Le village olympique sera fluvial

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En bord de Seine, 3 000 logements sont en construction et serviront temporairement de village olympique. Le fluvial est déjà mis à contribution pour l’évacuation des déblais de ce chantier, et le sera pour la livraison des matériaux de construction. La fin des travaux est prévue en mars 2024. Construit sur les rives de la Seine, en aval de Paris, le village olympique et paralympique, ou « village des athlètes », est une construction pérenne : il s’agit d’un quartier d’habitation, qui sera mis, temporairement, à disposition des sportifs le temps des Jeux olympiques. Il est en fait composé de deux sites distincts, de part et d’autre d’un bras de Seine, qui seront reliés par une passerelle : d’une part sur l’Île-Saint-Denis, d’autre part sur les communes de Saint-Ouen et Saint-Denis. Sur l’Île-Saint-Denis, le projet d’aménagement d’un éco-quartier fluvial précédait les JO : il remonte à 2010, initié à l’époque par la communauté d’agglomération Plaine-Commune. « Lorsque le comité d’organisation a passé les sites en revue, le fait qu’une opération publique d’aménagement était engagée, avec un foncier maîtrisé, a compté », estime David Cocheton, directeur général adjoint de la société d’économie mixte responsable de cet aménagement, Plaine-Commune Développement. La greffe a prise, et le village olympique occupera le nouveau quartier. Cela accélère le projet de rénovation urbaine de l’Île-Saint-Denis. Cette commune insulaire, une des plus pauvres d’Île-de-France, tourne largement le dos au fleuve qui l’entoure. Les grands magasins parisiens, Printemps et Galeries Lafayette, y exploitaient des entrepôts, aujourd’hui désaffectés et qui ont été cédés à la collectivité. Une première phase de construction de 300 logements a été engagée dès 2013 et est aujourd’hui livrée, les habitants commençant à s’installer depuis 2018. Il s’agit d’un quartier sans voiture, avec une gestion de l’eau très innovante puisque les eaux pluviales sont traitées à ciel ouvert avant de suivre un parcours régulé vers la Seine. La dimension fluviale de l’éco-quartier tient aussi au remodelage des berges, côté petit bras, pour des berges en pente douce et des cheminements piétons, alors que les entrepôts qui occupaient précédemment le site avaient été construits sur des hauts remblais. Enfin, la partie Nord du quartier doit accueillir une base nautique.

Ce sont maintenant les phases 2 et 3 du projet qui sont en chantier, soit 13 bâtiments pour un total de 3 000 logements, qui constitueront le village des athlètes. Les travaux de terrassement ont débuté en mai 2020. Le transport fluvial est mis à contribution, avec 50 000 t de déblais à évacuer par bateau. « Une collaboration a été mise en place avec VNF pour envisager cette utilisation du fluvial. Courant 2019, quatre ducs-d’Albe ont été installés en Seine. Ils sont utilisés depuis juin 2020 pour l’évacuation par bateau des déblais vers Gennevilliers, qui vont se poursuivre jusqu’en octobre », explique David Cocheton.

Deux études logistiques en cours

Une fois les terrassements réalisés et les réseaux mis en place, Plaine-Commune Développement passera la main, début 2021, au groupement Pichet-Legendre, qui édifiera les immeubles du village olympique. Les ducs-d’Albe installés par VNF reprendront alors du service, pour approvisionner le chantier en matériaux de construction. Le groupement de constructeurs mène actuellement deux études en parallèle sur l’utilisation qui sera faite du transport fluvial. L’une porte sur la filière bois, de nombreuses constructions utilisant ce matériau, l’autre sur les granulats, pour alimenter la centrale à béton qui sera installée sur l’île temporairement, le temps du chantier. Les ducs-d’Albe, après le chantier, seront quant à eux pérennisés pour une utilisation dans le domaine du transport de passagers, et non pour un usage logistique ou industriel.

Face à l’Île-Saint-Denis, le village olympique s’étendra aussi sur les communes de Saint-Ouen et Saint-Denis. Mais cette fois, ce sont bien les Jeux olympiques qui ont provoqué le projet urbain. C’est donc la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo) qui est aménageur. Selon Vincent Lucas, l’expert logistique fluviale de la Solideo : « La convention signée avec VNF avait pour objet de décliner dans le domaine fluvial nos ambitions environnementales, et d’associer à nos actions tous les acteurs du secteur fluvial. Le 23 juin 2020, grâce à cette collaboration, a eu lieu la première évacuation fluviale de déblais de chantier à bord du bateau Bigfoot. Fin juillet, les déconstructions et les remodelages de terrains ont déjà produit 20 000 t de matériaux évacués en fluvial vers différents sites de la vallée de la Seine ». Ces premiers déblais ont été évacués entièrement en fluvial à destination du Val-d’Oise et de la Seine-Maritime, à raison de chargements de 1 500 à 1 700 t à bord des bateaux Bigfoot, Brise de mer, Credo, Jade, Fatbob, Taf810 et Aconit.

Deux ports situés à proximité

La Solideo a la volonté de redonner une seconde vie aux matériaux de déconstruction. Les premiers centimètres de terre sont ainsi récupérés et valorisés pour en faire un substrat qui sera utilisé pour les plantations dans les espaces verts. Stockés temporairement à Bruyères-sur-Oise, ils reviendront sur le site du village olympique en transport fluvial à la fin du chantier. Le béton, concassé, sera réutilisé comme matériau de structure pour les chaussées ou les trottoirs.

Le site du village olympique étant situé sur l’axe Seine, avec deux ports à moins d’1 km au nord et au sud, Vincent Lucas estime que « le fluvial est une évidence logistique. Le transport ferroviaire est plus compliqué à mettre en œuvre, avec un axe ferré Paris-Nord où se déroulent des travaux importants. Avec les terrassements qui débuteront début 2021, la quantité de déblais va encore augmenter. Au total, nous atteindrons 500 000 t, avec une forte volonté d’en évacuer la part la plus importante possible par voie d’eau ».

Les discussions sont encore en cours entre la Solideo et les constructeurs, et le cahier des charges comporte un engagement en faveur du fluvial. Sans prévoir encore de part modale précise, la Solideo espère évacuer plus de la moitié des déblais par bateau. Pour ces transports fluviaux, Solideo utilisera, à Saint-Denis, un quai public de Haropa-Ports de Paris situé à côté de celui de Cemex. Au sud de la zone, à Saint-Ouen, une estacade qui a servi lors des derniers travaux de la RATP devrait aussi être mise à contribution : des études sont en cours pour s’assurer qu’elle puisse accueillir les camions.

À Saint-Ouen et Saint-Denis, comme à l’Île-Saint-Denis, l’ouverture du nouveau quartier sur la Seine est une des lignes fortes du projet, souligne Vincent Lucas : « La Seine est au cœur du dossier olympique, car elle relie les différents sites des Jeux. Le fluvial est aussi au cœur du chantier, car l’objectif est de faire les premiers Jeux bas carbone de l’histoire. Nous construisons, à une échelle de 50 ha, la ville de demain ».

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