Chacun apporte une pierre à l’édifice

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« Il ne sert à rien d’avoir de bons projets sans une volonté politique », a commencé par déclarer Mircea Ciopraga, secrétaire général de Traceca, organisation multilatérale basée à Bakou, qui travaille sur les corridors eurasiatiques. Cette organisation fournit principalement des aides techniques aux opérateurs des pays adhérents. Elle vise à aider les sociétés impliquées dans la construction d’infrastructures pour leur apporter un soutien technique. « Notre rôle est avant tout de fluidifier le transit au travers des différents corridors. » Si la ceinture terrestre emporte encore de nombreux projets à construire, il reste que la route maritime restera prédominante avec la capacité que les navires peuvent emporter. Néanmoins, pour les pays périphériques, à savoir ceux qui ne se situent pas directement sur le trajet entre la Chine et l’Europe, ce projet de One Belt One Road présente de nombreux avantages pour donner une ouverture. Ainsi, lors du sommet annuel du Crans-Montana Forum, le vice-Premier ministre cambodgien, Samdech Kralahom Sar Kheng, a souligné l’importance pour son pays d’être connecté à ce projet. « La route de la soie est un grand projet d’infrastructure qu’il faut voir aussi à l’aune de la sécurité et de la paix mondiale », a continué Samdech Kralahom Sar Kheng. Pour aller encore plus loin dans son souhait de voir la route de la soie devenir une réalité, il a indiqué que « la nouvelle route de la soie a été réactivée par la Chine, mais sans des accords mutuels entre les pays la réalisation pourra être difficile. La Chine seule ne peut y arriver. Il faut l’accompagner ».

Une route jusqu’en Afrique

Dans le projet chinois, cette nouvelle route de la soie doit s’étendre jusqu’en Afrique. Déjà, en prenant position dans le port de Djibouti au niveau militaire et commercial, les sociétés et l’État chinois créent un lien vers l’est de ce continent. « La route de la soie vise à être le début d’une nouvelle ère avec un partenariat global de co-croissance économique entre les deux continents », a souligné le porte-parole de l’Assemblée nationale du Bénin, Adrien Houngbedji. Celui-ci a également rappelé que la Chine a d’ores et déjà investi lourdement dans des secteurs comme les mines, les télécoms, les infrastructures et d’autres secteurs en Afrique. « Ce projet, nous le voyons comme un retour des commerçants chinois de l’ancien temps. » Et Adrien Houngbedji de reprendre la célèbre phrase de John F. Kennedy, en l’adaptant: « Qu’est-ce que la nouvelle route de la soie peut apporter à l’Afrique et qu’est-ce que l’Afrique peut apporter à ce projet » Alors, quand la Chine investit dans les ponts, les voies ferrées et les routes, l’Afrique, et notamment sa partie orientale, doit aussi accompagner le mouvement en créant, sur les côtes, des hubs logistiques dédiés qui servent de relais terrestre et maritime à cette nouvelle route de la soie. L’Afrique doit pouvoir profiter de ce projet. « La Chine est notre principal partenaire économique. C’est dans l’intérêt mutuel des pays africains et de la Chine d’investir les matières premières dans ces projets, mais aussi de le faire dans le cadre d’un développement durable », a continué le conseiller du président du Nigeria, Obadiah Mailafa.

Ainsi, politiquement, plusieurs gouvernements voient dans ces projets une nouvelle croissance économique. Ce projet a été dévoilé en 2013, quand la Chine a vu les premiers effets de la crise mondiale touchés son économie. Pour trouver un second souffle, le gouvernement de Pékin a voulu étendre plus loin ses objectifs, notamment vers l’Asie centrale. « Le coût du travail et le prix du terrain connaissent des augmentations importantes en Chine. Les sociétés ont pris un virage en décidant de passer d’un statut d’exportateur de biens à celui d’exportateur de capitaux », a rappelé Obadiah Mailafa. Il reste que le commerce entre l’Asie et l’Europe est, de loin, le plus important en termes de conteneurs maritimes. Alors, pour les opérateurs privés, la création de nouveaux corridors physiques et virtuels entre les deux continents devient rapidement une réalité. En Asie centrale, le transport terrestre a été multiplié par dix, explique Siddique Khan, président de Globalink Logistic Group, transitaire et commissionnaire basé au Kazakhstan. « Nous devons envisager ce projet comme un retour à nos fondamentaux, à savoir la liberté de circulation des marchandises », a continué le président de Globalink.

Des hubs partout

Dans son organisation, Globalink travaille avec la mise en place de hubs logistiques tout au long de la route pour développer le commerce local. « Nous ne faisons pas de bénéfices sur une marchandise depuis la Chine jusqu’en Europe. C’est sur les trafics régionaux que nous réalisons la majorité de nos marges. » Le président et directeur général de Irisl (Iranian International Shipping Line), Mohammad Saeidi, rappelle les coûts de transport. Un conteneur entre Rotterdam et Shanghai est estimé à environ 1 550 $ pour un EVP. Le même trajet par voie terrestre coûte environ 7 600 $. « Le rail et la route terrestre ne seront jamais des concurrents directs du maritime en raison de leur coût, mais ils interviendront davantage comme un mode de transport alternatif », a continué Mohammad Saeidi.

Un prix bien supérieur lié aux capacités de transport que le maritime offre aujourd’hui. Pour appuyer ses dires, il compare les deux modes de transport. En ferroviaire, un train relie les deux parties du continent en 20 heures pour un trajet de 10 000 km. Il faut compter en moyenne 4 heures par jour de maintenance sur le train. Chaque seconde, un EVP quitte la Chine. Dans des conditions optimales, ce sont 2 400 EVP qui peuvent partir tous les jours vers l’Europe par voie ferroviaire. En prenant le volume annuel des conteneurs maritimes entre l’Europe et l’Asie, soit 23,5 MEVP, cela signifie que 64 383 EVP empruntent la voie maritime. Des estimations faites uniquement sur les trafics conteneurisés. Dès lors que sont intégrés dans ces volumes les trafics de vracs secs et liquides ainsi que les marchandises diverses, le poids du maritime est tel que le ferroviaire ou la route ne pourront être des concurrents. « La nouvelle route de la soie ne sera pas un concurrent, mais un mode complémentaire dès lors que les barrières administratives auront pu être levées. » Et, au travers de cette route, les partisans imaginent déjà des développements avec des pays comme l’Afghanistan. « Nous construisons à Chahabar un nouveau port en lien direct avec celui de Nhava Sheva, en Inde, qui permet de relier l’Inde à la route de la soie par notre pays et de créer un corridor logistique avec l’Afghanistan. Cette nouvelle route de la soie se fera non seulement pour le commerce, mais aussi dans un idéal de paix et de sécurité des nations concernées », a conclu Mohammad Saeidi.

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