La direction territoriale (DT) Strasbourg de Voies navigables de France est située sur le périmètre du bassin du Rhin et gère un réseau de 480 km, se répartissant entre 190 km de grand gabarit et 280 km de gabarit Freycinet. La partie grand gabarit avec le Rhin dessert cinq pays : France, Allemagne, Suisse, Pays-Bas, Belgique. La partie Freycinet, c’est l’Ill, la Sarre canalisée, les canaux de la Sarre, de la Marne au Rhin, du Rhône au Rhin et de Colmar. Cette DT s’étend sur deux régions, Grand Est et Bourgogne-Franche Comté, et sur cinq départements (Bas-Rhin, Haut-Rhin, Moselle, Territoire de Belfort et Haute-Saône). Parmi les grandes agglomérations irriguées par la voie d’eau : Sarreguemines, Saverne, Strasbourg, Colmar, Mulhouse, Belfort… Parmi les ouvrages que gère, exploite, entretient et modernise cette DT, il y a 130 écluses dont celles de Gambsheim, les plus grandes de France et un point de passage fondamental pour le trafic, ou l’ascenseur à bateau/plan incliné de Saint Louis d’Arzviller qui a fêté ses 50 ans en 2019, 2 tunnels, etc. À Gambsheim, est installé le Caring (Centre d’Alerte Rhénan et d’Information Nautique de Gambsheim), structure unique en France, vigie permanente et centre de crise qui supervise et suit 24h sur 24 tous les événements et activités sur le fleuve transfrontalier entre Bâle et Lauterbourg. La DT compte 400 agents actifs sur l’ensemble de son territoire où sont répartis 5 UTI et son siège est basé à Strasbourg.
« 2019 a été une très bonne année pour le transport de marchandises comme pour le tourisme. Il y a eu une nette hausse, +28 %, avec un trafic de 19,4 Mt enregistré à Gambsheim. Les conditions de navigation ont été très favorables avec une bonne hydraulicité du Rhin, à la différence de ce qui s’était passé en 2018. La capacité de chargement a dépassé les 1 500 tonnes, un niveau qui n’avait plus été observé depuis 2012 », détaille Pierre Des Roseaux, directeur territorial adjoint.
Des résultats positifs en 2019
Toutes les filières apparaissent en positif avec une mention spéciale pour les produits pétroliers, les minéraux bruts ou manufacturés et matériaux de construction, les machines, véhicules, objets manufacturés. « Il y a toujours un trafic fret pendulaire sur le petit gabarit avec la présence de chargeurs notamment sur les canaux de la Marne au Rhin, du Rhône au Rhin branche Nord et sur la section Niffer à Mulhouse », ajoute le responsable. Parmi les faits marquants en 2019, le démarrage de l’activité colis lourds à Colmar-Neuf Brisach (voir p. 29) avec des flux de deux grands chargeurs, General Electric et Liebherr Mining. VNF a soutenu ce lancement dans le cadre de son plan d’aide au report modal (Parm).
Le tourisme a lui aussi performé en 2019 avec un trafic en progression de +19 % à Gambsheim et 405 000 passagers notamment dans les paquebots fluviaux. À Strasbourg, sur l’Ill, Batorama avec 785 000 passagers a enregistré sa troisième meilleure année depuis 70 ans. Cette activité a été très positive sur le canal du Rhône au Rhin. Les trafics ont été bons sur le canal de Sarre et de la Marne au Rhin, même si une légère baisse a été observée en raison d’avaries techniques.
À cause du Covid-19, la saison 2020 n’a démarré que fin mai avec la reprise de la navigation et une montée en charge progressive. Selon les loueurs, le démarrage a d’abord été lent puis les réservations ont augmenté à partir du dernier week-end de juin. L’offre touristique fluviale est complète dans cette partie de la France sur l’ensemble du réseau, plaisance individuelle, location, bateaux-promenade, péniches-hôtel, croisières, dans des territoires riches de patrimoine et d’espaces naturels, propice aux découvertes et au slow-tourisme.
