L'échéance approche. Depuis l'annonce de l'entrée en vigueur au 1er janvier 2020 de la règlementation sur les carburants à faible niveau de soufre, les doutes et les hypothèses continuent d'aller bon train. Quels impacts « l’OMI 2020 » va-t-il avoir sur le secteur ? Comment les armateurs vont-ils réagir ?
Pour Paul Tourret, le directeur de l'Isemar, qui s'adressait en novembre 2019 à Marseille aux membres du Propeller Club : « Il reste deux mois aux armateurs pour choisir ». Pour se préparer aux nouvelles contraintes environnementales, certains acteurs mondiaux du secteur ont déjà commencé à prendre des mesures. Selon lui, la décarbonisation représente un véritable défi. Quatre solutions s'offrent aujourd'hui aux armateurs, rappelle-t-il. Ils peuvent avoir recours au fuel désulfurisé (LFSO), à un fuel lourd plus léger, comme le gasoil marin (MDO), ou un carburant alternatif tel que le gaz naturel liquéfié (GNL) qui présente un avantage pour les particules fines mais pas pour le CO2. Enfin, la dernière alternative est de continuer à utiliser un carburant à haute teneur en soufre. Dans ce cas, ils doivent équiper leurs navires de scrubbers (« épurateurs de fumées », en français).
Les contours du nouveau schéma ont déjà commencé à se dessiner. Selon le dirigeant de l'Isemar : « On rentre dans un zone grise technologique en matière de carburant puisqu'on passe d'une teneur en soufre de 0,5 % à 0,1 %. Le schéma du début 2020 ne sera pas celui de quelques années après ».
Une reconfiguration a commencé
En attendant le 1er janvier 2020, la reconfiguration mondiale en matière de carburant a commencé. Dans le secteur du conteneur, le nombre de navires propulsés au GNL ne s'élève qu'à une centaine. « Ce qui est très peu », juge Paul Tourret pour lequel « il n'y a guère que CMA CGM qui ait marqué son intérêt pour ce type de carburant alternatif » avec ses dernières commandes et ses premières livraisons. « MSC en reste au carburant traditionnel. Quant à l'Allemand Hapag-Lloyd, il semble se poser la question ». Du côté roulier, le dirigeant de l'institut nazairien estime : « On a tendance à ne pas investir ».
Le nombre de scrubbers équipant les cheminées des navires cellularisés représente aujourd'hui dans le monde une centaine de dispositifs. Après avoir évoqué le cas de Neoline et son projet de navires à propulsion vélique (https://www.neoline.eu/), il évoque l'hydrogène, un carburant alternatif mais qui prend dix fois plus de place que le fuel et émet lui aussi du CO2.
En matière de prix, Paul Tourret estime que l'écart entre les 400 USD la tonne fuel lourd (HFO) et les 600 USD la tonne de LSFO, la « bascule » se chiffrera à 200 USD pour un armateur. Il évalue à environ 300 millions de tonnes la consommation mondiale dans l'industrie maritime et indique que certains acteurs du shipping grecs ne croient pas à la nouvelle réglementation.
Côté particules fines, des ports ont déjà déployé des efforts pour les combattre. Tel est le cas, selon lui, de Gênes, Barcelone et Marseille. Et il ajoute : « Rotterdam et Amsterdam sont responsables de 90 % des particules sur les zones côtières aux Pays-Bas ».