NPI : « Tous les ports de l’AFPI poursuivent leurs activités, au moins en partie », qu’est-ce que cela veut dire concrètement ?
AFPI : Ceci signifie que certaines activités jugées essentielles à l’économie du pays ont été maintenues sur les ports, notamment ce qui a trait aux terminaux réceptionnant les trains, les bateaux, les conteneurs. Si des lignes ont été allégées, les trafics ont été maintenus pour assurer l’approvisionnement.
Tous les ports ont néanmoins recours au télétravail, de 5 à 10% de leurs effectifs pour certains, et en presque totalité pour d’autres. C’est notamment le cas pour les ports qui ont filialisé leurs activités opérationnelles ; dans ce cas, les tâches administratives s’accommodent mieux du télétravail que les opérations de manutention sur les terminaux. Ces dernières continuent, dans le strict respect des règles de sécurité, bien sûr.
NPI : Quelle est la situation des conteneurs sur les terminaux intérieurs ?
AFPI : Une ruée a eu lieu dans les premiers jours du confinement mi-mars 2020, qui s’est nettement ralentie par la suite. Il s’agissait essentiellement de conteneurs pleins qui ne pouvaient plus être dépotés car les entreprises étaient à l’arrêt et leurs clients destinataires des marchandises également.
Ceci dit, les coûts facturés par les armements pour la rétention des conteneurs étaient tels que de nombreux chargeurs se sont résolus à dépoter les boîtes pour procéder à du stockage plus classique. De plus, la reprise du travail dans les entreprises chinoises nécessitait aussi de renvoyer en Asie des conteneurs vides pour pouvoir les rempoter à nouveau. Enfin, de grandes entreprises industrielles ont repris leur activité (l’automobile, par exemple), ce qui fait qu’elles ont utilisé les conteneurs qui leur étaient destinés.
NPI : Est-il possible d’évaluer les conséquences économiques et financières pour les ports intérieurs ? Quelles mesures de soutien envisagez-vous de demander ?
AFPI : La facture sera sévère mais il n’y a pas d’évaluation à ce stade, c’est encore trop tôt et les mesures de soutien accordées aux entreprises, notamment pour le paiement des loyers, sont toujours en cours. Il faudra voir aussi dans quel état sortiront les entreprises de cette crise, et nous craignons que certaines ne s’en remettent pas.
Les mesures que nous demanderons viseront surtout à faire en sorte que le cadre dans lequel les ports intérieurs mènent leur activité ne soit pas bouleversé par des décisions nouvelles et précipitées, notamment en matière fiscale (impôt foncier, par exemple) ou sociale (conventions collectives). Enfin, pour certains d’entre nous, des aides directes seront peut-être nécessaires pour contrebalancer des recettes qui ne pourront être faites suite à la défaillance des entreprises.
N’oublions pas que les ports intérieurs sont également des entreprises, qui ont investi et doivent rembourser leurs emprunts, qui doivent payer leur personnel, entretenir leurs locaux et leurs outillages… Tout en étant exemplaires en termes de RSE.
NPI : Quelle raison d’être optimiste pour l’avenir ?
AFPI : Il y a toujours des raisons de rester optimiste. Cette crise montre que notre organisation n’est pas à toute épreuve. Il faut donc faire en sorte d’être mieux préparé et surtout d’éviter que d’autres événements de ce type ne nous mettent à nouveau à l’épreuve. L’urgence climatique est la source de crises potentielles peut-être encore plus graves. Il faut donc s’en prémunir et y travailler sans tarder. Les entreprises vont s’adapter : en matière de gestion des stocks, de sourcing, de méthodes de travail…
Les ports feront en sorte d’accompagner ces mouvements, de les faciliter dans la mesure de leurs moyens. « Résilience » est le nouveau mot à la mode : il faudra le mettre en pratique et concevoir nos systèmes et modes d’organisation pour qu’ils le soient, c’est vital.