En novembre 2017, le premier train de conteneurs en provenance de Chine à atteindre le territoire français avait pour destination un port intérieur. Parti de Wuhan (centre-est de la Chine), les 41 conteneurs destinés à Decathlon ont mis moins de trois semaines pour atteindre la plate-forme multimodale de Dourges (Pas-de-Calais), alors qu’il en aurait fallu six par la voie maritime traditionnelle. S’intercalant entre les transports maritime et aérien, en termes de coût comme de temps de parcours, l’arrivée de cette « nouvelle route de la Soie », ainsi que la Chine appelle le transport ferroviaire de conteneurs à destination de l’Europe, était une première en France. Le nombre de trains monte en puissance à Dourges, le train destiné à Decathlon ayant été suivi de peu par un autre opéré par Gefco pour le compte de PSA. L’intention affichée à Dourges est de passer d’un train par mois en 2018 à un train par semaine en 2019.
Si le transport de conteneurs en provenance de Chine est plus rapide que le maritime, il est cependant confronté aux mêmes problèmes que celui-ci : l’absence de fret retour, qui oblige à transporter des conteneurs vides. Une problématique accentuée par le fait que la France exporte surtout vers la Chine des produits agricoles, denrées qui ne nécessitent pas des transports rapides et ne permettent pas de justifier le surcoût du ferroviaire.
Il en est autrement en Allemagne, puisque ce pays fait figure, depuis plusieurs années, de destination privilégiée des trains en provenance de Chine.
Duisbourg, tête de pont
La géographie y est pour beaucoup, mais la nature des exportations allemandes joue aussi son rôle. Principale tête de pont européenne de cette nouvelle route de la Soie : le port rhénan de Duisbourg. En 2018, Duisburg Intermodal Terminal (DIT) a accueilli 800 trains en provenance de Chine, soit, en moyenne, 30 trains par semaine dans chaque sens.
« Avec nos trains intercontinentaux, nous arrivons à un total de 90 trains par semaine, ce qui signifie qu’un tiers des trains ont une connexion avec la Chine, souligne Amelie Erxleben, responsable du développement international de Duisburg Intermodal Terminal. Il faut dire aussi qu’il y a, bien sûr, plus d’importations en provenance de Chine que d’exportations. Ce déséquilibre est le même que dans le transport maritime mais beaucoup moins prononcé ».
Principale destination des conteneurs arrivant de Chine par train à Duisbourg : des entrepôts à proximité immédiate du port, en tous cas dans un rayon de moins de 100 km, le trajet se faisant par transport routier. C’est d’ailleurs aussi le cas pour les conteneurs arrivant par voie maritime, via Anvers ou Rotterdam, qu’ils remontent ensuite le sillon rhénan jusqu’au Duisburg Intermodal Terminal par train (pour 2/3 d’entre eux) ou par transport fluvial (1/3 du trafic). Mais certains conteneurs de la nouvelle route de la Soie entament aussi, au départ de Duisbourg, un trajet routier beaucoup plus long, comme l’explique Amelie Erxleben : « Nous avons également des tournées longue distance, par exemple, à destination de la France, du Royaume-Uni, de l’Italie, de la Suisse, de l’Autriche, etc. Le mode fluvial jusqu’à Rotterdam et Anvers, avec une des navettes quotidiennes, est quand même assez rare car on pourrait aussi utiliser la voie maritime directe. Le train est aussi utilisé, avec des chargements vers l’Italie et Prague ou via d’autres terminaux de Duisburg qui proposent d’autres liaisons ferroviaires ».
Suivre l’exemple de Duisbourg et être relié en direct à la Chine par train tente des ports intérieurs français. Le port de Strasbourg, par exemple, travaille sur la question, et espère devenir, comme Dourges, une porte d’entrée française de la nouvelle route de la Soie ferroviaire. Lyon ou même Paris, avec le site de Bonneuil-sur-Marne, pourraient également accueillir un jour des trains chinois. En Belgique, le port autonome de Liège reçoit déjà régulièrement un train de la nouvelle route de la Soie.