La DT Strasbourg conduit plusieurs projets de modernisation pour améliorer les performances du réseau et les services aux usagers. « Nous nous appuyons sur la loi d’orientation des mobilités et la hausse des crédits budgétaires », indique Pierre Des Roseaux. Il s’agit de travaux en cours de pose de fibre optique le long des canaux et qui vont continuer en 2021, de l’automatisation des écluses sur le canal du Rhône au Rhin branche Sud, de l’instrumentation des ouvrages pour obtenir des données à distance et fiables pour une meilleure gestion de la ressource en eau. Concernant la régénération du réseau, un chantier concerne les tunnels du canal de la Marne au Rhin et un autre les écluses de Gambsheim en 2021 dans le cadre d’un co-financement par le CPER. Les aspects environnementaux ne sont pas oubliés avec le plan « Rhin vivant » dont VNF est partenaire et qui vise à sauvegarder la biodiversité et les paysages typiques de ce fleuve. « Nous avons lancé, par exemple, une réflexion sur la renaturation des berges ».
Travailler en partenariat
Un des axes de travail de cette DT de VNF depuis quelques années est de nouer des partenariats avec les collectivités locales. Par exemple, en septembre 2017, un partenariat avec la ville de Strasbourg a été signé pour promouvoir la voie d’eau, améliorer certaines infrastructures. D’autres partenariats ont suivi avec Mulhouse et Saverne. L’établissement a accompagné la promotion du bassin touristique de la Sarre (« Terre d’Oh ! »). Avec les élections municipales qui viennent d’avoir lieu, l’enjeu va être de poursuivre ces partenariats, parfois avec de nouveaux exécutifs, au cours des six ans à venir.
Dans le périmètre géographique de cette DT, certains ports (Colmar-Neuf Brisach, les ports de Mulhouse-Rhin) sont concernés par l’évolution de leur gouvernance vers des SMO et Semop. L’établissement est impliqué dans la mise en place de cette nouvelle stratégie de gouvernance, notamment ouverte aux investisseurs privés, et qui devrait aboutir d’ici la fin 2020 (voir p. 24).
Les innovations constituent une autre priorité et concernent aussi bien des aspects techniques que le développement d’une logistique fluviale urbaine. À Strasbourg, celle-ci est devenue une réalité en février 2020 avec l’entreprise ULS avec l’utilisation de la plate-forme « Fischerstaden » du quai des Pêcheurs avec des flux allers/retours par l’Ill et un service de livraison par vélos-cargo (voir p. 38). Sur le canal de la Sarre où les écluses sont automatisées, un système de surveillance (caméras, haut-parleurs) a été installé pour permettre un dépannage à distance par l’opérateur du poste de commande et pour réaliser certaines actions afin de garantir un service optimal pour les usagers. « C’est ce qu’on appelle un processus de réarmement à distance. L’idée, à terme, c’est de déployer cette solution sur notre réseau », explique Pierre Des Roseaux.
L’ensemble de ces priorités reste d’actualité pour l’avenir malgré le Covid-19 dont les effets ne peuvent pas être encore totalement mesurés. Pour Pierre Des Roseaux : « Le transport fluvial a une carte à jouer. Pour le transport de marchandises, il est pertinent, sa capacité d’emport est élevée jusqu’au cœur des centres urbains, il a ainsi totalement sa place dans la nécessité de repenser la logistique pour mettre en place des systèmes plus sobres et à moindre coût environnemental. Le fluvial répond aux nouvelles tendances du tourisme, plus vert et proche des territoires ». Marie-Céline Masson, directrice territoriale de Strasbourg conclut : « Nous avons des atouts pour le monde d’après sur les trois missions de VNF : logistique et fret, aménagement des territoires, gestion de l’eau. Nous sommes au cœur de l’actualité pour la mise en place de chaînes logistiques plus sobres, pour une meilleure gestion de la ressource en eau dans un contexte d’étiage plus fréquent et plus aléatoire, pour l’aménagement du territoire avec un tourisme plus durable ».