Corridor Atlantique : Nantes Saint-Nazaire lorgne vers l’Irlande

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Crédit photo ANDRE BOCQUEL
Annoncé en juin 2018, l’inscription du grand port maritime de Nantes Saint-Nazaire au « corridor Atlantique », officieusement acceptée, devrait officiellement intervenir en avril 2019. Et avec elle, une connexion vers les ports irlandais qui, au regard du Brexit, ouvre de nouvelles perspectives commerciales pour l’infrastructure portuaire et son hinterland.

« Jusque-là, le territoire de Nantes Saint-Nazaire était quasiment sous les radars de l’Union européenne. Aujourd’hui, il y est et sur tous les tableaux », se réjouit Sébastien Pilard, vice-président de la région Pays-de-la-Loire, en charge de la croissance bleue et du développement international, alors que le « trilogue », cette instance représentative de la Commission européenne, des vingt-huit Etats-membres et du Parlement européen vient de donner un avis favorable, sous la forme d’un compromis, au raccordement du grand port maritime de Nantes Saint-Nazaire (GPMNSN) au « corridor Atlantique », dessiné entre Mannhein (Allemagne) au Sud de l’Espagne et du Portugal en passant par la France (Le Havre, Paris, Bordeaux). « Pour voir l’impact de ce corridor, il n’y a qu’à regarder une carte pour s’apercevoir que les échanges européens sont principalement des liaisons Nord-Sud et très peu Est-Ouest. Alors, on est parti du principe que le port de Nantes Saint-Nazaire étant le principal port de l’Atlantique, nous avons une vraie opportunité pour mettre en place une route de fret, qui traverse l’Europe d’Ouest en Est, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui », indique Sébastien Pilard. Ce compromis, arraché après moult amendements, devrait être transformé par les votes des institutions respectives, à partir du 20 avril 2019. Pour les acteurs du projet et les experts européens, plus aucun risque n’existe. « Les avis du trilogue sont habituellement suivis », s’accordent-ils. La satisfaction est d’autant plus grande du côté des ligériens que l’amendement déposé par Sébastien Pilard, au nom de la région et du grand port maritime, pour intégrer les ports irlandais de Shannon Foynnes, Dublin et Cork au corridor a été entendu. « Dans le contexte du Brexit, on pense que les liaisons entre l’Irlande et l’Europe vont être plus difficiles et que la voie maritime va être privilégiée plutôt que le Channel et autres circuits », estime Sébastien Pilard.

Le potentiel irlandais suscite les convoitises

« Dans le cadre du Brexit, un certain nombre de trafic étant tourné vers l’Angleterre, il nous semblait important que l’on identifie d’autres parcours possibles et que le port de Nantes Saint-Nazaire puisse être identifié comme un lien potentiel », ajoute Yasmine Brossaud-Prin, directrice des finances et de la programmation du GPMNSN. « Si l’on regarde la France et l’Irlande, un certain nombre de flux font sens. L’Irlande importe des voitures, nous avons un terminal roulier performant. Même chose pour l’agroalimentaire. Nous avons un certain nombre de facteurs et d’intérêts commun pour que puisse être envisagées des liaisons entre l’Irlande et la façade Atlantique », dit-elle. Jusqu’ici, seul le port du Havre constituait une porte d’entrée sur le territoire. « Si aucune ligne n’est établie à ce jour entre Nantes Saint-Nazaire et l’Irlande, des perspectives existent pour développer des lignes directes alors que les ports du Nord sont confrontés à des problématiques d’engorgement », indique Yasmine Brossaud-Prin qui reconnait des échanges avec les ports irlandais et des chargeurs pour évoquer la faisabilité de lignes directes, et se positionner.

Au même titre que le Havre ou Fos-sur-Mer au Sud, Nantes Saint-Nazaire va devenir un port prioritaire aux yeux de l’Union européenne. Pour l’aspect maritime mais aussi pour développer les questions d’intermodalité, fluviale, routière ou ferroviaire. Et notamment, sur l’axe Nantes-Angers-Tours-Dijon, l’une des principales liaisons ferroviaires de la région, qui sera inscrite sur le corridor Atlantique dès l’adoption définitive du nouveau Mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE), qui permet de prétendre à des fonds européens de façon prioritaire sur la période 2021‐2027. « Au niveau continental, le lien vers Dijon va permettre un accroissement de l’hinterland du port de Nantes vers l’Est, dont l’une des raisons évoquées par la Commission européenne est de contourner l’Ile-de-France dans les grands flux et sortir de la problématique d’engorgement de cette région », précise Yasmine Brossaud-Prin.  

Dans ce contexte, cette nouvelle donne est plus dure à avaler en Bretagne, où Brest et Roscoff entretiennent des liaisons avec Cork, en particulier avec la Britanny Ferries, tandis la Commission européenne laissait entendre, à l’automne 2018, que le fret de Dublin et de Cork pourrait être acheminé vers les ports de Rotterdam au Pays-Bas et d’Anvers et Zeebrugge en Belgique. Par l’intermédiaire du Pôle métropolitain Loire-Bretagne, les métropoles de l’Ouest (Rennes, Brest, Nantes, Saint-Nazaire) ont adressé un courrier au premier ministre Edouard Philippe pour que le corridor Atlantique soit étendu jusqu'à la pointe bretonne. « L'enjeu est également de faire inscrire au réseau central, les « nœuds » (urbains ou portuaires) d'Angers, Rennes et Brest-Roscoff en complément de Saint-Nazaire et Nantes qui y sont déjà », rappelle Jennifer Cheruel, déléguée générale du Pole Métropolitain Loire-Bretagne. Un préalable à l’inscription au corridor. Nantes-Saint-Nazaire a pris une longueur d’avance.

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