« Aux conséquences de la crise du Covid-19, viennent s’ajouter des situations d’étiage sur plusieurs voies navigables et bassins fluviaux européens », alertent les organisations représentants des opérateurs fluviaux (EBU/UENF, ESO/OEB, IWTF), des ports intérieurs (EFIP), des autorités des voies navigables (INE) et des travailleurs (ETF) dans une lettre adressée mi-mai 2020 à la commissaire européenne aux Transports et au secrétaire général de la CCNR.
Ces différentes organisations représentatives basées à Bruxelles demandent donc à la Commission européenne de « préparer rapidement un nouveau et solide programme d’actions Naiades pour la période 2021 à 2027, s’appuyant sur le Green Deal, élément stratégique de l’Union européenne pour stimuler la croissance, l’économie, la création d’emplois, pour accélérer la transition vers une navigation intérieure et des ports intérieurs plus verts et plus intelligents (smart) ».
Etant rappelé que l’actuel Naiades, en place depuis 2014, arrive à échéance cette année 2020 et le processus pour définir le contenu d’un nouveau programme a été enclenché en 2019, avec notamment un rapport du groupe d’experts (voir encadré). Il est encore possible de faire évoluer le futur Naiades, qui serait le troisième, en tenant compte du contexte économique actuel et des défis des transitions écologiques et énergétiques.
Des entreprises en difficulté
Dans le courrier, les organisations rappellent que les acteurs de la navigation intérieure sont déjà engagés dans ces transitions « pour attirer de nouveaux segments de marché et s'adapter au changement climatique, ce qui nécessite beaucoup de flexibilité, de créativité et d'efforts financiers de leur part ».
Et l’épidémie est survenue faisant « s'effondrer en quelques jours le secteur des passagers que soit les excursions journalières ou les croisières et affectant fortement les activités fret ».
A cette situation de crise économique, il s’ajoute une dimension liée au milieu naturel où s’exercent les activités fluviales et des ports : « Des débits exceptionnellement bas sont constatés sur le Bas-Danube, une période de basses eaux se dessine sur le Rhin et l'Elbe. De plus, les précipitations dans la plupart des bassins fluviaux européens ont été limitées en mars-avril 2020. Cela pourrait être un avertissement précoce pour un autre été sec avec des périodes de basses eaux affectant la capacité de chargement du transport par les voies navigables intérieures et réduisant encore les perspectives économiques », alertent les organisations.
Relever le défi du passage à une économie verte
Les organisations demandent donc à la Commission européenne d’intégrer la navigation intérieure et les ports dans le plan de relance post-Covid-19 en lien avec le Green Deal et en utilisant le futur programme Naiades. Elles réclament à Bruxelles de prendre des mesures « fondées sur la demande qui relanceront l'économie sur la base du Green Deal afin que les flux commerciaux et de transport reviennent ».
Pour réussir au niveau européen à relever le défi du retour de la croissance et du passage à une économie verte, pour parvenir à un report modal durable, la navigation intérieure et les ports doivent faire partie des plans de relance post-Covid-19. « Si nous pouvons accroître les investissements et établir des liens intelligents entre la mobilité multimodale durable, les énergies renouvelables, l'économie circulaire et la résilience au climat, nous rendrons ces deux secteurs adaptés à l'avenir et garantirons leur valeur ajoutée si nécessaire pour l'économie et la société européennes ».
Le groupe d’experts auprès de la Commission européenne chargé d’analyser la mise en œuvre de Naiades 2 (2014-2020) et de faire des recommandations pour un nouveau programme correspondant à la période financière pluriannuelle 2021-2027 de l’UE est un organe consultatif composé de représentants des États membres, des pays tiers, des commissions fluviales internationales, des organisations du secteur (EFIP, INE, ETF, EBU/UENF, ESO/OEB…). Ils ont rédigé un rapport diffusé au premier trimestre 2020 après s’être réuni à l’automne 2019. Ce document vient après des positions des ministres des Transports de l’UE en décembre 2018 et des députés du Parlement européen en 2019 invitant la Commission à mettre à jour et à renouveler le programme Naiades pour 2021 à 2027 « pour assurer le potentiel du transport par voies navigables intérieures en tant que mode de transport sûr, durable et efficace dans un système de transport multimodal ».
Selon le rapport, si Naiades 2 n’a pas complétement atteint ses objectifs (il reste encore bien des progrès à faire pour développer la navigation intérieure, mieux l’intégrer, mieux l’utiliser), le programme a toutefois eu le mérite d’exister. Les années 2021-2027 peuvent être la période cruciale pour transformer efficacement le fluvial en un mode de transport neutre, propre, sûr et intelligent pour en faire l'option « incontournable » pour aider à combattre la congestion routière et atteindre les objectifs de dé-carbonisation de l'UE. « Cela nécessite également l'intégration du transport par voies navigables intérieures dans d'autres politiques de l'UE, et pas seulement dans le domaine des transports ».
Pour Naiades 3 sur les années 2021 à 2027, le groupe d’expert préconise deux axes de travail :
• « Mobiliser plus de transport vers les voies navigables intérieures,
• Etablir une navigation intérieure « zéro » émission ».
