Le PAMI, outil d’accompagnement de l’innovation

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Avec le plan d’aide à la modernisation et à l’innovation de la flotte (PAMI), Voies navigables de France (VNF) apporte un soutien à des projets en lien avec les exigences environnementales de verdissement du fluvial.

Le plan d’aide à la modernisation et à l’innovation de la flotte (PAMI) permet à Voies navigables de France (VNF) d’accompagner les investissements pour des nouveaux projets de bateaux de fret et de passagers répondant à des exigences environnementales en lien avec les transitions énergétique et écologique. L’un des enjeux du PAMI 2018-2022 étant de favoriser l’adaptation de la flotte fluviale aux exigences environnementales et logistiques avec des bateaux plus économes en énergie, plus sûrs, plus compétitifs pour s’adapter aux demandes des clients.

Les précédents outils d’accompagnement (PAMI 2013-2017 et PAM 2008-2012) ont permis de remplacer 200 moteurs en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Ils ont financé plus de 1 500 projets pour environ 25 millions d’euros d’aides de VNF et 160 M€ investis par les professionnels du fluvial, accompagné la création de plus de 100 entreprises, représentant 6 % de l’offre de cale en tonnage.

Le PAMI 2018-2022 remporte lui aussi un franc succès avec 183 projets validés à la fin du premier trimestre 2020 pour 8,1 M€ d’aide validés. 90 % des 183 projets se répartissent dans les volets B (mieux intégrer le maillon fluvial aux chaînes logistiques) et C (accompagner le renouvellement des acteurs et de la filière). Les volets A (améliorer la performance de la flotte) et D (favoriser l’émergence de solutions innovantes) comptent 29 projets sur le total de 183. « Nous avions prévu une répartition plus équilibrée entre les 4 volets. Nous attendons une montée en puissance du volet A avec des projets autour de moteur EMNR peut-être à partir de fin 2020 et en 2021. La réalité montre que le volet B répond à la situation actuelle avec une tension sur la cale et des besoins supplémentaires de bateaux en lien notamment avec le Grand Paris. C’est un fait marquant que nous avons accompagné avec l’arrivée de 5 ou 6 automoteurs récents et dotés d’une cale adaptée sur le bassin de la Seine », explique Joffrey Guyot, chargé de mission innovation, financement et transport multimodal de VNF.

Le PAMI est d’ailleurs victime de son succès : en 2 ans, le plafond autorisé a été dépassé pour les volets B et C. VNF doit désormais attendre une validation de l’Union européenne pour augmenter le plafond et pouvoir accepter de recevoir de nouveaux dossiers de projets pour ces deux volets. « Cela signifie en termes d’investissements que nous avons dépensé en 2 ans le budget attribué pour les 5 ans sur ces volets du plan », souligne Joffrey Guyot. Le budget du PAMI sur la période 2018-2022 atteint un total de 16,5 millions d’euros, soit 12,5 M€ apportés par VNF et 4 M€ par l’Etat français. Les régions Ile-de-France, Sud et l’Ademe ont abondé les volets A et D. Lors du précédent PAMI, les investissements des professionnels variaient entre 20 et 30 M€ par an alors que sur les deux premières années de la période 2018-2022, ils oscillent entre 50 et 60 M€ mettant ainsi en évidence l’augmentation de l’investissement de la profession.

Le PAMI 2018-2022 s’adresse aux exploitants de bateaux de transport de marchandises mais le volet D est aussi accessible aux transporteurs de passagers, aux bureaux d’études, chantiers ou autres prestataires techniques, « sous réserve que la technologie concernée puisse être transférable aux bateaux de transport de marchandises ». Pour Eloi Flipo, responsable division transport, cette nouveauté permet à VNF de voir les tendances côté passagers en plus de celles côté fret. Cela permet à l’établissement de comprendre qu’une évolution du volet D est nécessaire pour en faciliter davantage l’accès à des projets d’évolution de bateaux à passagers, par exemple, ceux des opérateurs qui participent au groupe-pilote suite à l’étude de la Communauté portuaire de Paris.

Des solutions à différents horizons

Parmi les tendances récentes, il y a des projets de construction neuve avec une pile à combustible à l’hydrogène et un pack électricité sur batterie. « Nous en connaissons trois : un pousseur pour CFT sur le bassin Rhône-Saône, dans le cadre du projet Flagships, un pousseur pour Cemex sur la Seine. Le troisième est un 38 mètres sur le canal du Midi. VNF est associé à ces projets qui portent sur des besoins de puissance variable », détaille Eloi Flipo (voir p. 14-15, 16, 20).

