En mai 2020, au port de Rotterdam, un drone a transporté un colis d’un poids d’un demi-kilo. Pour atteindre le navire à l’ancre à la Maasvlakte, il a parcouru une distance de quatre kilomètres. Cette première opération inédite a eu lieu sous l’égide de la coalition Dutch Drone Delta (DDD). Celle-ci a vu le jour en décembre 2019, vise l’intégration socialement et économiquement durable des drones dans la mobilité aérienne urbaine (UAM, urban air mobility) et regroupe une quinzaine d’acteurs néerlandais dont KLM, Schiphol Group et le port de Rotterdam.
L’objectif de ce premier essai était de vérifier le potentiel des livraisons par drone dans le port, de démontrer leur valeur ajoutée dans un environnement complexe, d’aider les autorités compétentes à formuler des règles adéquates. De nouveaux tests avec des colis d’un poids plus important et sur des distances plus grandes sont prévus à court terme, indique le port.
Pour Stephan Van Vuren, de Dutch Drone Delta : « Le potentiel pour les drones dans la zone portuaire est infini, prévention d’incidents, lutte contre des accidents ou pollutions, supervision des opérations portuaires, constatation de dégâts, inspection de ponts et installations, entretien d’infrastructures, livraisons aux navires et plates-formes offshore, transport médical d’urgence, etc. À terme, même le transport de cargaisons lourdes et de personnes n’est pas à exclure ».
À Anvers, un tel test n’a pas encore eu lieu mais plusieurs applications de drones ont été présentées en septembre 2019 dans le cadre du consortium européen Safir, dont fait partie l’autorité portuaire, et qui étudie l’intégration de ces engins dans l’espace aérien.
Pour le moment, les drones restent encore relativement rares dans l’espace portuaire. Rotterdam parle de « plusieurs vols par semaine » sans pouvoir fournir un nombre précis, les autorisations requises étant délivrées par un service dépendant du ministère de l’Infrastructure. À Anvers, où il faut obtenir le feu vert de la capitainerie du port, 108 demandes ont été comptées en 2019 et 51 depuis le début 2020. Ils sont généralement utilisés pour réaliser des images aériennes d’installations ou d’opérations, des inspections et vérifications.
Erwin Verstraelen, responsable innovation digitale à Anvers, apparaît toutefois convaincu du grand avenir des drones comme facteur d’innovation pour rendre le port plus efficace et plus performant. Les autorités portuaires de Rotterdam et d’Anvers recourrent régulièrement à des drones, notamment lors d’un sinistre. L’ambition est d’étendre leur utilisation et d’en faire un outil de base dans la gestion du port et pour le suivi continu des installations et opérations. Anvers indique avoir établi une « feuille de route drone » pour les trois ans à venir, « qui définit une quarantaine de cas de figure où les drones constituent une technologie centrale ».
Un travail réglementaire à mener
Il reste un important travail à mener sur les aspects réglementaires. Outre les interdictions de survol et les procédures administratives à accomplir, les opérateurs de drones sont confrontés à des règles qui imposent, par exemple, le respect d’une distance de sécurité par rapport aux grues et autres obstacles ou qui interdisent (sauf exemptions) des vols simultanés dans un même périmètre ou des vols sans contact visuel entre le pilote et l’engin (la présence d’un observateur au sol peut alors être requise). Des vols entièrement automatisés doivent, eux aussi, encore franchir la barrière réglementaire.
Ce travail sur la réglementation est conduit au niveau européen. Une nouvelle directive est attendue pour le début de 2021, indique Anvers. La sécurité de l’espace aérien des ports à la veille de la percée de cette nouvelle technologie constitue une préoccupation pour les deux ports qui couvrent chacun une superficie de 120 km². La création d’une « tour de contrôle » pour gérer le trafic aérien de drones est envisagée par Anvers et pas exclue par Rotterdam.
