Le grand chambardement

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Imposants mais faibles. C’est par cette formule que les journalistes économiques chinois décrivent en privé les ports de leur pays. Car s’ils traitent des volumes considérables, la rentabilité de beaucoup est faible et certains souffrent d’une surcapacité. La faute à une compétition féroce entre les uns et les autres, chaque gouvernement local ayant voulu le sien et abondamment usé de subventions publiques pour attirer compagnies maritimes et chargeurs. Pékin a sifflé la fin de la partie et intimé une remise en ordre portuaire.

D’où les regroupements de ports sous une même entité effectués dans plusieurs provinces au cours des dernières années. Amenée à se poursuivre, cette politique va faire évoluer le paysage portuaire chinois tout comme le développement des Free Trade Zones, qui donnent un avantage indéniable aux ports situés dans leur périmètre ou à proximité.

L’intégration est ainsi à l’ordre du jour dans le delta de la Rivière des Perles, où Pékin a lancé son projet de Greater Bay Area, en vue d’interconnecter neuf grandes villes chinoises de son pourtour avec Macao et Hong Kong pour créer un des premiers pôles économiques mondiaux, sur le modèle de la Silicon Valley. Au programme, plus de coopération et moins de concurrence dans le secteur portuaire. Un rapport remis aux autorités préconise que Hong Kong se concentre sur le transbordement et les importations à destination de la Chine, Guangzhou sur les liaisons intra-chinoises et Shenzhen sur l’export principalement et, à un degré moindre, sur les imports. Pékin doit encore décider et ses choix pourraient être influencés par les événements de Hong Kong. En attendant, China Merchants Group a dévoilé son intention de faire de Shekou, à Shenzhen, le plus gros importateur de fruits du sud de la Chine.

Au nord, Liaoning et Shandong…

Au nord du vaste pays, la récente fusion des terminaux à conteneurs de Tianjin va sans nul doute produire ses effets en termes de logistique et de coûts. Mais ce qui retient le plus l’attention dans cette région, ce sont les évolutions dans les provinces du Liaoning et du Shandong qui ont, entre 2017 et 2018, parachevé l’intégration de leurs ports avec chacune une Free Trade Zone (FTZ). Ayant China Merchants Group pour actionnaire majoritaire, Liaoning Port Group a investi en partenariat avec Russian Railway dans la construction d’un centre logistique près de Moscou. Livré en principe courant 2020, il doit favoriser le transport par rail de conteneurs de l’Europe vers la Chine via Dalian.

Les échanges avec les pays voisins et le développement de la multimodalité figurent aussi au rang des priorités de Shandong Port Group pour Qingdao et Yantai, deux des ports qu’il chapeaute avec Rizhao, Weihai et Bohai Bay. Avec comme objectif d’atteindre un trafic de 28 MEVP en 2022. Shandong Port Group entend également se positionner comme point de départ des liaisons Asie – Europe par la voie arctique. Il a ainsi coopéré, cet été, avec Cosco Shipping Specialized Carriers pour l’organisation du voyage d’un cargo chargé de pulpe de papier d’Helsinki à Qingdao.

Dans le delta du Yangtze

Le delta du Yangtze est le théâtre d’une compétition entre les ports côtiers pour capter le trafic conteneur croissant le long du fleuve. Zhejiang Ningbo et Shanghai ont ainsi conclu un partenariat pour développer la partie nord du port de Yangshan afin d’y capter les feeders et ainsi optimiser le transbordement entre navires océaniques et fluviaux. Implanté dans la FTZ de Shanghai depuis sa récente extension, Ningbo est promis à un bel avenir.

Situé en amont du fleuve, le 10e port conteneur chinois, Taicang, entend lui aussi profiter de ce trafic fluvial. À cet effet, il va se doter de quatre postes d’amarrage supplémentaires pour porter sa capacité à 6 MEVP en 2020 et a conclu un partenariat avec son voisin, Jintan, à Changzhou.

Reste qu’une incertitude hypothèque l’ensemble de ces développements. La possible ouverture du cabotage aux compagnies maritimes étrangères entraînerait des reports de trafic de certains ports vers d’autres et influerait sur les stratégies définies. Et ce, même si seul le port de Shanghai serait le principal impacté.

Les bouleversements induits déborderaient des seules frontières de la Chine. En Corée, Busan serait particulièrement affecté alors qu’il vient d’engager des travaux de dragage pour porter la profondeur du New Port à 17 m dans le but de pouvoir accueillir les porte-conteneurs de 23 000 EVP et plus. Trois nouveaux quais pour 2 MEVP de capacité supplémentaires sont également attendus pour mi-2022. Le gouvernement coréen prévoit par ailleurs 35,2 Md$ d’investissements publics et privés pour accroître les capacités portuaires de la péninsule et porter le conteneur à 48,73 MEVP en 2040 contre 28 MEVP à ce jour. Si Incheon et Gwangyang (au nord) doivent bénéficier d’une partie des subsides, c’est le sudiste Busan qui sera privilégié, aspirant à lui seul 11,1 Md$. De quoi se doter de 21 quais et être en mesure de se hisser au 3e rang mondial.

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