme la compagnie. De plus, en associant du conventionnel et de l’intermodal (conteneurs ou caisses mobiles) dans les mêmes trains, le groupe peut augmenter les fréquences de rotation et améliorer sa couverture européenne. Le nombre de wagons transportés sur ce réseau a crû de 90 % entre 2017 et 2019, aidé par le lancement de nouvelles liaisons.

Avec une croissance globale stable « d’environ 10 % par an », Lineas se dit prêt à poursuivre son expansion. Pour la soutenir, le groupe a restructuré sa direction, avec l’entrée toute récente d’un nouveau directeur des opérations, Kurt Coffyn, et d’un nouveau directeur commercial, Lars Redeligx. Tous deux ont fait leurs preuves dans de grands groupes industriels pour le premier, logistiques pour le second.

Une nouveau trafic régulier sur la Pologne a été lancé en février 2020, de même qu’une liaison directe entre Anvers, plaque tournante principale dans le réseau de Lineas, et Duisbourg qui permet une connexion avec la Chine.

La France n’est pas oubliée. Le groupe y a développé son champ d’action vers Lyon et Mulhouse, notamment en se dotant d’un nouveau hub à Langres. L’activité dans l’Hexagone s’appuie sur quatre piliers majeurs : la sidérurgie, les céréales, la construction et la chimie. « Nous continuons à développer ces marchés. Nos tonnages ont augmenté l’année dernière de 24 % et 40 % de tonnes-kilomètres supplémentaires sont venus s’ajouter à nos prestations de transport. Nous faisons circuler plus de deux mille trains par mois sur le réseau français. Au total, Lineas Group parcourt en moyenne 400 000 kilomètres et transporte 2,1 millions de tonnes de marchandises par mois en France ».

C’est dire que les grèves de la fin de l’année 2019 ont eu des conséquences importantes sur les opérations du groupe belge. « C’est tout le secteur ferroviaire qui a été durement touché, y compris nos clients. Cela nuit considérablement à notre volonté de transfert modal et de verdissement. Nos trains permettent de supprimer l’équivalent de 80 500 trajets de poids lourds par mois et d’éviter 132 000 tonnes d’émissions de CO2 ».

Lever les freins structurels

Lineas aimerait aussi voir disparaître les freins structurels à l’essor du mode ferroviaire. Le plus grand opérateur de fret ferroviaire belge est l’une des chevilles ouvrières du Belgian Rail Freight Forum, au sein duquel des entreprises du secteur ont développé un plan d’action visant à doubler le volume de marchandises sur le rail. « Faire circuler un train en Belgique devrait être aussi facile qu’assurer un transport en camion ». C’est plus vite dit que fait.

Les membres de ce Forum reprochent à Infrabel, le gestionnaire du réseau ferré belge, d’être trop peu attentif à leurs besoins. Selon le réprésentant du Forum, Paul Hegge : « Aujourd’hui, Infrabel s’occupe principalement de l’entretien des voies. Mais la gestion des flux ferroviaires est au moins aussi importante. Il faudrait notamment des vagues vertes comme celles qui existent déjà sur les routes et qui évitent les attentes inutiles aux feux rouges ». Une meilleure planification et communication des chantiers sur le réseau, avec suffisamment d’itinéraires alternatifs, de même qu’une optimisation de la capacité du réseau grâce à une surveillance intelligente des trains en temps réel, et un nouveau contrat de gestion « plus orientée sur les clients », figurent en bonne place des revendications du secteur.

Le Forum a également plaidé en faveur d’une aide à l’investissement et d’un « chèque de transbordement » pour favoriser le transfert modal. Un budget de 30 millions d’euros suffirait, selon lui, pour désengorger les routes de 750 000 poids lourds. Mais l’impasse politique dans laquelle se trouve aujourd’hui la Belgique au niveau fédéral n’a pas encore permis d’obtenir gain de cause sur ces points.

Au niveau européen, Lineas fait partie des fondateurs de la Rail Freight Forward Coalition, qui s’est renforcée de dix nouveaux membres en 2019. Le message est là aussi le même : il faut stimuler le rail -doubler ses volumes et porter sa part modale à 30 % d’ici 2030- pour aider l’Europe à atteindre ses objectifs climatiques. Cela demande des conditions équitables de concurrence entre le rail et la route, une harmonisation des procédures et des réglementations au niveau de l’Union européenne, etc. Le message a été véhiculé par le « Train de Noé ». Le bilan pour 2019 se solde provisoirement par « la création d’une coalition de volontés à l’échelle européenne, une première pour l’Europe ».

À la une

Dossier

Actualité

Infrastructures

Boutique
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15