Le précédent appel d’offres, au printemps 2019, était resté infructueux. Cette fois, une nouvelle concession a pu être mise en place pour le terminal multimodal du Havre. « Le contrat de concession de service public, signé le 6 juillet 2020 par Baptiste Maurand, directeur général du Port du Havre et Christophe Régnier, président de LHTE, insuffle une nouvelle dynamique qui permet de développer des services à valeur ajoutée pour la clientèle », ont annoncé Haropa et la société Le Havre terminal exploitation (LHTE), dans un communiqué commun publié le 21 juillet 2020 qui fait état d’un « pilotage unifié de l’exploitation du terminal et de sa navette ferroviaire permettant d’offrir un service intégré et optimisé ».
C’est en effet une des principales nouveautés de cette nouvelle concession : LHTE n’exploite plus seulement le terminal lui-même, mais aussi la navette ferroviaire qui relie ce hub fluvial et ferroviaire aux terminaux à conteneurs du port du Havre. C’était une des recommandations de la Cour des comptes, qui dans son rapport de juillet 2018 orientait vers une exploitation conjointe des deux services, mais pointait aussi la mauvaise affaire financière réalisée par le Grand port maritime du Havre (voir article). C’est le port qui avait dû essuyer les pertes et devenir propriétaire de l’installation lors de la déroute de LH2T, la société qui avait construit le terminal, peu après le début de l’exploitation de celui-ci en 2015. Fin 2018, nouveau coup dur pour le terminal multimodal : LHTE, la société qui l’exploite depuis son ouverture, résilie la convention d’occupation, le loyer qu’elle acquitte ne permettant pas un fonctionnement dans de bonnes conditions économiques.
LHTE reprend la navette ferroviaire à son compte
Il aura donc fallu un an et demi et deux appels d’offres pour qu’un nouvel arrangement soit trouvé, toujours avec LHTE mais cette fois sous la forme d’une concession de service public. Avec un actionnariat modifié pour LHTE, qui en a toujours continué l’exploitation pendant ce long intermède. Naviland Cargo (SNCF) reste l’actionnaire principal avec 33,3 % des parts. Le Grand port maritime du Havre (GPMH) reprend les 31 % de CMA CGM qui, ayant cédé Greenmodal au groupe Charles-André, n’a plus d’intérêt dans le transport fluvial. Logi Ports Shuttle (groupe Sogestran) et Novatrans (groupe Charles-André) conservent leurs participations respectives de 23,7 % et 12 %. L’entrée du GPMH permet, selon le port, « d’appuyer son ambition de développement de la multimodalité et constitue l’opportunité de garantir une certaine neutralité aux clients utilisateurs du système ».
La navette ferroviaire qui transporte les conteneurs entre les terminaux maritimes et le terminal multimodal était jusqu’à présent exploitée par Normandie Rail Services. C’est désormais LHTE qui porte la responsabilité de cette navette, et en a confié la sous-traitance à un prestataire : Normandie Rail Services. Cela change cependant la donne. « Nous faisions déjà la coordination et la gestion d’ensemble, et la nouvelle organisation élargit notre périmètre à la question économique. Surtout, nous serons plus à même d’orienter le fonctionnement de la navette pour répondre aux besoins des clients », indique le président de LHTE, Christophe Régnier, qui ajoute : « C’est un signe fort et encourageant pour l’ensemble des utilisateurs actuels et futurs de la multimodalité au Havre. Ils auront un interlocuteur unique pour le passage de leurs flux conteneurs par le terminal multimodal et le service de transfert en lien avec les terminaux maritimes ».
Baisse de 25 % à 30 % des volumes
Le terminal mutlimodal du Havre, qui propose 14 départs par semaine vers 11 destinations en ferroviaire et 8 départs hebdomadaires vers 6 destinations de l’axe Seine en fluvial, avait traité 93 000 conteneurs (environ 158 000 EVP) en 2019, ce qui représentait une hausse de 3 % par rapport à l’année précédente.
L’année 2020 est cependant beaucoup moins bien engagée selon Christophe Régnier : « L’activité a été beaucoup plus faible, car on cumule les effets des grèves et de la crise du Covid-19. Nous avons perdu 25 % à 30 % de nos volumes sur les six premiers mois de l’année. L’activité de juillet 2020 est loin de celle de juillet 2019, et en-deça de la reprise que l’on espérait. Les escales maritimes ont repris en juillet, mais sans les volumes habituels. Or les mois de juillet et août constituent habituellement pour nous un pic d’activité, le recours aux modes massifiés étant plus important en période de pic. L’utilisation du terminal multimodal par les bateaux fluviaux est aussi privilégiée quand les quais maritimes sont encombrés. À cela s’ajoute le faible coût du gazole, qui permet aux transporteurs routiers de proposer des prestations plus attractives. Nous avons heureusement développé des services supplémentaires (traitement thermique des grumes de bois à l’export, stockage de conteneurs pleins surtout en avril et mai dernier), qui nous apportent du chiffre d’affaires et font découvrir le terminal à certains opérateurs qui en seront peut être de futurs clients ».