Entreprises fluviales de France (E2F) a bâti un plan de relance pour la filière fluviale dans ses deux composantes, fret et tourisme. « Nous l’avons transmis aux deux secrétaires d’Etat aux Transports et au Tourisme dans le cadre de la réflexion en cours du gouvernement qui prévoit de présenter un plan de relance économique en septembre, explique Didier Léandri, président de E2F. Certaines des mesures que nous proposons peuvent aussi s’inscrire dans le cadre du projet de loi de finances 2021 dont les travaux sont, eux aussi, en cours ».
Le plan de relance économique de E2F liste une série de mesures qui complètent celles de soutien immédiat adoptées par le gouvernement pendant la période de confinement puis de dé-confinement (report et annulation de charges, activité partielle, fonds de solidarité, PGE, garantie BPI, etc.). Après les temps de la crise sanitaire et de la relance d’activité, ce plan se projette dans une troisième phase qu’il faut préparer dès maintenant. « Le fluvial, comme tous les autres secteurs économiques, se projette dans l’avenir pour accélérer les réformes dont nous avons besoin et obtenir des décisions rapides dans le cadre d’un circuit extrêmement court comme cela a été le cas pendant la gestion de la crise », poursuit Didier Léandri.
Le plan de relance économique d’E2F se fixe trois priorités : éviter les défaillances d’entreprises (« car privées de trésorerie et face à une demande faible, leur modèle économique est fortement atteint »), accroître la compétitivité des entreprises (« car, à court terme, la concurrence de la route est plus forte que jamais et, à long terme, elles vont devoir remettre en cause leurs plan de développement »), intégrer à part entière le transport fluvial dans les stratégies logistiques et tourisme portées par les pouvoirs publics (« car le transport fluvial peut s’insérer aisément dans des logiques de filières et être le catalyseur d’offres innovantes et attractivité pour les territoires, sa singularité et son dimensionnement sont des gages d’agilité et d’adaptabilité »).
Didier Léandri souligne : « Ce plan est le résultat d’une réflexion interne et participative au sein de E2F de l’ensemble des acteurs de la filière fluviale, fret et tourisme. C’est un fait marquant quelques mois à peine après la création d’E2F en novembre 2019. Cela nous permet d’avoir une feuille de route partagée, un outil d’intégration et de cohésion alors que le fluvial comprend une grande variété d’acteurs ».
4 axes de travail
Composé majoritairement de PME et TPE, le secteur fluvial était dans une dynamique de croissance et de mutation écologique et énergétique que la crise sanitaire du Covid-19 a interrompu brutalement. Amputé d’une large part de son chiffre d’affaires, « le fluvial doit se réinventer pour renouer avec la situation positive antérieure à la crise et, surtout, l’amplifier ». E2F se déclare « convaincu que dans le cadre du contexte sanitaire manifestement durable, les activités fluviales possèdent des atouts majeurs car elles sont opérées en milieu peu dense, sont sûres, et allient la proximité à des atouts environnementaux de premier ordre ».
Pour renouer avec un dynamique de croissance et l’amplifier, les 23 mesures du plan de relance économique de E2F s’articulent autour de quatre axes de travail dont le premier est de « stimuler la demande avec des leviers à mettre en œuvre qui visent la priorité sur des marchés cibles, la commande publique, la réorientation de l’offre touristique ».
Avec le deuxième axe de travail, il s’agit de « refinancer les entreprises » avec des leviers de nature fiscale et financière. Le troisième axe est « améliorer la compétitivité de l’offre » et prévoit « des instruments à bâtir de nature technique (exploitation, normes techniques), économique (aides, baisses des coûts) et d’organisation (intégration aux chaînes logistiques et aux offres touristiques) ». Le quatrième axe entend « inscrire durablement le transport fluvial dans la transition écologique » avec « une stratégie à décliner qui doit procéder de l’engagement des acteurs de la filière et d’une fiscalité écologique dynamique ».
Pour E2F : « Ce qu’a bien révélé la crise, c’est l’extrême interdépendance des acteurs au sein des chaînes de valeurs, la dépendance à l’international et le lien étroit entre sécurité sanitaire et développement durable. La période qui s’ouvre est l’occasion d’un renforcement profond des ambitions en matière de transport durable en jouant la carte de l’indépendance logistique et tourisme pour permettre à nos entreprises de mieux rebondir par la suite. Cette relance doit donc s’appuyer sur un ancrage territorial avec des circuits courts, des partenariats de filières, un pavillon français conforté et une employabilité locale dont il faut tirer le plein potentiel ».
Les mesures sont destinées à soutenir structurellement et dans la durée les différents marchés du transport fluvial. 1/ Axe de travail : stimuler la demande et consolider la qualité de l’offre : Pour la logistique : 1. concentrer nos moyens sur des marchés cibles ; 2. confirmer la commande publique en matière de grands projets ; 3. raisonner en filière. Pour le tourisme : 4. engager des actions sur les destinations, les filières, la distribution et les produits ; 5. promouvoir et communiquer. 2/ Axe de travail : refinancer les entreprises 6. Restructurer le dispositif de report en arrière des déficits. 7. Instaurer par le biais de BPI des refinancements d’actifs à taux faible et remboursables in fine sur une période de 7 à 10 ans, avec la garantie apportée par les bateaux et les COT. 8. Exonérer de plus-value de cession la vente de bateaux sous condition de réinvestissement. 9. Prendre les textes d’application du PLF 2020 sur le suramortissement. 10. Étendre la durée de financement des acquisitions sur 20 ou 25 ans avec des loyers ou mensualités en concordance avec les capacités de remboursement du marché actuel. 11. Renforcer le Plan d’aide à la modernisation de la cale de VNF (PAMI). 12. Relancer le fonds d’investissements sectoriel (Fluvial Initiative). 3/ Axe de travail : améliorer la compétitivité de l’offre 13. Revoir les priorités sur le domaine public fluvial. 14. Confirmer et amplifier la trajectoire financière de la loi d’orientation des Infrastructures. 15. Engager la signature du contrat d’objectif et de performance (COP) pluriannuel entre l’Etat et Voies Navigables de France. 16. Revoir le dispositif dit d’aide à la pince. 17. Remettre la priorité sur les modes de transport massifiés dans la stratégie de reconquête de la filière maritime et portuaire française. 18. Réaliser un bilan des normes, procéder à leur objectivation économique (Mesure coût/impact), dans le cadre d’une période de moratoire. 19. Mettre en place une cellule de veille et de suivi à l’échelle interprofessionnelle sous l’autorité de l’Etat, pour faire remonter les situations à risque et adapter le cadre réglementaire. 4/ Axe de travail : inscrire durablement le transport fluvial dans la transition écologique 20. Signer au plus vite les Engagements pour la Croissance Verte (ECV). 21. Lancer et mettre en œuvre dans le fluvial un programme Ademe « Objectif CO2 ». 22. Engager sans attendre une vraie régulation écologique du secteur du transport. 23. Conditionner les aides dans le cadre de la relance à un principe d’éco-compatibilité.