Autre projet en cours depuis 2015, « Green Deliriver » de Segula Technologies avec plusieurs partenaires dont GRDF, Haropa, VNF, Marfret. C’est un projet de bateau pour la logistique urbaine propulsé au biogazGNC/électrique avec un système de manutention autonome. Selon Eloi Flipo, « c’est le seul projet au gaz naturel actuellement même si l’association française du gaz et sa plate-forme GNC/GNL se tiennent prêtes à travailler à un éventuel appel à projets. Mais pour le moment, la question de la pertinence du gaz naturel reste posée ».

Pour Joffrey Guyot : « Il y a beaucoup d’idées qui fourmillent mais il faut tenir compte des horizons de pertinence. Pour atteindre le zéro carbone, l’hydrogène est une bonne solution mais son horizon de concrétisation apparaît lointain alors que pour une diminution rapide dans les 10 ans, les systèmes de dépollution, c’est-à-dire un post-traitement des gaz d’échappement, pourraient être une solution prometteuse ». Les moteurs CCNR2 sont en effet encore largement majoritaires dans le parc, voire même des CCNR1. Les moteurs EMNR commencent seulement à arriver pour les puissances réduites en utilisant des moteurs industriels ou routiers. Pour les puissances plus élevées, les motoristes doivent encore développer des moteurs conformes aux normes EMNR, ce qui va prendre du temps.

« Nous avons donc  un projet d’équipement de dépollution pour lequel nous avons trouvé un partenaire et lancé les travaux pour obtenir un kit clé main qui pourrait s’adapter sur un moteur CCNR2 existant et parviendrait à réduire les émissions polluantes conformément à EMNR. Ce kit coûterait cinq fois moins cher qu’un moteur neuf. Ce serait des équipements à rajouter dans la salle des machines, réservoir pour l’urée, plusieurs filtres pour les particules, et catalyseur SCR, pour réduire les Nox, etc. Il y a plusieurs enjeux : le coût, l’acceptation par les bateliers, la place dans la salle des machines », précise Joffrey Guyot. Sur le plan réglementaire, la bonne nouvelle est que la Commission européenne a décidé de confier à chaque Etat-membre la validation des kits. L’objectif de VNF avec ce projet est de réaliser des essais sur une dizaine de bateaux volontaires puis de proposer le kit à la commercialisation, en utilisant le PAMI pour accompagner l’investissement.

La « marinisation » des moteurs routiers conforme à la norme EuroVI se concrétise. Par exemple, aux Pays-Bas le Wantij est le premier bateau de fret (86 mètres) à être équipé de cette solution de modernisation à relativement faible coût qui permet de réduire jusqu’à 95 % les émissions de polluants atmosphériques, d’économiser la consommation de carburant et donc les émissions de CO2. Des performances neutres en carbone peuvent être obtenues en utilisant des biocarburants/HVO ou des carburants synthétiques. Toujours aux Pays-Bas, Vink Diesel et NPS Diesel ont obtenu l’homologation pour des moteurs de poids lourds Paccar DAF de norme Euro VI marinisés, conformément au règlement EMNR, et installé plus de 20 moteurs sur différents bateaux.

Des freins à lever

Concernant des moteurs respectant EMNR Stage V, lors du salon Euromaritime en février à Marseille, des motoristes ont indiqué une date de disponibilité pour fin 2020, rappelle Eloi Flipo. « Ce sont des moteurs GNR équipés de systèmes de dépollution qui permettent d’atteindre les normes de réduction imposées par EMNR. Nous ne savons pas encore comment cela se présente car c’est en cours de développement. Nous serons attentifs pour ces moteurs conformes à EMNR Stage V aux prix. Compte tenu que nous constatons une envolée des prix autour des moteurs, peut-être un effet pervers des subventions ».

Il ne faut pas oublier non plus une autre solution transitoire avec l’utilisation de gaz to liquid (GTL) comme le font plusieurs compagnies de transport de passagers sur la Seine ainsi qu’à Strasbourg ou encore Cemex à Paris.

Parmi les freins à lever, il y a l’homologation des bateaux. « Les seules solutions qui sont homologuées en série à long terme, ce sont celles avec le GNR, la propulsion électrique sur batterie, le GNL. Toutes les autres passent par l’arrêté de zone restreinte publié en août 2019 et qui permet de tester une solution sur un périmètre défini ». Le déploiement d’infrastructures d’avitaillement en carburant doit aussi être prévu, c’est le cas avec deux études en cours par les directions territoriales de VNF Rhône-Saône, en partenariat avec la CNR, et Seine, avec Haropa. Une démarche similaire pour établir un schéma d’avitaillement pourrait être bientôt lancée sur le bassin du Nord-Pas-de-Calais.

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