Suite à un arrêté du préfet des Yvelines, l’internat (ERPD) de Conflans-Sainte-Honorine est réquisitionné pour l’accueil et l’hébergement d’urgence de 60 personnes sans domicile dans le cadre du confinement. La réquisition a débuté le 15 avril avec l’arrivée des premiers hébergés et va durer jusqu’au 3 mai inclus, précise le texte. Elle inclut les chambres et les espaces de vie situés aux deuxième et troisième étages, la partie gauche du réfectoire, les deux chambres froides, la lingerie et le jardin, soit une grande partie des locaux de l’internat.
L’internat de Conflans accueille, en temps ordinaire, les enfants et les adolescents (filles et garçons) dont les parents exercent une profession non sédentaire, soit les bateliers et les forains, ainsi que ceux dont les parents ont des contraintes professionnelles, déplacements fréquents ou horaires de nuit par exemple. Les enfants sont à l’internat du dimanche soir au vendredi soir. L’ERPD de Conflans a fermé comme tous les autres établissements scolaires en France mi-mars 2020.
Obligations professionnelles des parents
« L’internat pour nos enfants correspond, pour nous leurs parents qui sommes artisans-bateliers, à une obligation professionnelle. Notre activité fait que nous sommes en déplacement constant et nous conduit à confier nos enfants à l’ERPD de Conflans pour leur scolarité en internat », rappelle une adhérente de l’Association familiale de la batellerie (AFB), également représentante des parents d’élèves.
Les différents ERPD de Conflans, Saint-Mammès, Barentin, Douai, sont des établissements qui accueillent des enfants de profession itinérante à cause des obligations professionnelles des parents qui en sont les bénéficiaires de droit. Ils accueillent également des populations d'enfants socialement et scolairement fragiles.
Interrogé par nos confrères du Parisien, le maire de Conflans-Sainte-Honorine a indiqué : « L'accueil des sans-abri ne pose pas de problème puisqu'il intervient dans le cadre de la solidarité nationale. Mais la Ville, tout comme les bateliers, sera vigilante. La reprise des cours et la réouverture des établissements scolaires sont fixées au 11 mai : après le départ des SDF, nous réclamons des opérations de nettoyage et de désinfection des locaux pour que les élèves puissent revenir en toute sécurité. » Il faut rappeler que c’est la présidente de la Région Île-de-France, qui a proposé de mettre à disposition les 9180 lits d’internat des établissements franciliens, inoccupés avec le confinement contre le Covid-19, pour les personnes en situation précaire et l’organisation de soins pour les malades convalescents.
Les particularités de l’internat et du fluvial
La solidarité qu’impose la période de crise sanitaire actuelle vis-à-vis des populations fragiles n’est pas un vain mot pour les parents mais il y a aussi de l’inquiétude face à la perspective d’une rentrée dans des conditions si incertaines sur le plan sanitaire.
L’AFB a donc adressé une lettre aux élus locaux et nationaux ainsi qu’au ministre de l’Éducation nationale pour demander « un report de la rentrée à septembre si les conditions sanitaires ne sont pas garanties et une continuité scolaire numérique qui est nécessaire pour éviter un décrochage scolaire et que ceux qui ont des examens de fin d'année puissent les passer ».
Cette demande de l’AFB s’inscrit dans la suite des nombreuses interrogations qui sont apparues de toute part depuis l’annonce par le président de la République dans son allocution le 13 avril de la réouverture « progressive » des crèches, maternelles et établissements scolaires de tous les niveaux sauf les universités. La reprise de l’école à partir du 11 mai est-elle réellement possible compte tenu, notamment, de la difficulté de faire respecter les « gestes barrière » et la « distanciation sociale » à des enfants de 3 ans ou plus ? Une difficulté qui est décuplée dans le cas des internats où les enfants se côtoient de manière extrêmement proche non seulement dans les salles de classe, cours de récréation, réfectoire mais aussi dans les chambres, les douches et autres lieux (salles d’études, polyvalentes, bibliothèque…). Sans oublier que la plupart d’entre eux se déplacent d’un établissement à l’autre en plus des locaux de l’internat.
Et surtout, et l’on en revient à la spécificité de l’activité des parents artisans-bateliers : si les mesures sanitaires mal respectées à partir du 11 mai dans les ERPD et les internats conduisent à ce que l’un des enfants soit porteur du Covid-19, il serait exclu de l'établissement pour quarantaine. Celle-ci concernerait également sa famille, ce qui signifie un arrêt de l’activité de l’entreprise des parents pour mise en quarantaine. Une situation qui mettrait en péril un grand nombre des PME/TPE du secteur fluvial de marchandises qui doivent déjà faire face pour certaines à un repli de la demande de transport, à des chutes de chiffre d’affaires, à des trésoreries mises à mal…
En attendant une éventuelle réponse des élus ou du Gouvernement, c’est l’inquiétude qui l’emporte chez les parents artisans-bateliers comme chez tous les autres avec la perspective du retour à l’école et à l’internat des enfants dans des conditions encore très floues.