La réalité du dumping social sur un bateau de croisière A-Rosa près de Paris

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La rédaction de NPI a été alertée le 31 août 2019 sur la situation de deux salariés d’un bateau de croisière de la compagnie A-Rosa, amarré à l’île Saint Denis près de Paris. L’intervention de la police a été nécessaire tout comme celle de l’ambassade de Roumanie. La suite dépend de l’action des syndicats et de la direction de la compagnie. Si le temps est au beau fixe le 31 août en début d’après-midi du côté de l’île Saint Denis près de Paris pour l’embarquement des passagers à bord du A-Rosa-Viva, ce n’est pas le cas pour deux salariés de ce bateau dont la direction souhaite se séparer depuis le matin le plus rapidement possible, au mépris des règles sociales. La salariée a été embauchée le 24 août 2019 avec un contrat rédigé en langue allemande, pour un emploi d’hôtellerie-restauration. Son collègue a été embauché à la même date pour un emploi de matelot, son contrat lui a été fourni en langue allemande et française. Ces deux salariés sont roumains. Le 31 août au matin, ils sont convoqués et se voit remettre un document en anglais dont le titre précise « rupture anticipée de période d’essai » et on leur dit de signer en bas à gauche puis de prendre leurs affaires et de débarquer. La salariée demande alors un exemplaire de son contrat en langue anglaise car elle ne comprend pas l’allemand. Elle avait déjà exprimé cette demande au cours des jours passés mais le manager lui avait répondu à chaque fois « ne pas avoir le temps », d’une manière, selon elle, brutale et peu aimable. Elle souhaite avoir son contrat dans une langue qu’elle comprend pour connaître les dispositions qu’il contient avant de le signer. Le manager refuse une nouvelle fois de lui fournir son contrat en anglais et insiste fortement pour qu’elle signe le document de rupture, d’une manière toujours brutale et peu aimable, précise la jeune-femme qui refuse toujours de signer. Elle demande également la raison de la décision de la direction du bord de mettre fin à sa période d’essai mais n’obtient pas de réponse. Son collègue refuse également de signer le document et demande lui aussi la raison de la décision sans obtenir de réponse.

Une direction du bord qui refuse de parler avec l’attachée d’ambassade

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La situation se bloque alors : les deux salariés refusent de quitter le bord, réclamant notamment le paiement de leurs jours de travail à bord et des explications sur les raisons de la rupture de leur contrat.

La salariée décide d’entrer en contact avec Valérie Latron, vice-présidente et représentante française de la section navigation intérieure d’ETF et représentante femme de la section navigation intérieure d’ITF pour alerter sur la situation et demander de l’aide. Il lui est conseillé de rester à bord, ce qu’elle fait. Valérie Latron parvient à contacter le bureau de l’attachée sociale et travail de l’ambassade de Roumanie. Celle-ci appelle la salariée qui lui explique la situation. L’attachée d’ambassade indique à la salariée souhaiter parler au téléphone avec la direction à bord. Cette demande est transmise par la salariée à la direction qui refuse tout entretien avec l’attachée d’ambassade. Celle-ci n’a jamais pu échanger avec un responsable à bord pour tenter d’aplanir la situation.

Sur les lieux en début d’après-midi, la rédaction de NPI a abordé le personnel de sécurité en service à l’extérieur du bateau qui est apparu au courant des difficultés de deux membres du personnel à bord et a accepté rapidement d’aller demander à bord si un membre de la direction acceptait d’échanger sur la situation avec un journaliste. Ou s’il était possible de monter à bord pour échanger de vive voix avec les deux salariés. La réponse a été non aux deux demandes. Aucun membre de la direction n’a voulu non plus descendre du bateau pour venir parler sur le trottoir ou sur le quai. Il a été précisé au journaliste qu’il pouvait tout de même rester sur le trottoir à proximité du quai où se trouvait le bateau… Pendant ce temps-là, le ballet de l’arrivée des passagers et de l’embarquement se déroulait.

Interrogation sur le tribunal compétent

Un peu plus tard dans l’après-midi, suite à un appel de la direction du bateau, une voiture de police est arrivée avec trois agents dont deux sont montés à bord. Les deux agents de police -qui maîtrisaient la langue de Shakespeare- ont quitté le bateau avec les deux salariés qui avaient finalement accepté de débarquer. Pour les deux agents, « leur rôle à consister à être des médiateurs dans un conflit de rupture de contrat entre direction et salariés ». Apparemment pour la direction, la solution de la police visait à tout faire pour accélérer les choses car une fois l’embarquement des passagers terminé, le bateau devait partir.

Du côté des deux salariés, il leur a été donné par la police les coordonnées du tribunal car ils n’ont reçu aucune rémunération pour la semaine travaillée à bord.

Mais un tribunal français est-il compétent, compte tenu que le bateau bat pavillon suisse ? Il est probable que la réponse est non. Alors quelle solution ? Quelle action possible ? L’attachée d’ambassade a fixé un rendez-vous pour rencontrer les deux salariés. Suite à l’action de Valérie Latron, vice-présidente et représentante française de la section navigation intérieure d’ETF et représentante femme de la section navigation intérieure d’ITF, la direction de la compagnie A-Rosa va être contacté.

Les deux salariés ont témoigné que les conditions de travail et de vie à bord pour le personnel sont bien celles du dumping social : de 12 à 14 h de travail par jour, les repas sont constitués des restes des repas des passagers. L’eau proposée au personnel semble ne pas être aux normes acceptables pour la consommation. Les échanges entre le management et le « petit » personnel manquent a minima de courtoisie et cordialité… Les pourboires leur ont été confisqués…

Tout cela peut se passer sur n’importe quel bateau naviguant sur n’importe quel grand fleuve européen, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Belgique… Mais cette fois, c’était à bord d’un bateau amarré à l’île Saint Denis qui propose une croisière-découverte de la Seine, avec une navigation à proximité des plus beaux monuments de Paris pour le plus grand bonheur des passagers. La croisière fluviale connaît une croissance constante et significative depuis plusieurs années. Il reste à en faire profiter le personnel à bord et à transformer significativement les conditions sociales et de travail.

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