Ils en ont tous l’intime conviction. Le marché va rester porteur encore pendant quelques années. Et leur aplomb se nourrit essentiellement de la vision qu’ont leurs clients de leur marché. « Les compagnies se précipitent pour fixer les contrats même un an avant que les affrètements actuels n’expirent. Ils ont une connaissance des flux commerciaux bien mieux que quiconque. Le marché va rester fort », en déduisait Evangelos Chatzis, directeur financier de Danaos. L’entreprise, dont la flotte a été exploitée à 98,5 %, a enregistré un bénéfice net de 236,4 M$ au cours du troisième trimestre. Ses revenus ont augmenté de 69,6 M$, principalement en raison de la hausse des taux d’affrètement, dont 32,1 M$ tirés des revenus générés par les navires nouvellement acquis.
« Nous avons contracté 58 accords à terme en 2021, soit près de la moitié de notre flotte actuellement en service. 6 d’entre eux seront libérés en 2022 et 19 en 2023 », expliquait pour sa part Graham Talbot, directeur financier d’Atlas, la maison-mère de Seaspan, qui n’a plus de roll-off [affrètements arrivant à échéance, NDLR] cette année. Le groupe basé à Londres a vu sa flotte s’étoffer de 25 navires, au cours du troisième trimestre, totalisant 175 000 EVP, dont le premier porte-conteneurs d’une liste qui en comptera 69 autres (le NOO n’avait plus commandé de navires depuis 2018). Pour les financer, l’entreprise a eu recours pour la première fois de son histoire aux obligations institutionnelles non garanties aux États-Unis (750 M$). Seaspan a enregistré une croissance de ses revenus de 17 % au cours du troisième trimestre par rapport à la même période de 2020, à 451,9 M$, « principalement liée à une augmentation des taux d’affrètement moyens de notre flotte existante et à la contribution de six navires d’occasion livrés à Seaspan après septembre 2020 ».
Gregory Zikos, le directeur financier de Costamare, abonde: « Le marché tire sa force d’une dynamique favorable de l’offre et de la demande. Tous nos porte-conteneurs sont fixés à des niveaux d’affrètement de plus en plus élevés. Les revenus contractuels ont atteint 3,3 Md$ et la durée moyenne d’affrètement à temps pour notre flotte est de plus de quatre ans. Nous avons neuf porte-conteneurs qui seront affrétés d’ici la fin de l’année prochaine. »
80 000 $ la première année
Costamare, qui s’est aussi positionné ces derniers mois sur le vrac sec en achetant une vingtaine de vraquiers d’occasion, a augmenté ses revenus de 49,4 % sur les neuf premiers mois de l’année par rapport à fin septembre 2020, soit 168,5 M$, pour atteindre 509,7 M$. « Cette augmentation est principalement attribuable aux revenus générés par 16 porte-conteneurs et 26 vraquiers acquis durant les neuf premiers mois de l’année et à l’augmentation des taux d’affrètement de certains de nos porte-conteneurs. »
Constantin Baack, PDG de MPC Containers, base son assurance sur le fait que les « armateurs concentrent les paiements sur la première année des affrètements pluriannuels ».
Certains NOO déclarent en outre avoir conclu des accords de frontloading, qui leur permettent d’encaisser 80 000 $/j la première année alors que le tarif journalier est négocié à 45 000 $/j (les échéances sont ensuite diminuées chaque année). « Nous n’avons pas imposé cette condition. C’est une demande des compagnies », explique Evangelos Chatzis, qui y voit un autre gage.
Ils ne s’inquiètent pas davantage du boom des commandes de nouveaux porte-conteneurs contractés par les exploitants. Elles représentent pourtant 23 % de la flotte en service. « La grande majorité ne sera pas livrée avant 2023-2024 » et « il y aura des retards dans la livraison en raison des perturbations actuelles », croit savoir Constantin Baack. Les propriétaires de flotte ont de toute façon bétonné leurs contrats, sécurisant les engagements sur une longue période. Des liquidités assurées pour quelques années.