Le Sénat a adopté son projet de loi sur les ports maritimes français

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Le Sénat a adopté lors de sa séance du 8 décembre 2020 un projet de loi sur les ports maritimes français, avec quelques modifications, et qui va poursuivre son parcours législatif à l’Assemblée nationale. Le gouvernement ne soutient pas ce texte et a indiqué que la stratégie nationale portuaire serait présentée début 2021 et non plus courant décembre 2020. Comme prévu, les sénateurs ont examiné une proposition de loi « relative à la gouvernance et à la performance des ports maritimes français » lors de leur séance du 8 décembre 2020. Le texte a été adopté avec quelques modifications et va poursuivre son parcours législatif à l’Assemblée nationale où il a été transmis à la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire. Lors de la séance, les sénateurs ont supprimé une disposition controversée qui ouvrait la possibilité d'une décentralisation de la propriété et de la gestion des GPM aux régions qui en feraient la demande. Le texte propose, notamment, la création d'un conseil national portuaire et logistique (CNPL) chargé du suivi de la mise en œuvre de la stratégie nationale portuaire, quand elle sera présentée. Il renforce la représentation des collectivités territoriales et des acteurs économiques au sein du conseil de surveillance de chaque GPM. Au nom du gouvernement, le ministre chargé des transports, Jean-Baptiste Djebbari, a indiqué ne pas pouvoir soutenir la proposition de loi, même si le gouvernement en partage « de nombreuses idées. Le gouvernement agit pour rendre nos ports plus forts, plus durables. Mais cette proposition de loi est-elle le bon véhicule ? Je ne le pense pas, nombre de ses dispositions relevant du domaine réglementaire et étant pour beaucoup en cours de mise en place. Le gouvernement ne soutient donc pas en l'état cette proposition de loi ». La déclaration du ministre a permis d’apprendre que le calendrier de présentation de la stratégie nationale portuaire avait glissé de courant décembre 2020, comme l’avait annoncé la ministre de la mer, au début de l’année 2021, toujours à l’occasion d’un Cimer. Elle comprendra trois axes : compétitivité, souveraineté et verdissement.

175 millions d'euros sur deux ans semblent insuffisants

Les prises de parole au nom des différents groupes politiques ont permis aux sénateurs de mettre en avant tout ce qui concerne les ports maritimes, leurs difficultés, leur importance, l’amélioration de leur compétitivité par rapport à leurs concurrents d’Europe du Nord, la nécessité d’améliorer la desserte de l’hinterland par les deux modes massifiés, du verdissement en lien avec les transitions écologique et énergétique… En voici quelques extraits.

Pour Hervé Maurey : « Nous manquons d'une stratégie de long terme et d'une vision claire de l'État sur les ports maritimes, malgré une annonce en novembre 2017. (…) En matière d'infrastructures d'accès aux grands ports, le sous-investissement est devenu chronique. (…) Mais les 175 millions d'euros prévus sur deux ans semblent insuffisants pour donner un véritable avantage comparatif à nos ports en termes de transition écologique. Le plan de relance est un premier pas, mais il faudrait aller au-delà ».

Ne pas refuser toute implication du secteur privé

Pour Didier Mandelli : « Si le secteur portuaire a fait l'objet de réformes de grande ampleur dans les années 1990, ses performances sont décevantes. En 2020, le tonnage de nos sept plus grands ports est inférieur de 40 % à celui de Rotterdam ! On estime entre 30 000 et 70 000 le nombre d'emplois perdus en France. (…) Sans politique ambitieuse de massification du transport de marchandises, il serait illusoire de penser renverser la situation. À Hambourg, 50 % du fret passe par voie ferroviaire ou fluviale. La création d'un Conseil national portuaire et logistique (CNPL) répond à cet enjeu. La comitologie maritime est déjà étoffée mais il faut associer le côté mer et le côté terre pour prendre en compte tous les acteurs de la chaîne portuaire et logistique. En outre, le CNPL a vocation à intégrer des structures existantes : c'est donc une logique de rationalisation.

(…) L'exclusion des acteurs économiques de la gouvernance des ports en 2016 pour prévenir les éventuels conflits d'intérêts est regrettable. Pourtant, des outils de prévention et de gestion de tels conflits existent : appliquons-les plutôt que de refuser toute implication du secteur privé ».

Seine-Nord Europe et surcoût de la manutention fluviale

Stéphane Demilly n’a pas oublié le projet de canal Seine-Nord Europe : « Un mot sur les plateformes logistiques le long du canal Seine-Nord-Europe, un projet dont je suis l'ambassadeur depuis 25 ans, à la région, puis à l'Assemblée nationale et enfin ici. En reliant les bassins de la Seine et de l'Oise aux 20 000 kilomètres de réseau fluvial nord européen à grand gabarit, il permettra de faire voguer des bateaux de fret fluvial de 4 400 tonnes, soit l'équivalent de 220 camions, fera baisser les émissions de gaz à effet de serre, décongestionnera les autoroutes et créera de nombreux emplois, conjoncturels et structurels ».

Pour Martine Filleul : « L'enjeu réside plutôt dans la coordination entre les ports, qui doivent jouer collectif - d'où l'importance des conseils de coordination interportuaires dont l'article 5 améliore le fonctionnement. Chaque façade maritime doit s'en doter. (…) Autre enjeu essentiel : le verdissement du transport de marchandises. Alors que la France dispose des voies navigables les plus longues d'Europe, 80 % des acheminements reposent sur le routier. Pourtant, quatre fois moins émetteur que la route, le fluvial est l'un des modes les plus vertueux. (…) Nos ports ont trop longtemps été perçus comme des « culs-de-sac » isolés, limités à leur zone d'exploitation. Le rapport défaillant à l'hinterland a freiné la constitution d'une chaîne logistique performante et écologique.

(…) Le canal Seine-Nord-Europe est une première étape, mais il faut aussi une régénération de l'ensemble du réseau. Voies nationales de France (VNF) comme SNCF Réseau doivent être associés à la politique portuaire.

(…) Pour rendre compétitif le fluvial, il convient de mutualiser et répartir uniformément les charges de manutention des conteneurs.

Pour Philippe Tabarot : « La proposition de loi comporte des avancées, à commencer par la création du CNPL qui prendra en compte les politiques du transport terrestre de marchandises. Les amendements adoptés en commission vont dans le sens du développement du multimodal. L'augmentation de la trajectoire d'investissement de l'Afitf serait un signal fort pour le fret ferroviaire et fluvial. Une instance de discussion sur le surcoût de la manutention fluviale et un plan d'optimisation des coûts de manutention fluviale sont hélas devenus nécessaires ».

L’intégralité des débats est disponible sur le site du Sénat.

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